Un de mes gros, gros coups de cœur pour le Venezuela, ça a tout de suite été les gens. Et voici pourquoi.
Les Vénézuéliens sont joyeux
Eux-mêmes (en tout cas les Caraqueños, habitants de Caracas) disent qu’ici tout le monde est de mauvaise humeur à cause des embouteillages, de la situation économique…
« Dans cette ville, c’est inévitable d’être de mauvaise humeur… » « Jusqu’à ce que d’un coup quelque chose illumine ta journée » « Pour ensuite retourner à la mauvaise humeur »
Mais je peux vous assurer qu’en venant de Paris ça fait un grand bol de bonne humeur ! Oui on voit parfois des gens s’indigner, s’engueuler, crier (avoir des émotions quoi), mais jamais je ne vois de gens râler, se plaindre, souffler… Au contraire je les trouve plutôt patients et tolérants ! Pour que quelqu’un s’énerve parce que son plat met du temps à arriver dans un restaurant, il faut vraaaaiment attendre une bonne heure ! Et les transports, grand sujet de coup de gueule en France, ne génèrent pas autant de réactions : une fois le bus avait énormément de retard à cause des embouteillages, et quand il est finalement arrivé, je n’ai entendu personne s’énerver sur le chauffeur, au contraire, un homme a plaisanté : « Bon alors, pour s’excuser du retard, on le fait à la mode socialiste bolivarienne hein, on paie pas ? » et en effet, on n’a pas payé notre ticket.
Je prends vraiment plaisir à parler avec les gens, qui sont toujours prêts à répondre, à discuter, que ce soit au bureau ou en soirée ; j’ai l’impression de les voir souvent plein de joie de vivre, positifs, à plaisanter et avec l’envie de s’amuser et d’en profiter. D’ailleurs je suis tombée l’autre jour sur un rapport intéressant, le World Happiness Report, et les chiffres présentés sont tout à fait surprenants ! Par exemple, ce rapport a fait un classement des moyennes mondiales des « émotions positives et négatives » ressenties par les habitants. Dans les émotions positives, on a le bonheur, le rire et le plaisir ; et dans les émotions négatives, on a l’inquiétude, la tristesse, la déprime et la colère. La question était posée sous la forme « Hier, avez-vous fortement ressenti l’émotion suivante ? ».
Eh bien pour les émotions positives, le Venezuela arrive en 14ème position mondiale! Pour info, la France est 52ème… et si vous voulez vraiment vous fendre la poire, allez en Islande, top 1 du classement. Pour le classement des émotions négatives, cette fois en commençant par le score le plus faible vers le plus élevé de « négative attitude » (ça va, vous suivez ?), le Venezuela est 31ème, et la France est 61ème ! Et enfin, dans le classement de la moyenne nette de ces émotions, le Venezuela est 13ème, et la France (derrière le Salvador, le Niger, le Koweit entre autres) arrive en 61ème position… Il faut croire qu’« hier » n’était pas un bon jour pour l’Hexagone. Dernier exemple : dans le classement mondial du « bonheur moyen », le Venezuela est 37ème et la France 56ème.
Donc finalement, malgré tous les problèmes du quotidien, la situation économique, l’insécurité, la pauvreté, la tension politique… les Vénézuélien-ne-s se disent heureu-x-ses. Alors, vraie insouciance et joie de vivre, ou un certain déni de la réalité ?
Les Vénézuéliens sont drôles
L’humour est une manière de vivre et de voir les choses ici. Tout est potentiellement un sujet de blague. C’est sûrement lié à la mentalité particulièrement joyeuse des Vénézuélien-ne-s, mais je vois ça aussi comme une manière de s’affranchir d’un quotidien pas toujours facile, de se changer les idées et de positiver pour finalement dépasser cette adversité.
Ce trou dans la chaussée de l’avenue principale de Los Ruices est là depuis 2 ans sans avoir été réparé. On finit par en rire, le détourner, et même lui créer sa page Facebook !
Ainsi, tout est prétexte à rire, à tourner en dérision, quel que soit le sujet, et surtout les plus sérieux ! Les thèmes favoris sont donc la vie politique que j’ai évoquée précédemment, ainsi que la situation économique, qui génèrent constamment des blagues, caricatures, parodies, images sur Facebook et Twitter, avec pas mal d’humour noir et de cynisme.
Le sexe est aussi un sujet important (mais peut-être de manière universelle finalement), particulièrement les double-sens que l’on on guette pour rebondir. Un peu l’équivalent du « That’s what she said… ». Et ce que j’adore aussi, c’est qu’ils aiment beaucoup raconter des histoires, y mettre le ton, faire durer le suspense, mimer, en rajouter… On ne s’ennuie jamais et avec certains, ça peut tourner au vrai one-man show !
Les Vénézuéliens sont chaleureux
Ça surprend au début, parce que j’avais gardé l’attitude parisienne du « on ne parle pas à son voisin dans les transports, on évite de sourire au vent, on râle quand le métro a deux minutes de retard… ». Mais je me suis vite laissée emporter par la vague d’humanité qu’on ressent ici.
Déjà, les gens se PARLENT, même s’ils ne se connaissent pas ; dans les files d’attente, avec ses voisins, on raconte sa vie, on échange les dernières actus, on parle du temps qu’il fait évidemment… Il y a toujours des conversations qui se forment un peu partout. Ici, on se fait des « amis du bus », les personnes qu’on voit tous les matins à la même heure à l’arrêt de bus, et avec qui on parle un peu chaque jour. Par exemple, l’autre jour je croise un voisin que je n’avais encore jamais vu, et directement en me voyant il me dit « Bonjour, comment ça va? Ah, tu n’as pas dû aller à la plage, je te trouve pas trop bronzée… Tu sais quoi d’ailleurs l’autre jour, j’ai voulu aller à la plage, mais l’autoroute était bondée ! », comme si on s’était toujours connu et raconté nos vies!
En effet, ici on partage beaucoup, et les gens s’intéressent vraiment les uns aux autres, que ce soit la femme de ménage ou un grand patron ! Autre exemple : l’autre jour au travail, je salue un monsieur en attendant de passer en réunion, il s’aperçoit que je suis française et du coup me pose des questions, me demande comment j’en suis arrivée là, comment se passe ma vie ici, me raconte quelques expériences personnelles, puis on entre ; et à la fin de la réunion il me fait la bise, et me dit « Enchanté, et si tu as besoin de quoi que ce soit ici, tu m’appelles, prends soin de toi ! »… Et j’ai appris ensuite qu’il s’agissait du président du plus grand groupe de cinémas du pays !
De plus, les Vénézuélien-ne-s sont assez tocones
, c’est-à-dire que la communication passe aussi par le contact physique. Ça va se sentir dans la manière de se dire bonjour, une bise et on se serre dans les bras (si on connaît suffisamment la personne bien sûr), ou dans une conversation, par une main sur l’épaule quand on te demande comment ça va, ou encore une tape sur le bras en disant « Et devine quoi ? »… Bref, plein de petits contacts inconscients pour eux mais qu’on remarque beaucoup si on n’est pas habitué !
Autre marque d’affection : les surnoms. Dans chaque groupe d’amis, quasiment tout le monde aura un surnom, tiré d’une caractéristique physique, d’un trait de personnalité ou d’une anecdote de leur vie ; certains pourraient paraître un peu limite, mais au contraire ils sont vraiment utilisés dans un sens très affectueux ; les plus courants étant « el gordo » (le gros), « el negro » (le noir) (même si la personne n’est qu’un peu enveloppée ou vaguement basanée), mais aussi « el indio » (l’indien, pour celui qui a nom d’origine indigène), « el portu » (pour celui d’origine portugaise), « cooky », (pour celui qui aime cuisiner)…
Les surnoms sont aussi utilisés dans la vie de tous les jours, par exemple avec le personnel des magasins, restaurants etc. : très souvent, les filles entendront « mi amor/mi vida/mi cielo » (mon amour/ma vie/mon ciel) (ah oui ici on tutoie assez souvent), quel que soit le sexe ou l’âge de la personne qui s’adresse à elles … Une fois, une caissière du supermarché d’à peine 18 ans m’a indiqué la somme que je devais comme ça : « 500, mi amor »… Ça fait très bizarre au début ! Les hommes auront droit à « doctor » (docteur) comme marque de respect, « amigo », et caetera. De la même manière, on peut se permettre d’interpeller un serveur par un « amigo », ou « viejo » entre autres.
Et cette affection, ce « cariño » passera aussi par les diminutifs en –ito ou –ita : « dame una aguita por favor » (donne moi une « petite eau » s’il te plaît), ou « un momentito » (un « petit instant »), ou « permisito » au lieu de « permiso » (le « pardon », pour demander à passer) et même le déjà tout petit « chao ! » (ciao), deviendra « chaito ».
Alors, et si on commençait à prendre exemple sur le Venezuela ? Bueno amiguitas, chaito, y cuidense !
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Les Commentaires
Dans ces cas la je préfère qu' on ne me parle pas.