Oyez oyez brave gens, aujourd’hui je me travestis en Ménestrel pour vous conter la fantasmagorique histoire de Blancanieves ! Alors faites silence, ce film est muet, et changez votre perception des couleurs, ici elles n’existent plus.
Notre réalisateur espagnol, Pablo Berger, n’a pas su faire un choix : il voulait un conte, il voulait un opéra… Ces artistes sont parfois si indécis. Alors au diable les choix ! Vive la polygamie cinématographique, il nous a savamment allié les deux !
Prenez une racine de Blanche-Neige, des feuilles de Carmen, et saupoudrez le tout de l’imaginaire de Pablo Berger et vous obtenez la fabuleuse potion qu’est Blancanieves. Une princesse, des nains, des torero, ne mentez pas, je vous sens déjà frémir d’exaltation.
http://youtu.be/UAseMYa0IRQ
Carmen est belle, elle est raffinée, elle porte des tenues faites de perles et de broderies qui en éblouissent plus d’un-e… Bref, Carmen est une princesse, c’est indéniable. Elle a tout le pack : une enfance pourrie, persécutée par une marâtre aussi mauvaise que fascinante, des compagnons venus tout droit de la basse-cour, d’autres dignes d’être photographiés par Diane Arbus, et une volonté d’acier !
Parce que même si on la persécute, la Carmen, même si c’est vrai que pour l’instant, le bilan de sa vie peut mener à se laisser embrocher par le taureau… Eh bien elle est heureuse notre Carmen, elle sourit à la vie, court dans les prés, ramasse des pâquerettes, se fait troncher dans les bois (mais ceci est une autre histoire).
Carmen a des cojones ! Elle est là, dans la place, elle croque la vie, elle jouit de la vie et quoi qu’il arrive, elle persévère. Dès l’enfance, elle est agile, elle est habile, elle se faufile !
Version badass de Blanche-Neige, avec physique androgyne, cheveux courts, pantalon culotte et métier de bonhomme, Carmen fascine. Une gueule d’ange et des muscles de taureau, taureaux qu’elle fait d’ailleurs agilement danser dans l’arène, elle bouge son boule avec grâce la Carmen ! Suivant les traces de son père, Carmen aspire à devenir elle-même torero.
Donc, nous l’avons compris, Carmen ne se laisse pas faire, et quand la vie devient trop dure avec elle, elle se fait la malle (à défaut de se faire le mâle). Oui Madame, elle prend ses cliques et ses claques et elle se tire !
Pour trouver l’amour, me direz-vous ! Foutaises : Carmen est moderne, l’amour elle s’en tamponne, elle le met en boule, et le fourre dans le cucul du taureau, au diable l’amour, et vive l’amitié. Elle se trouve alors des p’tits potes au physique atypique, parce que Carmen c’est d’la bebom, et les canons de beauté elle s’en bat les steaks.
L’aventure peut alors débuter : une princesse déchue prête à se donner en spectacle + des roulottes pleines de nains + une grognasse de marâtre : bienvenue dans l’univers de Blancanieves.
La belle et la grognasse
Mais alors que vaut un film basé sur un conte si la méchante sorcière ne pointe pas son nez ? RIEN, nada
! Vous-même vous savez. S’il y a la belle, il y a la bitch, indubitablement.
Mais attention, nous sommes ici, loin du cliché de la méchante bonne femme parée d’une verrue velue sur le nez, au menton pointu et dents pourries. Ici, la vilaine est encore plus bonne que la plus bonne de tes copines ! Son arrivée transcende l’écran : que peut donc bien faire cette pauvre Carmen face à une femme si charismatique, tellement envoûtante et machiavélique jusqu’au bout des ongles fraîchement manucurés ?
Vous l’aurez compris, la méchante a de la gueule, et ça c’est génial. Parce que tout comme Carmen, on ne peut pas l’encadrer. Encarna subjugue autant qu’elle répugne. Marquise de la sodomie, Comtesse du sadomasochisme, Encarna tient tout son petit monde au bout d’une laisse qu’elle veut étroite et castratrice : la culotte, c’est définitivement elle qui la porte.
Et le Prince Charmant dans tout ça ?
C’est la qu’opère toute la magie de Blancanieves : marre des Princes Charmants, ces mecs soi-disant chevaleresques, au brushing impeccable, au vocabulaire parfait et au sourire ravageur. Ici, pas de minet sur son fidèle destrier : si Carmen veut se faire prendre par monsieur trouver le grand amour, il va falloir pousser un peu plus loin que le bout de son nez !
Et croyez-moi, vous n’êtes pas au bout de vos surprises. Je n’en dirai pas plus, mais le Prince Charmant vous fera tomber des nues.
Blancanieves, un énième conte de fée ?
J’entends déjà les blasé-e-s du conte de fée cracher leur venin sur ma princesse. Je vous arrête tout de suite ! Comme Perle de Lait, Blancanieves ce n’est pas juste du yaourt, c’est beaucoup plus que ça.
Alors toi, jeune érudit-e, ou toi, amateur d’art et de belles choses, ou toi là qui au final n’a rien de mieux à faire, prends donc ma main et laisse-toi aller à l’orgasme cinématographique. Rien que ça.
Non, je ne suis pas un charlatan vous vendant je ne sais quel produit miracle. Je vous vends la magie sur grand écran, la magie de l’image qui s’enchaîne jusqu’à une superbe chorégraphie aux rythmes flamenco. Une danse ininterrompue, cernée de personnages hauts « en couleurs », faite de spectacles, de caravaniers, de brocarts, sur les routes, comme dans l’arène.
Dans les moments les plus tendres de Blanche-Neige, comme dans les moments les plus poignants de Carmen, Blancanieves rempli son contrat. Je le confesse, de toute façon vous m’avez déjà percée à jour, je suis tombée amoureuse. Et mon prince est tout aussi abracadabrant que celui de Carmen !
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Les filles qui l'ont vu : @Meluzine973 @adine @Élou @littlerudy @Johann Gambolputty.
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