J’ai pris pour habitude de plutôt vous présenter des nouveautés dans mes articles, mais aujourd’hui, j’ai décidé de m’autoriser une petite entorse à mon règlement personnel. Je souhaite vous faire découvrir Le trop grand vide d’Alphonse Tabouret, de Sybilline, Capucine et Jérôme d’Aviau, aux éditions Ankama, une de mes bandes dessinées préférées de la vie.
Un matin, un tout petit machin se réveille mais ne se souvient de rien. Il a tout à apprendre de la vie. Il se retrouve face à un grand Monsieur, qui lui révèle que c’est lui qui l’a créé mais aussi nommé Alphonse Tabouret. Puis, lassé du sale caractère de sa créature, ce mystérieux créateur finit par laisser Alphonse en plan, livré à lui-même.
Alphonse commence à se sentir de plus en plus seul. Il est triste de n’avoir personne avec qui parler. Il décide de se lancer à la poursuite du grand Monsieur et croise sur son chemin une palette de bestioles toutes plus farfelues les unes que les autres. Alphonse va ainsi avancer à petits pas dans la vie, surmonter toutes les épreuves qui lui barreront le passage fin de comprendre d’où vient le bonheur.
Une quête initiatique qui dépoussière le genre
Le trop grand vide d’Alphonse Tabouret est une curiosité littéraire difficile à faire rentrer dans une case définie. Roman graphique ? Texte illustré ? Pour enfants ? Mais entre nous quand on en commence la lecture, cela n’a plus vraiment d’importance. On se laisse embarquer dans le petit monde singulier de notre nouvel ami Alphonse.
Le récit prend l’allure d’une quête initiatique dans laquelle un personnage évolue et grandit grâce à sa compréhension progressive de lui-même et du monde qui l’entoure. Mais si cette caractéristique propre aux contes traditionnels peut paraître grandiloquente et surtout poussiéreuse, il n’en est rien ici puisqu’il n’y a pas d’aspect proprement didactique. On se contente de suivre le parcours d’un petit personnage attachant et de constater que, tiens, ça ressemble beaucoup à une quête de soi, et à la nôtre, qui plus est.
Alphonse chemine à travers les méandres de la vie avec une naïveté touchante qui déguise des réflexions profondes sur le sens de la vie aussi essentielles que : de quoi avons-nous besoin pour être heureux ?
Un livre pour les petits comme pour les grands
Si le livre, par cette dimension initiatique, semble de prime abord être adressé à la jeunesse, il chatouille aussi le coeur des adultes par la justesse de ce qu’il raconte.
Les joies et les petits bonheurs d’Alphonse, mais aussi ses angoisses et ses peines, entrent en résonance avec nos sensibilités, nos histoires de vie. La langue a les accents d’une tendresse enfantine (tout en jouant sur les mots avec virtuosité), comme pour asséner avec toute la simplicité du monde les vérités sur la vie.
Ce vide que subit Alphonse, on ne le connaît que trop bien. Qu’il soit amical, affectif, ou plus profondément ancré en soi-même, ce vide est à l’image de nos propres errances, et le livre devient ce petit coup de coude qui permet de repartir de l’avant.
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Un univers graphique très riche
Alphonse est un digne héritier du bonhomme bâton, extrêmement dynamique et expressif. Il parcourt des forêts touffues, des décors où l’on accorde de l’importance aux détails. Des pages très noircies côtoient en toute modestie des pages beaucoup plus épurées. Les illustrations sont parfois en pleine page, d’autres fois dans des cases… et d’autres fois encore inexistantes.
Le livre est d’un graphisme particulièrement étonnant, ce qui correspond à merveille au côté atypique de l’histoire elle-même. Une histoire qui est d’ailleurs constituée uniquement de dialogues, comme dans une pièce de théâtre — le grand théâtre de la vie — ce qui participe à la jovialité débordante de la bande dessinée.
Le Trop Grand Vide d’Alphonse Tabouret est un livre dont on ressort galvanisé•e. Il nous enveloppe dans un cocon douillet de tendresse infinie, de légèreté et de douceur, pour mieux nous rappeler que le bonheur se trouve un peu partout si l’on se donne la peine d’ouvrir les yeux, et qu’il est propre à chacun. Une petite promenade bucolique sur le chemin de la vie aux résonances universelles, et un livre qui fait un bien fou.
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