Avez-vous déjà regretté l’une de vos décisions ? Avez-vous déjà pensé que vous veniez de faire une jolie bêtise, ou de choisir un mauvais chemin, et que ne l’auriez pas conseillé à votre pire ennemi ? Pourquoi sommes-nous capables de donner de bons conseils à nos ami-e-s, sans parvenir à les suivre nous-mêmes ?
Eh bien, on touche à quelque chose : selon une recherche menée par Igor Grossmann et Ethan Kross, et publiée dans le magazine Psychological Science, nous serions nos plus mauvais conseillers. Et pour prendre de « meilleures » décisions, nous devrions sortir de nos petites pompes, faire semblant de décider pour quelqu’un d’autre.
Je suis pas top niveau conseils. Puis-je te proposer un commentaire sarcastique ?
Prendre des décisions plus raisonnées pour autrui
Dans une première expérience, Grossman et son équipe ont interrogé une centaine de personnes, toutes impliquées dans une relation amoureuse longue. À certaines d’entre eux, les scientifiques ont demandé d’imaginer que leur partenaire les avait trompées. À d’autres, les scientifiques demandent d’imaginer que c’est leur meilleur-e ami-e qui a été trompé-e.
Ensuite, les choses sérieuses commencent : tou-te-s les volontaires doivent expliquer ce qu’ils devraient faire, ou ce que leur meilleur-e ami-e devrait faire face à cette situation.
À la suite de cette première étape, les volontaires répondent à un questionnaire mesurant leurs compétences de « raisonnement » (leur capacité à rechercher un compromis, à envisager différentes solutions…). Avec tous ces éléments, les chercheurs-es constatent que ceux qui pensent à ce que leurs potes devraient faire auraient tendance à répondre avec plus de sagesse et de raison que ceux qui pensent à leur propre situation…
Finalement, lorsque nous prenons des décisions pour nous-mêmes, nous pourrions bien avoir des difficultés à réfléchir objectivement et laisser nos émotions nous envahir ?
Faire semblant d’être quelqu’un d’autre pour prendre de meilleures décisions
Dans leur première recherche, Grossmann et Kross se sont aperçus que
nous prenions de « meilleures » décisions pour les autres que pour nous-mêmes. Existe-t-il un moyen d’utiliser cela pour améliorer nos décisions ? Puisque l’on est capable de « raisonner » pour nos copains et copines, peut-on parvenir à transposer cette sagesse pour notre propre vie ?
Les scientifiques ont imaginé une seconde expérience pour répondre à cette interrogation. Cette fois, les psychologues demandent à des volontaires de répondre à une seule question : « Vous (ou votre meilleur-e ami-e) venez d’être trompé-e. Que faites-vous ? », puis les ont réparti-e-s en deux groupes.
- Au premier groupe, ils demandent de répondre à la question en utilisant la première personne, en disant « je ».
- Au second groupe, ils demandent de répondre en utilisant la troisième personne, en disant « il/elle devrait faire ceci, ressentir cela ».
Autrement dit, 4 situations sont possibles :
- Certaines personnes peuvent penser à une situation où elles ont été trompées et répondre à la première personne
- D’autres peuvent imaginer une situation où elles ont été trompées et répondre à la troisième personne
- D’autres encore peuvent se représenter une situation où leur meilleur ami a été trompé et répondre à la première personne
- Et enfin, d’autres imaginent une situation où leur meilleur ami a été trompé et répondre à la troisième personne.
Une nouvelle fois, les personnes qui se sont représenté la scène du point de vue de quelqu’un d’autre (en répondant à la troisième personne) semblent montrer de meilleurs jugements, de meilleurs raisonnements, et prendraient de meilleures décisions que les autres.
En répondant à la troisième personne, les participants ont réfléchi, pensé à différents moyens de réagir, imaginé plusieurs conséquences, même lorsqu’ils pensent à ce qu’ils feraient eux-mêmes dans la situation. La seule utilisation de la troisième personne pourrait nous aider à prendre du recul et nous permettre d’aller vers de meilleures décisions !
La troisième personne permet de nous éloigner psychologiquement de nos problèmes et de nos émotions : du coup, nous sommes plus libres et plus capables de raisonner.
Ça va plus du tout Bukowski hein.
Finalement, pour prendre nos prochaines décisions, nous ferions bien d’imaginer ce que nous conseillerions à nos ami-e-s ! Ces expériences interrogent aussi sur le rôle de la « raison » dans nos décisions : pensez-vous qu’il est essentiel de prendre des décisions réfléchies, raisonnées ? Ou êtes-vous plutôt du côté de vos tripes et de votre cœur ? Nos émotions sont-elles de si mauvaises conseillères ?
Pour aller plus loin…
- Deux articles de Psychological Science ici et là
- Un article de New York Magazine
Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.
Les Commentaires
Maintenant une question : c'est quoi une bonne décision ?
Est ce que se tromper c'est une mauvaise décision ?