Sur Facebook, il y aurait un groupe privé de 52 000 membres où des hommes partagent des photos de leur conquête, à leur insu et en secret. Summum du glauque, beaucoup des photos diffusées semblent avoir été prises sans même que ces femmes soient au courant.
Ce groupe s’appelle Babylone 2.0 et c’est le site belge 2 Girls, 1 Mag qui a révélé cette information hier soir.
Les photos de femmes nues sur Babylone 2.0 : une enquête compliquée
Au début, je dois l’admettre, j’ai trouvé l’histoire un peu grosse. Comment autant de monde peut se rejoindre et réaliser une activité si malsaine sans que personne n’en sache rien ? Évidemment, l’enquête était compliquée par le fait que ce groupe est privé, et donc introuvable via une recherche basique.
Et puis en fouillant un peu, j’ai découvert des traces. J’étais juste passée à côté.
À l’image de ce tweet datant d’il y a quelques semaines où un anonyme explique que son Facebook ressemble à un site de pervers « entre Garde la pêche et Babylone 2.0 », deux sites similaires. Évidemment, je n’avais pas la référence avant ce matin.
D’ailleurs Chrystelle Charlier, à l’origine du premier article sur ce sujet, admet qu’elle a découvert ces groupes entièrement par hasard.
« Ça s’est passé par rebond. J’ai une connaissance qu’un homme a ajouté en pensant qu’elle trouverait ça drôle. Ça n’a pas du tout été le cas et elle en a parlé à une amie journaliste (qui a écrit cet article sur Les demoiselles de Bruxelles).
Comme cette amie ne pouvait pas parler comme elle l’aurait souhaité dans son magazine, elle m’a filé l’information et nous avons passé la journée d’hier à enquêter sur le sujet.
Je n’ai eu accès au groupe que 30 minutes avant qu’ils découvrent qu’il y avait des filles. On s’est toutes fait virer. »
Une capture d’écran prise par Chrystelle peu avant d’être exclue du groupe
« C’est très loin de l’avion de chasse qu’on traque tous »
Sur une première capture que m’a envoyé celle qui a écrit le premier article à ce sujet, on retrouve une photo d’une femme, nue, prise de dos. Il semble presque évident qu’elle ne sait pas qu’elle est photographiée. Le commentaire glace le sang.
« C’est très loin de l’avion de chasse qu’on traque tous, certes, mais du haut de mes 27 ans, je ne pouvais refuser ce taudis de 44 ans, juste pour rajouter une ligne sur le CV. »
Un autre semble fier de partager un photo de femme nue, sans doute envoyée par une de ses connaissances.
Des photos partagées à la vue de ce public constitué de 52 000 membres. On affiche ses trouvailles comme on se vante de ses trophées.
Une question reste : comment recrute-t-on secrètement autant de membres ? Il y a tout d’abord le bouche à oreille. Et puis, tous ces groupes détiennent également des pages officielles qui font office de portail.
Dessus, des anonymes demandent l’accès aux groupes privés comme on peut le voir sur la page officielle de Babylone 2.0.
Quelle réponse donner aux groupes privés qui vivent du commérage ?
La première réaction qu’a eu Chrystelle Charlier, qui a écrit l’article de 2 Girls, 1 Mag, a été la colère.
« Je ne me doutais pas que ça existe.
Je cale sur le nombre : 52 000 personnes qui ne disent rien et trouvent ça drôle.
Il y a aussi la méchanceté des propos. C’est une humiliation incroyable. C’est une sorte de course au like pour se rendre intéressant. On dirait que ces hommes se refusent à ce que les femmes aient une sexualité libérée alors qu’eux-mêmes en rêvent.
Ça fait vraiment vengeance. »
Je me demande moi-même comment réagir. À quel moment la société a-t-elle merdé à ce point pour élever autant de personnes dans l’idée qu’ils peuvent être ne serait-ce que témoin de ce genre de groupes sans réagir ?
Car tout cela n’est pas anodin. Selon 2 Girls, 1 Mag, il s’agit d’un acte illégal de non-respect de droit à l’image des personnes physiques, de harcèlement sexuel et moral :
« En France, le tout est passible de 75 000€ d’amende selon l’avocat que j’ai consulté. »
Alors pour réagir, une pétition a été créée à l’attention de Charles Michel, le premier ministre belge ainsi que de François Hollande, le président français.
Elle demande l’instauration d’une loi qui rendrait pénalement répressible le forwarding d’images à caractère privé ainsi que l’instauration d’une journée nationale obligatoire de sensibilisation dans les écoles à une meilleure utilisation du Web.
Ce qui est triste, c’est ce groupe n’est que la surface visible de l’iceberg. Il y en a d’autres, avec le même genre de principe.
Par exemple, en 2014, Émilie Laystary dénonçait sur Vice le principe des groupes partant à la chasse des « beurettes à renoi ». Plus proche, une amie m’a récemment parlé du groupe privé de son école de commerce, aux allures de Gossip Girl.
On y dénonce les ragots, balance les photos et se gausse de l’humiliation des personnes visées. Ce n’est pas plus honorable et pourtant je sais que cela n’a rien d’exceptionnel…
À lire aussi : Le « revenge porn » est désormais puni par la loi française !
— Merci à Caroline de nous avoir signalé l’info sur Facebook !
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires
Le partage de photo privé entres hommes, l'harcèlement, l'agression sexuelle, détournement de mineur, et j'en passe. C'est le quotidien chez les hommes, et je parle pas d'homme creep ou je ne sais quoi. Je parle de monsieur tout le monde.
D'ailleurs, il n'y a pas plus délit chez les hommes qui ont des pathologies/maladies mentales, de ceux qui sont "normaux".
Je pense au type qui a gagné un Oscar dernièrement, et qui quelques jours après, c'est retrouvé dans une affaire agression sexuel sur mineure. Les réactions des gens, c'est n'importe quoi :
Entre le "Je l'aurai jamais vu faire ça" Ah, genre parfois, tu dis, "lui je le verrai bien agresser une mineure" ?
Entre ceux qui sont dans le déni le plus total, d'autre qui parle de "présomption d’innocence" alors que le type a avoué.
Bref, trop de gens qui sont à côté de la plaque, alors que les faits sont là, chaque jour. Je ne dis pas que j'ai une solution.