Depuis sa participation à la Nouvelle Star en 2009, Camélia Jordana n’a cessé de consolider sa place dans le paysage culturel français, à tel point qu’on la voit partout. Autrice, compositrice, interprète, comédienne… Elle excelle sur grand écran dans Le Brio (2017) ou encore Les Choses qu’on dit, les Choses qu’on fait (2020), pour ne citer que nos films préférés.
En cette rentrée, elle est à l’affiche d’Irrésistible sur Disney+, une série dans laquelle elle tient le premier rôle, aux côtés d’un casting trois étoiles : Théo Navarro-Mussy (Hippocrate), Marion Seclin, Simon Ehrlacher, Salomé Dewaels… Elle incarne le personnage fantasque d’Adèle, podcasteuse à succès qui tombe amoureuse d’Arthur, un mathématicien. Jusque-là, tout va bien, mais c’était sans compter les crises d’angoisse à répétition qu’Arthur provoque à Adèle par sa simple présence…
Rencontre avec une étoile montante du petit (et du grand) écran français, assuré sans spoiler.
Interview de Camélia Jordana, à l’affiche de la série Irrésistible, sur Disney+
Madmoizelle. Qu’est-ce qui vous a plu dans le personnage d’Adèle, et plus généralement dans la série ?
Camélia Jordana. Pour être honnête, c’est à la lecture du premier épisode que j’ai eu un crush absolu pour Adèle. Ensuite, j’ai eu la chance de rencontrer Clémence Madeleine-Perdrillat la showrunneuse de la série et Arnaud de Crémiers qui ont eux-mêmes eu un double crush pour moi. J’ai adoré, dans ce premier épisode, l’audace et la modernité de Clémence. J’ai adoré qu’elle choisisse le podcast comme décorum pour la série et j’ai adoré le fait qu’elle s’approprie tous les codes de la comédie romantique et qu’elle les inverse : on commence par une rencontre amoureuse et, dès le premier épisode, ils concluent, ça se passe bien, et en fait, c’est sur la suite que ça va se compliquer. Et puis, il y a évidemment son female gaze qui m’a convaincue.
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Adèle est un personnage très fantasque, audacieux, auquel on s’attache très rapidement. Qu’est-ce qui vous rapproche d’elle, et qu’est-ce qui vous en éloigne ?
Camélia Jordana. Je pense que là où l’on peut se retrouver elle et moi, c’est le fait qu’elle écoute beaucoup son instinct quand il s’agit de son travail par exemple. Elle dirige une équipe, elle a son studio, c’est aussi une business woman… Elle se bat auprès de Trésor pour pouvoir faire exactement ce dont elle a envie, et en ça, je me reconnais beaucoup en Adèle. Maintenant, là où nous sommes diamétralement opposées, c’est, je crois, dans le rapport à notre santé mentale, physique et nos relations amoureuses. J’ai plutôt tendance à tirer sur la corde, mais il y a toujours un moment où je fais un petit bilan avec moi-même et où j’appelle ma thérapeute en lui disant « je crois qu’il est temps » [rires]. La santé mentale est une chose très importante pour moi et à laquelle je prête beaucoup attention. Et, pour le coup, concernant les relations amoureuses, je suis incapable de rester en lien de manière aussi étroite comme elle le fait avec Trésor. Je peux être en lien et en bons termes avec des personnes avec lesquelles j’ai eu une histoire d’amour, mais pas de manière aussi liée et quotidienne, c’est impossible.
Vous parlez de santé mentale, comment est-ce devenu un sujet important pour vous ?
Camélia Jordana. Ça m’est arrivé plus d’une fois, pendant de nombreuses années, de tirer sur la corde, et c’est vraiment après plusieurs burn-out que je me suis dit, « ce n’est plus possible, je ne peux plus continuer comme ça ». J’aime trop mes métiers, et j’arrivais à un stade auquel je n’avais plus envie de travailler, et où physiquement, émotionnellement et mentalement, j’étais en morceaux. J’ai pensé, « j’ai tout pour être heureuse dans ma vie, donc je ne peux pas me retrouver dans cette situation-là ». Malheureusement, je continue parfois à pousser mes limites et à être près de flancher, près d’être au bout, où mon corps me dit stop. Ce qu’il y a, c’est que je l’ai tellement habitué à pousser ses limites très loin que maintenant, j’ai du mal à les rapprocher de limites humaines ! Mais cela demande du travail, c’est de l’évolution…
Irrésistible est une série imaginée par Clémence Madeleine-Perdrillat. Est-ce important pour vous de travailler avec des femmes ?
Camélia Jordana. Je me suis récemment rendu compte que, sans que ce soit un choix, j’avais travaillé avec autant de femmes que d’hommes depuis le début de mon travail en tant que comédienne. Ce qui montre qu’il y a des scénaristes, des réalisatrices, qu’elles ont toujours été là, peut-être qu’on leur donne un tout petit peu plus de place, même si vraiment, on peut leur en donner beaucoup plus. Maintenant, évidemment, ce qui m’a séduite, comme je le disais, dans cette série, c’est le regard féminin et féministe de Clémence. Le fait qu’elle raconte les premiers jours et les premières nuits d’amour comme elle a choisi de le faire. Pour moi, c’est nouveau et c’est essentiel en fait. Que je le veuille ou non, je pense que j’ai tellement intériorisé mes lectures, mes écoutes et mes visionnages à ce sujet, que, forcément, ça fait partie de moi. En fait, la manière que j’ai de lire un scénario aujourd’hui ne peut plus faire abstraction de ce que j’ai intégré.
On peut toutes se retrouver dans le personnage d’Adèle. De quelles femmes vous êtes-vous inspirée pour entrer dans sa peau ?
Camélia Jordana. Honnêtement, je ne sais pas. En fait, je n’ai pas l’impression de m’être inspirée de qui que ce soit. J’ai surtout essayé d’être la plus juste possible dans la liberté que j’ai lue en Adèle, et c’est justement cette liberté qui m’a émue en premier chez elle. Le fait qu’elle s’écoute, qu’elle écoute son intuition, qu’elle soit empêchée, mais qu’elle ait du désir, qu’elle ait envie d’écouter son désir… J’ai l’impression que, quand Adèle entre dans une pièce, c’est une tornade, on la voit, on la sent, elle a un look, une identité, elle a une manière de s’adresser aux gens, elle est directe, elle est frontale, elle y va… Elle écoute son désir, et en ça, je pourrais dire que plein de femmes autour de moi m’inspirent. Mais je n’ai pas pensé à une femme en particulier, si ce n’est l’image d’une femme moderne en 2023. Je pense, en effet, que l’on peut toutes se reconnaitre en elle, et qu’elle donne de la force aussi aux femmes, elle encourage.
Dans la série, Adèle est productrice de podcasts. Est-ce un format que vous consommez, que vous écoutez ?
Camélia Jordana. Oui, j’adore les podcasts. C’est un format qui m’intéresse beaucoup, donc j’essaye d’en écouter le plus possible avec le temps qui m’est imparti. Mais oui, je suis une grosse grosse auditrice de podcasts. Les Couilles sur la table étant le premier qui m’a vraiment initiée en tant qu’auditrice à ce format, de Victoire Tuaillon, la queen. Il y a aussi La Poudre de Lauren Bastide, Kiff ta race, qui est un podcast très très important, de Rokhaya Diallo et Grace Ly, et encore d’autres évidemment.
Irrésistible est votre première série, et votre filmographie s’allonge. Mais il y a aussi la musique. Aujourd’hui, quelle est votre priorité ? Comment arrivez-vous à équilibrer les deux ?
Camélia Jordana. Ma priorité, c’est de m’écouter ! Quand il y a un projet qui prend le dessus, c’est simplement parce qu’il doit prendre le dessus, donc j’essaye simplement de faire en sorte de me respecter dans tout ça, et donc justement de faire attention à ma santé physique et mentale, ce qui n’était pas le cas pendant de longues années. Donc j’essaye d’être à l’écoute de mon corps, de mon esprit, de mes émotions et de me dire que, quand c’est trop, il faut vraiment que j’apprenne à faire de la place pour moi et pour me reposer. Mais cela m’a pris énormément de temps avant de connaître mes limites, car quand on commence jeune, on se dit qu’on a tellement de chance. On se dit qu’on a tellement de chance que les gens posent le regard sur nous, qu’ils nous accordent une chance pour pouvoir vivre son rêve, donc c’est difficile de dire non, ne serait-ce qu’à une certaine forme d’emploi du temps ou ce genre de choses. Aujourd’hui, pour moi, il n’y a pas vraiment de priorité entre la musique, le cinéma, l’écriture, la compo, le studio, le théâtre… J’ai, depuis petite, toujours voulu performer, sur scène. J’ai toujours voulu être dans un monde dans lequel on invente des choses, on fait croire des histoires, on raconte, on témoigne… Le monde dans lequel je vis fait que j’ai de plus en plus de choses à raconter, et c’est formidable. Donc, non, il n’y a pas de priorité. La question principale finalement, c’est comment est-ce qu’on fait tout rentrer [Rires] ?
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