Si vous passiez trop de temps sur des comptes YouTube et Instagram d’art de vivre dans les années 2010, vous connaissez sûrement les marques états-uniennes Forever 21 et surtout Brandy Melville. Alors qu’on connaît bien en Europe H&M, Zara (deux marques en pleine voie de premiumisation comme Mango), boohoo (toujours plus low cost) et commence à diaboliser de plus en plus SHEIN et Temu, HBO sort un documentaire alarmant sur Brandy Melville, marque encore très populaire aux États-Unis aujourd’hui.
Brandy Hellville & The Cult of Fast Fashion, le documentaire choc sur Brandy Melville
Les clés de son succès d’hier sont les mêmes qu’aujourd’hui : une esthétique d’éternelle adolescence insouciante au soleil s’incarnant dans des vêtements toujours plus rikikis, à la « taille unique » qui ne correspond qu’aux morphologies les plus fines. Une façon d’exclure toute clientèle faisant plus qu’une taille S-M tout en feignant d’être inclusif.
Si bien qu’être assez mince afin de pouvoir s’habiller en Brandy Melville tient presque d’outil de distinction physique et sociale, des années 2010 à aujourd’hui. Cette esthétisation de la minceur s’illustre avec viralité sur TikTok, Tumblr, et Instagram, comme le présente un nouveau documentaire, Brandy Hellville and the Cult of Fast Fashion.
Brandy Melville : fast fashion, discrimination physique à l’embauche et climat de pédocriminalité
Présentée début avril 2024 lors du festival South by Southwes (« SXSW » pour les intimes) ainsi que sur HBO, l’œuvre montre le pire des pratiques de production et d’incitation à la surconsommation qui caractérise la fast fashion (grâce notamment à des ateliers clandestins de Prato en Italie). Mais aussi des allégations de discriminations et d’agressions sexuelles de la part de dirigeants de l’entreprise. Le tout dans un climat de pédocriminalité à peine masqué.
Eva Orner, la réalisatrice de ce documentaire édifiant sur Brandy Melville, a enquêté avec la journaliste Kate Taylor pour présenter aussi combien le modèle économique et même administratif de la marque s’avère opaque. L’entreprise a un PDG plus que discret médiatiquement : l’Italien Stephan Marsan qui n’a jamais accordé d’interview concernant la marque. Chaque magasin appartient à une société écran différente, reliée à un compte en suisse, histoire d’être le moins traçable possible.
Blagues racistes, agressions sexuelles et affaires florissantes chez Brandy Melville
À l’instar de politiques d’entreprises racistes dénoncées du côté d’Abercrombie & Fitch, Brandy Melville avait un style physique d’employées à recruter : les plus jeunes, minces, et blanches possibles, à la rigueur asiatiques, et le moins de noires possibles, résume une source anonyme dans le documentaire. Le PDG aurait même fait installer un bouton sous une caisse de la boutique phare de New York à appuyer en cas de cliente assez « jeune et jolie » pour travailler pour la marque. Outre des blagues célébrant Hitler et autres plaisanteries négrophobes, le documentaire évoque même des agressions sexuelles présumées dans le cadre de l’entreprise.
Sauf qu’à la différence d’Abercrombie & Fitch qui s’est publiquement excusé et a changé ses politiques d’embauche, en plus de vouloir transformer son image pour la rendre plus inclusive, Brandy Melville persiste et signe par son silence. Comme le relève le Guardian, la marque déjà épinglée plusieurs fois sur ses pratiques discriminatoires continue de prospérer par l’exclusion. Ses ventes annuelles ont dépassé les 212 millions de dollars en 2023, contre 169,6 millions de dollars en 2019, selon le Wall Street Journal. Les affaires sont les affaires.
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