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Cinéma

Bye Bye Blondie, le film de Virginie Despentes

Il y a quelques semaines, l’adaptation cinématographique de Bye Bye Blondie est sortie dans nos salles obscures. Revue du film.

J’étais ravie d’apprendre que le roman de Virginie Despentes, Bye Bye Blondie, allait être adapté au cinéma, mais c’est avec beaucoup d’appréhension que j’imaginais le résultat. Bye Bye Blondie est de loin le livre de Despentes que j’ai préféré. Cette histoire d’amour douloureuse entre Gloria, princesse trash, et Eric, bourgeois sarcastique, avec en fond sonore du bon vieux punk-rock qui tache, est magnifiquement narrée dans le livre. Ces deux inadaptés survivent tant bien que mal face à des parents incompréhensifs et dépassés, à une société rétrograde qui les pousse à se réfugier dans les bras des Bérus et autres Souris Déglinguée. Gloria et Eric connaissent l’amour des fous et des jeunes, celui qui finit par franchir les limites.

Alors qu’ils avaient choisi de fuir ensemble, seul moyen pour une prolo et un aristo de vivre libres, un contrôle de police est responsable de leur séparation. Des années plus tard, Eric est un riche présentateur de télé, Gloria une RMIste toujours aussi énervée. Leurs retrouvailles feront resurgir toute la violence de leurs sentiments jusqu’au point de non-retour.

J’avoue, la bande-annonce m’a fait très, très peur. Je ne supporte pas que mes romans fétiches soient mal portés à l’écran ou que l’histoire ne soit pas absolument fidèle. L’inattendu coming-out d’Eric se retrouvant dans la peau d’Emmanuelle Béart fut à deux doigts de me filer un ulcère. Je suis quand même allée le voir au cinéma. Et là, miracle : ce film est cool.

Le remix lesbien est tout sauf vaseux contrairement à mes craintes. En fait, on n’y pense même pas, tellement cela ne porte aucunement atteinte à l’histoire. C’est d’ailleurs bien dommage que ce ne soit pas le cas de tous ces journalistes et présentateurs auxquels a été confrontée Virgines Despentes, leur principale interrogation consistant dans les grandes lignes à : « Mais vous avez pris les deux actrices les plus bandantes du cinéma français, et on les voit MÊME pas toutes nues ! » Subtilité, je crie ton nom.

Avec ce film, Despentes réussit à chambouler les règles de la comédie romantique tout en restant dans les rails d’une oeuvre qui se veut grand public. Bye Bye Blondie est également un ovni bienvenu en terme d’homosexualité portée à l’écran. Les films comportant des personnages lesbiens se font de plus en plus rares et appartiennent généralement au registre tragique. Le souhait de Despentes était de réaliser une comédie où deux femmes vivent leur amour le plus naturellement possible.

Pour la réalisation de ce conte « Goudou Punk », Virgine Despentes a choisi deux icônes hétérosexuelles des années 90. Amie avec Béatrice Dalle (qui a suggéré l’adaptation homosexuelle), clairement identifiable dans le rôle de « Madame Punk Rock », et grande admiratrice d’Emmanuelle Béart, elle souhaitait les voir réunies à l’écran. La confrontation des deux actrices est un pari réussi tant leurs échanges témoignent d’une osmose électrique et sincère, du début à la fin. Notons d’ailleurs la très belle répartie de Despentes sur France Inter lorsqu’on lui demande comment les actrices principales ont fait pour embrasser une fille : « C’est marrant (…) parce qu’on les a vues l’une comme l’autre embrasser des mecs super improbables et on s’est jamais demandé si c’était difficile ou pas ».

Je n’ai pas trouvé beaucoup d’intérêt à la présence du mari de Frances, joué par Pascal Greggory. Son personnage d’écrivain tourmenté peine à ajouter la touche comique à laquelle il aspire. Et j’ai trouvé assez étrange, voire malsaine, l’idée de faire intervenir un (très) jeune homme pour incarner son compagnon. Dans ma tête le parallèle entre « amour pur de nanas » et « amour à la greco-romaine entre un riche intellectuel et un playboy lycéen » s’est fait rapidement et ne m’a pas trop plu. Cet écrivain apporte aussi un côté « too much cinéma français » à Bye Bye Blondie, ce qui est bien regrettable.

Les jeunes Gloria et Frances sont aussi, et surtout,des enfants du punk. La chanteuse Soko, qui joue Gloria adolescente, est d’ailleurs hallucinante dans son rôle de petite bombe à retardement. Elle incarne aussi à la perfection la tristesse d’une gamine incomprise qui voulait juste écouter Motörhead tranquillement. Les scènes à l’hôpital psychiatrique sont les plus réussies selon moi en termes d’émotion et de réalisme. Le montage du film est un peu déroutant, avec ce défilé de flash-backs, mais chacune de ces scènes transpire l’énergie punk et la rage de vivre. Personnellement, en sortant du ciné, j’avais une envie folle de boire des Heineken en beuglant sur du Parabellum.

Et un film qui donne envie de boire de la bière ne peut être foncièrement mauvais. Non, sérieusement, Bye Bye Blondie met en images ce qui est l’essence même du livre en illustrant le « propos no future ». Si Frances, à 40 ans, a besoin de revoir Gloria, l’amour de ses 16 ans, ce n’est pas pour s’affranchir de sa sexualité. C’est parce qu’elle s’ennuie dans sa vie d’adulte et que son univers matérialiste et artificiel l’insupporte. Elle a joué le jeu, maintenant elle en a marre.

Souhaitons à toutes celles et tous ceux qui connaissent ce sentiment de trouver une Gloria.


Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.

Les Commentaires

8
Avatar de SallyVonHolle
13 avril 2012 à 13h04
SallyVonHolle
Ton ressentiment est clairement compréhensible. C'est un peu pour cette raison que j'accroche moyen aux bouquins dans le genre "l'Accro au shopping a perdu son tampax" ou "Comment se faire épouser par un trader"


Hahahaha mais teeeellllement ! (bon ok ça veut pas dire que j'en lis pas certains pour me vider la tronche, mais certains sont vraiment ras les pâquerettes...)
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