Pour être complète, la révolution féministe ne doit pas avoir lieu uniquement sur les écrans, mais aussi devant et derrière la caméra. Cette ambition est devenue réalité sur le plateau de la réalisatrice canadienne Sarah Polley, à qui l’on doit le film Women Talking, dont la sortie sur les écrans est prévue ce mercredi 8 mars.
Une industrie moins misogyne
Actrice à la carrière prolifique et réalisatrice de quatre long-métrages, Sarah Polley n’avait pas dirigé de films depuis 10 ans. Avec Women Talking, la cinéaste de 44 ans marque son retour derrière la caméra, pour réaliser cette œuvre adaptée du roman Ce qu’elles disent de l’écrivaine canadienne Miriam Toews. Comme le livre, le film suit un groupe de femmes vivant dans une communauté religieuse isolée, luttant pour décider de leur destin après avoir été victime de violences sexistes et sexuelles.
Dans les colonnes du Monde, la réalisatrice a confié qu’en dix ans, l’industrie a connu de profondes mutations :
« En tant que femme cinéaste, je n’ai plus l’impression d’avoir à prouver constamment ma compétence ou ma légitimité. Il y a beaucoup moins de misogynie et, quand il y en a, les gens le remarquent et vous soutiennent. Des comportements qui ne suscitaient hier qu’un haussement d’épaules sont devenus inacceptables. »
Un tournages féministe
Pour mettre en place ce qu’elle nomme un tournage « féministe », Sarah Polley n’a rien laissé au hasard, des personnes employées sur le plateau à la gestion des heures de travail en passant par une écriture collective du scénario.
La réalisatrice a ainsi révélé au Monde qu’une psychologue était disponible à tout moment pour les acteurs et techniciens présents sur le tournage d’un film traitant de sujets difficiles et traumatisants, à commencer par les violences sexistes et sexuelles. Les temps de travail faisaient également l’objet d’une vigilance particulière, comme l’a expliqué Sarah Polley :
« Nous nous sommes engagés à ce que tout le monde, chaque soir, puisse être rentré chez lui à l’heure du dîner, ce qui est révolutionnaire en Amérique du Nord, où la durée des journées de travail oscille généralement entre treize et quinze heures. »
Une écriture de scénario collective
De plus, le scénario n’était pas figé dans le marbre mais ouvert aux témoignages et aux suggestions des membres de l’équipe, comme en témoigne cette anecdote de la réalisatrice. À propos d’une scène clé du film dans laquelle une mère demande pardon à sa fille pour ne pas avoir su la protéger de la violence des hommes, la cinéaste raconte :
« Un des membres de l’équipe a grandi dans un groupe très traditionaliste et a subi beaucoup d’abus sans jamais recevoir d’excuses de ses parents, dit-elle. Nous avons travaillé sur ce passage avec lui, nous lui avons demandé ce que lui aurait aimé entendre. Ces moments ont été les plus précieux du tournage. »
Women Talking est nommé dans deux catégories aux Oscars : celle du meilleur film et du meilleur scénario adapté. Rendez-vous en salles dès le 8 mars pour découvrir le film sur grand écran, et le 12 mars pour suivre la cérémonie qui se déroulera à Los Angeles.
Les Commentaires