Jeudi soir, je suis donc allée à ma première soirée cannoise.
Bon, je dis soirée mais en fait pas complètement. C’était un concert privé de Lilly Wood & the Prick à la villa UGC (oh tiens, une acoustique pour madmoiZelle !). En me préparant, j’étais fébrile : je savais pas trop si je faisais l’effort d’enfiler une robe ou si j’y allais un peu chill out, faussement décontracté du bulbe. J’ai finalement opté pour cette seconde option, me disant que de toute façon, mes chaussures à talons de 12 compensés suffiraient à me donner un minimum de prestance.
J’ai eu tort. Moi qui suis habituée à porter du bébé talon, j’ai cru crever à peine après avoir descendu non sans mal les trois étages qui séparent notre appartement du reste du monde. Problème : il nous restait quinze minutes de marche. Autant te dire que j’étais à peu près aussi ronchon que Walter dans The Big Lebowski.
Une fois arrivée au 9ème étage – avec ascenseur – j’ai ressenti un soulagement incroyable, un peu comme quand on finit par déboutonner son jean en rentrant du restaurant de burger alors qu’on s’est un peu lâché sur le double cheese XXL, au hasard. Je me suis affalée sur un canapé, une coupe à la main avec ce fantastique groupe qu’est Lilly Wood & the Prick en guise d’ambiance musicale live. C’était foutument agréable, un peu comme d’être dans son salon avec de la musique dans les oreilles et un coca dans la main, sauf qu’un bon gros niveau au-dessus.
À un moment, alors qu’on était sur la terrasse en train d’essayer de parler avec le serveur (impassible), on m’a dit « y’a des cocktails à l’étage, tu devrais aller y faire un tour ». Alors j’ai un peu observé les gens qui montaient les escaliers d’un pas décidé. Et puis j’ai oublié : faussement blasée, je discutais avec Alison (on parlait boulot, pour faire sérieux) en rêvant de retirer mes pompes (mais en même temps j’étais assise alors pas j’en avais pas VRAIMENT besoin).
Soudain, j’ai regardé à nouveau les escaliers et ce que j’y ai vu, je ne l’oublierai jamais. Des gens que j’avais trouvé frais et absolument trop classes en arrivant (45mn avant, donc) qui descendaient avec l’élégance d’une flaque de boue, les cheveux défaits, la mine déconfite. Bon. Il va sans dire que j’ai décidé de renoncer aux cocktails. On m’expliquera après que c’était du champagne mélangé avec des fruits rouges et que « ohlala on sent pas du tout le champagne ». On m’expliquera aussi que le barman qui préparait les dits cocktails s’occupaient de TOUTES les soirées de Madonna. Une info inutile mais à ressortir à volonté, l’air de rien, DONC « tellement Cannes ».
On a par la suite décidé de partir vers d’autres horizons, à savoir, le petit appartement. où on frotte nos cheveux sur nos oreillers respectifs. Oui mais non. Parce que bon, merde, c’est mon premier Cannes et il était 1h, j’avais pas envie d’aller me coucher, j’étais on fire (surtout de la voûte plantaire en vrai). Et justement, en passant, on a vu une tente sur la plage avec marqué Magnum en gros dessus. On a essayé de rentrer sans invitation (sans AUCUNE invitation), fouillant dans nos sacs en soupirant et en faisant semblant de parler à des gens à l’intérieur, mais ça n’a pas marché. Et puis bon, je suis pas assez influente au niveau mammaire pour faire tourner un sein
alors j’ai lâché l’affaire.
Occupy Cannes, militants punk
Le lendemain, je ne sais plus quelle heure il était quand j’ai décidé d’aller tâter de la Croisette. Disons que l’horloge montrait 13h22 quand j’ai fermé la fenêtre, dans le seul but d’éviter que les gens qu’on avait embêté la veille en discutant à 1h30 du matin avec les voisins d’en face ne viennent, je sais pas, mettre des miettes dans ma valise. Il ne pleuvait pas. J’ai descendu les escaliers et ouvert la porte. Il était 13h23, il pleuvait.
Je me suis mise en marche vers le bord de mer, où j’ai croisé un groupe de jeunes gens repartant quelque part vers l’est l’ouest le nord le plateau du Grand Journal. L’un d’entre eux avait un masque de mort-vivant fait de miasmes sur la tête et ils avaient tous une petite pancarte avec marqué Troma et Occupy Cannes. J’ai demandé à l’un d’entre eux ce qu’ils faisaient là, à repartir loin du Palais des festivals :
« On voulait faire un faux mariage entre deux filles et la police nous l’a interdit en nous disant que si on voulait vraiment le faire, on n’aurait plus le droit de faire de défilé. Du coup, on est partis. »
Un détournement par Occupy Cannes de l’affiche du festival pour promouvoir le faux mariage du jour.
Le principal mot d’ordre de Troma, c’est de promouvoir les films indépendants face aux grosses majors. Avec Occupy Cannes, ils ont décidé de donner un peu plus de visibilité à leur mouvement en profitant du plus ; c’est dans le contexte et il y a plein de monde. Pour faire connaître leur mouvement, ils ont recours à ce qu’on appelle du happening.
Bon alors tu me diras, le coup du faux mariage lesbien, j’ai pas trop compris le rapport mais sachant que la veille, un monsieur tout nu courait sur la Croisette, que par la suite, ils feront un rassemblement contre les bullys, une manifestation contre la cruauté envers les animaux et des projections gratuites de leur film d’horreur punk, Return to nuke ‘em high, ça colle finalement. Une sorte de melting-pot de la revendication. Ah bah tiens, en parlant de leur film, en voilà le trailer. Par contre attention : c’est plus gore qu’une page Wikipedia sur l’herpès génitale et un ongle d’orteil arraché :
https://www.youtube.com/watch?v=PqNW2ddtEYA
Forte de mon envie de faire de l’immersion, j’ai voulu les suivre pour faire un portrait collectif, mais j’ai fait chou blanc :
« Vous allez où là, j’peux vous suivre un peu ? – Ah non là on va à notre appartement, haha »
Je me suis sentie seule. Un sentiment qui ne s’est clairement pas arrangé quand, dans une rue bondée, j’ai voulu prendre le magazine qu’on me tendait et que la distribueuse a retiré sa main au moment où je tendais la mienne en lui disant bonjour avec un grand sourire.
J’ai alors découvert un autre aspect de Cannes : le dark side of the pipou.
Les Commentaires
Ça avait l'air bien la soirée avec le concert privé
Moi j'étais contente parce que je suis montée sur un yacht pour la première fois de ma vie, à la soirée Arte pour le lancement du film Le joli mai. Mais j'ai raté le dernier bus par contre, donc je suis complètement claquée.
Si tu veux on peut se voir, aussi...