L’histoire du Norman Bates de Psychose d’Alfred Hitchcock
En 1960 sortait Psychose d’Alfred Hitchcock, adapté du roman de Robert Bloch, père de tous les slashers, un film qui a traumatisé des générations et rendu l’heure de la douche un poil plus stressante que d’ordinaire. À cause de ça, quand j’étais petite, j’emportais toujours une paire de ciseaux avec moi sous la douche, « au cas où », et parfois je laissais le rideau ouvert – et tant pis pour l’inondation.
Dans Psychose, Marion Crane, une jeune employée de bureau, prend la fuite après avoir volé 40 000 $ à l’un des clients de son employeur et se retrouve forcée de passer la nuit dans un petit motel isolé. Le motel est tenu par Norman Bates, un jeune homme doux, gentil et timide, qui apprécie la compagnie de la jeune femme mais qui vit sous la domination de sa mère, qui ne quitte jamais son manoir. Et attention, spoiler des 60’s : Norman n’est pas aussi doux qu’il y paraît et a quelques fusibles grillés qui le poussent à commettre l’irréparable.
Victime de son succès, Psychose a connu suites et remakes, avec ou sans Anthony Perkins dans le rôle de Norman Bates, avec ou sans succès – mais l’original a toujours gardé sa place sur le podium. Et aujourd’hui, il y a Bates Motel. Une série qui nous plonge dans l’enfance de Norman Bates… en 2013. Norman est interprété par Freddie Highmore, le jeune Anglais qu’on a découvert dans le rôle de Charlie dans Charlie et la Chocolaterie de Tim Burton, et sa mère est interprétée par Vera Farmiga (In The Air, Esther) – la grande soeur de Taissa Farmiga qui jouait Violet dans la première saison d’American Horror Story.
Norman Bates et sa mère Norma dans Bates Motel
Le pilote s’ouvre sur le déménagement de Norman et sa mère Norma, qui partent s’installer dans une petite ville après la mort du père de Norman. Une mort qui ne semble d’ailleurs pas avoir beaucoup affecté Norma : première petite alerte. On apprend alors que Norma a racheté le motel de la ville et le manoir qui va avec et qu’elle compte bien le rénover et le tenir ensuite en compagnie de son fils.
Très vite, le personnage de Norma passe de « jeune mère un peu paumée mais pleine de bonne volonté
» à « manipulatrice autoritaire qui prend plaisir à faire culpabiliser son fils ». Norman n’a pas vraiment son mot à dire, quel que soit le sujet. Sa mère se contente de répondre et de décider pour lui – et lorsqu’il ose émettre un avis contraire, sous-entendre que peut-être, il aimerait faire autre chose, elle joue la carte de la pauvre mère mal aimée. Quand il lui demande de signer une autorisation pour qu’il puisse pratiquer une activité sportive, elle lui rappelle qu’elle a passé toute la journée à préparer un super repas, qu’elle se tue à la tâche pour lui et qu’elle a besoin de lui. Lorsqu’il répond que « Bon, ok, c’est pas grave laisse tomber je ferai pas de sport, pardon », elle s’empresse de signer le papier en disant « Si, mais si enfin, vas-y, je m’en fiche, tiens, je vais faire des courses, mange ».
Ce premier épisode de Bates Motel est un ovni – ce qui pourrait être une bonne chose, mais ce n’est pas encore gagné. Il est trompeur, surprenant, glauque, malsain, gênant, touchant mais il sonne toujours un peu trop faux. En milieu d’épisode, l’histoire prend un tournant radical qui retourne les tripes et qui replace le spectateur dans une autre dimension. De « petit drame étouffant mais qui prend son temps » on se retrouve face à une déferlante de violence, physique et psychologique. Ce tournant arrive réellement sans crier gare, sans nous mettre en garde, rien ne nous prépare à cette fameuse scène qui change complètement la donne et propulse Norma et Norman dans une nouvelle réalité.
Notre perception de la relation entre mère et fils ne cesse de changer et d’escalader. En première partie d’épisode, Norma est une femme seule et un peu paumée qui fait tout ce qu’elle peut pour offrir une vie sympa à son fils après la perte de son père. En deuxième partie elle passe pour une sale mégère manipulatrice qui prend plaisir à culpabiliser son fils et à prendre toutes les décisions pour lui. Et en troisième partie, on se rend compte de l’ampleur du problème qui – on n’en doute pas – ne va faire qu’enfler au fil des épisodes. Leur relation est loin d’être conventionnelle – ils sont proches, peut-être un peu trop proches, mais à ce stade on ne sait pas trop où se positionner. Est-ce l’ambiance qui nous pousse à interpréter leurs échanges différemment ? Est-ce qu’on se fait des idées ? Est-ce que c’est simplement les évènements qu’ils viennent de traverser ensemble qui les rapproche ?
Le premier épisode ne répondra pas à ces questions, mais les suivants se feront une joie de nous en dire un peu plus chaque semaine. Toujours est-il que le dernier échange entre Norman et Norma, sur fond de Jane Eyre et de grandes déclarations, est loin d’être totalement sain. Il ne fait que donner une définition possible de leur relation.
How I Killed My Mother
Ceux qui ont vu Psychose savent très bien comment les choses vont tourner pour Norman et sa mère. Et c’est ce qui tue le peu d’espoir qu’on peut avoir pour Norman en le voyant évoluer dans cette vie un peu pourrave – on a beau le trouver cool, de bonne composition, gentil, bien intentionné, on sait que ça ne va pas durer. Ses démons finiront par le rattraper et toute la compassion qu’on ressent pour lui finira par disparaître.
Parce que Norman Bates n’a pas l’excuse d’un Dexter, ce n’est pas un « bon » serial killer (un concept tout à fait tordu, mais différemment), c’est un psychopathe, un Ed Gein en puissance. Il n’a pas de papa flic pour lui apprendre les bases d’un bon meurtre propret qui rend service à la société. Juste une mère cinglée qui va le pousser, jour après jour, à devenir le tueur qu’on connaît.
Une fois qu’on sait ça, on peut choisir d’accepter l’issue inévitable et d’apprécier le voyage qui va nous y mener. Mais le fait de rendre le personnage de Norman aussi choupitrognon et sympathique et presque pathétique ne va pas nous aider.
Ce premier épisode est, au final, plutôt brouillon – mais c’est le cas de beaucoup de pilotes, donc il est difficile d’émettre un jugement catégorique. Les éléments ne sont pas encore tout à fait bien posés – l’ambiance, les différentes relations entre les personnages, les évènements à venir, la vie du motel, rien n’est encore défini.
Il y a à boire et à manger là-dedans, y compris une scène qui n’a pas grand-chose à foutre là dans laquelle deux policiers viennent fourrer leur nez dans les affaires de Norma, avec un shérif (Nestor Carbonell) ultra suspicieux pour absolument aucune raison. Cette scène, censée faire monter la pression, est beaucoup trop longue et n’a pas vraiment de raison d’être – autre que pour nous faire crier « Hiii attention ils sont dans la merde hiii ». Rien ne justifie le comportement du shérif et c’est au final plus agaçant qu’autre chose.
Difficile, comme vous pouvez le constater, de se prononcer clairement sur ce premier épisode qui laisse, quoi qu’on en dise, un arrière goût amer même 24 heures après l’avoir vu. Je regarderai la suite, ça ne fait aucun doute, parce que j’aimerais vraiment voir comment ils vont répondre à la question « comment devient-on un tueur ? ». Peut-être que tout est vraiment travaillé au millimètre et que ce premier épisode n’est fait que pour nous donner un minuscule aperçu de ce qui nous attend.
Mais clairement, après ces premières images, il n’y a que deux solutions : Bates Motel peut se casser la gueule très rapidement et s’avérer être un gros ratage bien sale, ou s’en sortir avec les qualité d’un American Horror Story (qui en avait déstabilisé plus d’un au premier épisode qui semblait, lui aussi, très brouillon).
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Les Commentaires
Plutôt sympa. Il y a bien sûr des choses un peu bancal mais ça passe.
Ce qui est assez perturbant c'est que l'on a de l'espoir pour ce jeune garçon mais au final on sait très bien que ça finira mal. Est-il déjà déviant, on le devient-il à cause des évènements, ou alors à cause de sa mère ? et ce carnet ?
A suivre, un épisode ne nous donne bien sur pas toutes les réponses mais c'est quoi...