Top départ des épreuves du baccalauréat 2016 cette semaine, et vous savez quoi ? Il paraît que le niveau baisse ! C’est ce qu’on appelle « un marronnier » dans l’argot journalistique : c’est un sujet qui revient de façon cyclique au fil des saisons (comme les feuilles des arbres, donc — comme les marrons en automne. T’as l’image ?)
Et la fameuse baisse du niveau du bac, c’est un sacré marronnier : l’examen est de plus en plus facile, rendez-vous compte, et depuis le temps que ce déclin est en marche, vraiment, le diplôme n’a plus aucune valeur, on le passe les yeux fermés !
C’est ce qui se lit toujours dans la presse, ce qui se dit sur les plateaux, et ce que retient Google, aussi : apparemment, c’est trop facile. Le niveau baisse, on vous dit !
Vraiment ?
Najat Vallaud-Belkacem (vous) pose une colle
La ministre de l’Éducation Nationale, Najat Vallaud-Belkacem, a tenu à vérifier par elle-même cette chute insupportable du niveau des exercices. Pour ce faire, elle est allée choisir un sujet de mathématiques. C’est bien les maths, c’est objectif, y a pas de débat sur la réponse ou la méthode : c’est juste ou c’est faux.
Elle lit l’énoncé tiré des annales 2015 à voix haute, au bénéfice des journalistes qui assistent à la conférence de presse, et wow, vraiment : FA-CILE. Je veux dire, moi j’ai direct la réponse, pas vous ?
C’est vrai que c’est donné, cette histoire de bac. POPOPOOOWWW.
« Soit x, une variable aléatoire qui suit la loi exponentielle de paramètre lambda, où lambda est un réel strictement positif donné.
On rappelle que la densité de probabilité de cette loi est la fonction f, définie sur zéro, + infini par la fonction x, égal lambda e puissance moins lambda x »
L’énoncé ne s’arrête pas là, hein. C’est juste mes connexions neuronales qui ont implosé à ce moment.
La fière bac S que je suis fanfaronne BEAUCOUP MOINS que dans notre clash de la rédac sur les bacs généraux, je le confesse.
Le niveau baisse environ tous les ans, non ?!
Cette critique du niveau-qui-baisse est un marronnier, qui n’a rien de récent ! C’est pourquoi la ministre a tenu à adresser la mauvaise foi de cette vieille rengaine :
« Je crois que certaines critiques méritent d’être balayées par l’absurde, et n’appellent pas d’autre réponse »
« Les critiques qui, chaque année, reviennent au sujet du bac, sont aussi anciennes que le bac lui-même.
Le temps, dans ce domaine, ne fait rien à l’affaire. Ni le nombre des candidats. Ainsi, en 1947, à une époque où seulement 3% d’une classe d’âge l’obtenait, on trouvait déjà formulée la critique suivante :
« Tout serait simple si le bachot remplissait encore sa fonction. Mais, submergé sous le nombre des candidats qui s’est accru prodigieusement, le baccalauréat a vu son niveau baisser d’une façon constante […] »
Année après année, siècle après siècle, au mois de juin revient le baccalauréat. En dépit des attaques répétées et du dénigrement systématique dans lequel certains se complaisent. »
— L’intégralité du discours de Najat Vallaud-Belkacem est disponible ici
La ministre avait déjà utilisé l’absurde pour débouter des inepties, lors de la journée d’étude consacrée aux théories du complot.
À lire aussi : Najat Vallaud-Belkacem s’engage à « donner aux femmes toute leur place » au programme du bac littéraire
Facile, le bac ? Surtout sa critique, non ?
Blague à part, on peut arrêter de déprécier le travail de tou•tes les lycéen•nes qui préparent ces épreuves depuis des mois ? Surtout quand ceux qui émettent ces critiques de « baisse de niveau » auraient sans doute du mal à passer le test ?
J’attends avec impatience le compte rendu des épreuves générales par Thomas Hercouët, qui s’est mis en tête de repasser le bac, dix ans après. C’est vraiment chaud en fait, comme examen, surtout quand on n’a pas une année de préparation dans les jambes !
Je suis contre le bac, mais je respecte le travail que ça représente pour ceux qui le passent, et ceux qui le préparent
Je ne suis clairement pas une fan du bac, je suis même plutôt en faveur de sa suppression (allez, le pavé est lâché, venez débattre dans les commentaires !). Mais il ne me viendrait pas à l’idée de mépriser le travail des élèves qui s’apprêtent à le passer, en dénigrant ce rite de passage.
Bon courage à tou•tes les bachelier•es ! On vous file des tuyaux pour le bac de français, de philo, de physique-maths, on vous donne des conseils pour vos révisions, vous déterminer votre méthode d’apprentissage et relâcher la pression, de quoi prendre confiance en vous et même avoir 20/20 en philo !
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Les Commentaires
Je suis AVS,je travaille avec une élève qui termine sa 4ème dans un collège de province où il n'y a pas de problème de violence mais dont la population n'est pas franchement favorisée dirons nous,avec pas mal de familles sérieusement touchées par le chômage.
Je vais donc commencer par l'élève dont je m'occupe parce qu'elle est quand même la raison de ma présence au collège. Elle est handicapée moteur (pardon,en situation de handicap moteur,selon l'expression consacrée!) mais je dirais que c'est loin d'être son principal problème,du moins par rapport à sa scolarité. Elle est issue
C'est très bien en théorie sauf qu'en pratique,c'est une ado qui est surcouvée,pas du tout habituée à faire le moindre effort et qui n'a pas le début du quart de la moindre pression parentale en ce qui concerne ses résultats scolaires.
Résultats?? C'est une élève qui bien qu'intelligente n'a aucune motivation pour le travail scolaire,n'écoute quasiment jamais en cours malgré mes remarques constantes mais qui parvient à avoir une moyenne correcte parce qu'elle s'accroche davantage dans certaines matières (et parce que pas mal de contrôles sont extrêmement faciles,comme ça a été dit par ailleurs).
Je m'inquiète vraiment beaucoup pour elle non pas parce qu'elle n'a pas de capacités mais que laxisme de son éducation fait qu'elle n'a aucune motivation pour l'école. Elle ne sera pas toujours une ado de 15 ans au collège...
Maintenant,au niveau général,toute personne travaillant dans l'EN peut observer la baisse de niveau des élèves même si elle n'est pas du tout correlée à un manque d'intelligence. Seulement,beaucoup manquent de motivation donc font autre chose pendant les cours voire perturbent la classe et sont par conséquent bien incapables de comprendre et de retenir les notions apprises en cours ce qui fait qu'ils accumulent du retard.
Autre chose:je ne sais pas si c'est pratiqué partout mais dans mon collège,les profs préparent toujours des "contrats" pour les contrôles où ils indiquent ce sur quoi portera le devoir. A la limite en 6ème,lors du 1er trimestre,pourquoi pas... Mais ça dure tout le collège et beaucoup d'élèves deviennent absolument incapables de s'en passer.
N'étant pas prof,je ne parle pas par expérience perso,mais j'ai discuté avec pas mal de mes collègues qui disent qui leur est demandé de noter "gentiment" au brevet... (au vrai,lors des brevets blancs,certains profs sont beaucoup plus sévères)
Maintenant,je voudrais parler de mon expérience d'élève qui remonte à quelques temps quand même: ma scolarité au lycée a été une cata de bout en bout. Déjà parce que j'ai été victime de harcèlement (modéré mais qui m'a beaucoup fait souffrir quand même) de la seconde à ma 1ère terminale et ensuite,parce que l'environnement et le programme du lycée (sauf en philo,que j'ai toujours adorée) a fait que je ne me suis jamais sentie à l'aise. C'était une très mauvaise période pour moi qui a eu de nombreuses conséquences. Je ne rentrais pas dans le moule. De fait,j'ai échoué au bac. A deux reprises. Même après avoir redoublé ma terminale dans un autre établissement,duquel j'ai de bien meilleurs souvenirs.
Ca a été dévastateur pour mon estime de soi. Je pensais que j'étais nulle,que je ne valais rien,justement parce que le bac n'avait aucune crédibilité et avait déjà à l'époque plus de 85% de réussite. Certes,je souffrais de stress qui me paralysait. Certes. Cependant,mon plus gros problème était davantage le fait que l'enseignement proposé au lycée ne me convenait pas. D'ailleurs,j'ai obtenu (beaucoup plus tard donc peut-être que la maturité a joué également) une équivalence du bac,le DAEU avec mention.
J'ai l'impression que la baisse du niveau des élèves est multifactorielle et que ce sera bien difficile d'inverser la tendance. Malheureusement,je ne crois pas à la réforme qui ne fait que tirer le niveau vers le bas.