La house n’est jamais morte, vive la house. C’est ce qu’on pourrait se dire en écoutant de nouveaux titres populaires, comme le single Used To Know Me de l’artiste fer de lance de l’hyperpop Charli XCX (issu de son dernier effort, Crash, sorti le 18 mars 2022).
Ou encore le nouvel opus du rappeur canadien au cœur tendre Drake Honestly, Nevermind (sorti par surprise le 17 juin).
Mais surtout BREAK MY SOUL de Beyoncé (premier single paru le 21 juin issu de son album Renaissance prévu pour le 29 juillet prochain).
Ces trois artistes ont ainsi investi des sonorités house, signe d’un regain d’intérêt pour ce genre musical. Mais c’est quoi au fait ?
Qu’est-ce que la house music, genre musical en plein retour de hype ?
La house music prend racine au début des années 1980 à Chicago et dérive du disco si populaire dans les années 1970, mais aussi du jazz, du funk et du gospel. Elle doit son nom au club Warehouse, principalement fréquenté par les communautés gay, afro-américaine et hispanique. Là, officiait notamment le DJ Frankie Knuckles qui en est le précurseur. Il compte en effet parmi les premières personnes à ne pas se contenter d’enchaîner les disques les uns après les autres, mais à aussi les mixer ensemble, et donc à y intégrer notamment des voix samplées. C’est comme ça qu’on commence à parler de house music qui se caractérise par un rythme minimal, une ligne de basse proche du funk, et des voix samplées ou non dignes d’une messe gospel.
Pour mieux vous faire une idée de ce qu’est la house, rien de tel que d’écouter un chef d’œuvre absolu en la matière (selon mes oreilles), Show Me Love de Robin Stone. Sorti en 1990, le titre a été repris, remixé, et samplé des dizaines de fois. Et les dernières à s’en inspirer et même à le sampler ne sont autres que Charli XCX avec Used to know me et Beyoncé avec BREAK MY SOUL, justement ! C’est dire combien le genre de la house continue d’inspirer, même près de quarante ans après son émergence.
La récession actuelle, dancefloor parfait pour le retour de la house ?
D’ailleurs, d’après de nombreux théoriciens de la musique, les sous-genres musicaux de la house et de la dance auraient la fâcheuse tendance à s’inventer, se renouveler, et/ou à redevenir fortement populaires en période de récessions sociale, économique et politique. C’était le cas par exemple pour la techno de Détroit dans les années 1980, comme l’explique l’association culturelle Leonardo/Olats. La crise financière des subprimes à partir de 2007 a également servi de terreau au succès de la French Touch des Daft Punk, Justice, David Guetta, Bob Sinclar, et autres Martin Solveig pour la fin des années 2000, comme l’expliquait L’Express en 2009.
En contexte pandémique, face à l’urgence climatique, après Trump, et pendant la montée des extrêmes droites en Europe ainsi que la guerre de la Russie contre l’Ukraine, une bonne partie de l’Occident a sûrement envie de danser sa peine. C’est ce que suppose maintenant la BBC face aux nouveaux sons de Drake et Beyoncé. Et plein de personnes sur Twitter s’accordent à le penser avec cet humour doux-amer si propre à la plateforme :
« Les genres musicaux house et dance sont toujours populaires quand la récession s’annonce grosse et sale. C’est comme ça que je sais que ça va être dur et compliqué, mais au moins on aura du bon son. »
« Beyoncé a vu que c’était l’été du burn-out pour les millenials, le mouvement ouvrier, un regain d’intérêt pour les années 1990 et le mois des fiertés LGBTI+, alors elle s’est dit ‘Oui, je peux faire un morceau qui résume tout ça’»
Effectivement, Beyoncé le sait bien puisqu’elle mentionne explicitement ce contexte de crise dans BREAK MY SOUL. Elle chante qu’elle vient de démissionner d’un travail devenu intenable. C’est sûrement un clin d’œil à ce qu’on appelle aux États-Unis la Great Resignation, soit la grande démission, à cause de l’excès de pressions socio-économiques durant la pandémie.
Revaloriser combien les personnes noires comptent dans l’innovation musicale contemporaine
À travers ce premier single qui sample la chanteuse Robin Stone et contribue à remettre au goût du jour un genre musical créé et longtemps dominé par des personnes afro-américaines, Beyoncé participe à rappeler combien les personnes noires comptent dans l’innovation musicale. Que ce soit le blues, le jazz, le rhythm and blues, le rock’n’roll, le zouk, le kompa (qui revient fort à la mode aussi en ce moment, soit dit en passant), ou encore le shatta, la contribution des personnes afro-descendantes à la musique contemporaine s’avère inestimable, et pourtant trop souvent négligée, ignorée, voire invisibilisée.
C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles l’actuel président des États-Unis Joe Biden a déclaré juin 2022 comme le mois d’appréciation de la musique noire à travers un communiqué officiel diffusé par la Maison Blanche le 31 mai 2022 :
« Peut-être qu’aucune musique n’a eu un impact aussi profond et puissant sur la partition musicale américaine que la musique noire. Étroitement tissée dans la tapisserie de notre nation, la musique noire enrichit nos vies et repousse les limites de la créativité. Au fil des décennies et à travers le pays, la musique noire a alimenté une myriade de genres – du rythme et du blues au jazz, au gospel, au country, au rap et plus encore.
[…] Pendant des générations, la musique noire a transmis les espoirs et les luttes d’un peuple résilient – des spirituals pleurant le péché originel de l’esclavage et annonçant plus tard la libération de la servitude, des vérités dures racontées à travers le jazz et les sons de Motown pendant le mouvement des droits civiques, et le hip-hop et du rythme et du blues qui nous rappellent le travail qui nous attend encore. »
Bref, la house music revient en force pour nous faire danser, surtout en ce mois des fiertés pour la communauté LGBTI+ dont elle procède, mais aussi tout l’été. Et plus si affinités.
Je vous laisse, je dois aller danser avec flamboyance en patins à roulettes sur de la house au soleil couchant.
À lire aussi : A$AP Rocky demande Rihanna en mariage dans leur nouveau clip façon Bonnie & Clyde
Crédit photo de Une : Capture d’écran YouTube et Instagram.
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires