Que feriez-vous, si vous vous retrouviez plongée dans le Poudlard dont vous rêviez gamine ? Comment passeriez-vous vos années à l’école des Sorciers ? Seriez-vous une mordue de botanique toujours fourrée à la serre, une amoureuse des animaux occupée à repérer les mystérieux Kelpy des marais, une championne de Quidditch n’allant nulle part sans son balai, une maîtresse des potions touillant un chaudron toute la sainte journée ?
Quoi ? Vous préférez mater la révolution légitime d’un peuple opprimé, aidée par un esclave sympathique ?
C’est surprenant, pas très moderne, mais la bonne nouvelle c’est que Hogwarts Legacy devrait vous plaire, du coup.
La révolution des Gobelins dans Hogwarts Legacy : L’Héritage de Poudlard fait polémique
Pour rappel, Hogwarts Legacy : L’Héritage de Poudlard est l’un des projets vidéoludiques les plus attendus du moment : c’est le premier RPG en monde ouvert dans l’univers d’Harry Potter, franchise qui n’a pas encore eu droit à une adaptation en jeu vidéo à sa hauteur.
Malgré la transphobie de J.K. Rowling menant certaines personnes à calmer leur enthousiasme, Hogwarts Legacy avance toujours, confiant, vers une sortie prévue pour 2023 et dévoile peu à peu des éléments de son intrigue.
Comme le fait qu’il faudra… je vérifie mes notes… oui. Mater une révolution de Gobelins. Bon.
Les Gobelins dans Harry Potter, caricature antisémite ?
Dans Harry Potter, dire que les Gobelins sont un peuple peu sympathique serait déjà un euphémisme : ils sont avares, pince-sans-rire, désagréables voire inquiétants.
Ils sont aussi un peuple de banquiers avides d’or, au nez crochu, dont le design dans les films présente des similarités avec la façon dont les Juifs sont représentés dans de nombreuses caricatures antisémites.
Cela fait plusieurs années, plusieurs décennies même que plusieurs personnes expriment leur malaise face à ce choix de design des personnages. Récemment, en janvier 2022, le célèbre animateur américain Jon Stewart s’est souvenu dans son podcast du jour où il a découvert les Gobelins d’Harry Potter :
« C’était l’une de ces situations où, quand j’ai vu ça sur grand écran, j’étais sûr que tout le monde allait se dire “Mais bordel, elle n’a pas mis des Gobelins en charge de la foutue banque souterraine de son monde de sorciers ?!”. Sauf que tout le monde était en mode : “Eh, c’est les sorciers”. »
Le lien entre ces Gobelins et les caricatures antisémites n’est pas considéré comme volontaire, et ne fait pas l’unanimité ; après la déclaration de Jon Stewart, plusieurs figures médiatiques juives avaient ainsi argué que « parfois, un Gobelin est juste un Gobelin ». Mais cela fait en tout cas plusieurs années qu’il circule.
Et vu la cristallisation des tensions autour de l’univers Harry Potter depuis les multiples sorties transphobes de J.K. Rowling, il n’en fallait pas moins pour que ce scénario de Hogwarts Legacy fasse grincer des dents.
Une révolution de Gobelins à mater dans Hogwarts Legacy : L’Héritage de Poudlard ?
Hogwarts Legacy se déroule à la fin du XIXè siècle, lors de la plus récente rébellion de Gobelins, menée par un certain Ranrok allié au mage noir Victor Rookwood (dont le descendant, fun fact, deviendra un bon gros Mangemort).
Le héros ou l’héroïne que l’on incarne devra mettre fin à cette révolution, selon le blog officiel de Playstation.
« Plus récente rébellion de Gobelins », oui, car il y en a eu d’autres, d’après le wiki, qui rappelle :
« Ces rébellions peuvent avoir été motivées par le manque de représentation des Gobelins au sein du Magenmagot [le tribunal des sorciers, ndlr] ; par des tentatives de réduire les Gobelins en esclavage tels des elfes de maison ; par la fin de leur privilège à porter une baguette ; par les tentatives de prise de contrôle de Gringotts par des sorciers ; par les meurtres de Gobelins perpétrés par Yardley Platt [un tueur en série sorcier du XVIe siècle, ndlr]. »
Donc attendez : les Gobelins ne sont pas représentés, ils ont failli être réduits en esclavage plusieurs fois, ils n’ont pas le droit d’utiliser des baguettes, les sorciers ont voulu piquer leur banque…
Excusez-moi mais leur révolution paraît quelque peu justifiée, non ?
Alors OK, Ranrok n’est pas forcément le leader gauchiste d’une rébellion populaire ; le blog de Playstation précise :
« Sa vision du monde est biaisée par sa haine des sorciers, ce qui rend son alliance avec Victor Rookwood particulièrement fragile. Une fois que Ranrok obtiendra ce qu’il désire, plus personne ne pourra l’arrêter et le monde des sorciers sera condamné. »
Ah yes… le monde des sorciers racistes du coup ? Bon bah c’est peut-être pas plus mal s’il est condamné ? Et peut-être que cette « haine des sorciers » est un poil justifiée ? Ranrok et Magneto ne sont-ils pas légitimes dans leur combat ? Je demande, hein. Vous avez quatre heures.
Mais heureusement, pour empêcher un peuple opprimé de se révolter, vous pourrez compter sur l’aide d’un esclave qui traîne dans le coin !
Des elfes de maison dans Hogwarts Legacy : L’Héritage de Poudlard, ah bon ?
Eh oui. Autre choix de l’équipe d’écriture du jeu Hogwarts Legacy qui fait polémique : on pourra y recevoir l’aide d’un elfe de maison — qui s’appelle Deek plutôt que Dobby.
Pour rappel, les elfes de maison sont des créatures magiques très puissantes, mais réduites en esclavage par les sorciers qui les utilisent comme êtres à tout faire. Dans Harry Potter, Hermione milite pour leur libération, mais comme L’Héritage de Poudlard se déroule au XIXe siècle, son combat n’est pas encore passé par là.
Il n’est donc pas étonnant d’y croiser des elfes de maison, mais plusieurs joueurs et joueuses craignent que leur statut d’esclave ne soit pas traité avec le sérieux qu’il mérite, et que Deek ne soit qu’un personnage non-joueur de plus aidant le héros ou l’héroïne à réussir sa mission.
La méfiance envers le jeu Hogwarts Legacy : L’Héritage de Poudlard, symptôme d’une désillusion
Pas question de vous ordonner de boycotter le jeu, vous faites bien ce que vous voulez, mais il est indéniable qu’une partie de la communauté qui attend Hogwarts Legacy redouble de prudence au fur et à mesure des annonces, de peur de se passionner pour une œuvre qui s’avèrerait finalement problématique (rappelons que le lead designer de l’adaptation est un anti-féministe notoire).
Certains fans, comme ici sur Reddit, espèrent que ces annonces sont le teasing d’un scénario plus complexe, avec des retournements de situation ; nous finirons peut-être par affronter Rookwood le facho, qui tente de prendre le contrôle sur la rébellion des Gobelins ? Un an avant la sortie de Hogwarts Legacy : L’Héritage de Poudlard, il est en effet trop tôt pour se prononcer définitivement sur son contenu.
Mais ce qui est sûr, c’est que chat échaudé craint l’eau froide : au vu des désillusions qui s’enchaînent et écornent l’image immaculée que certains et certaines se faisaient de l’univers Harry Potter, on constate ici une réelle prudence de la part d’une partie des fans qui préfèrent patienter avant de s’enflammer.
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Les Commentaires
Ce n'est pas bien long et pas centré sur le film mais avec l'ensemble du docu, on comprend bien qu'aujourd'hui on ne peut plus ignorer les origines de certaines représentations, quand bien même les premières sources (folklore européen et germanique) n'avaient pas de connotation envers la communauté juive.
Voilà, ce passage m'a rappelé ce topic donc je le partage