— La photo d’illustration est tirée de la série Stranger Things.
Initialement publié le 19 octobre 2016 — Nous sommes en 2016 et j’ai 20 ans. En tout cas officiellement, car pour le reste de la Terre, c’est comme si j’en avais 14 — 16 ans pour les plus généreux. Tout ça parce que mon corps n’est pas celui de quelqu’un qui a la vingtaine, et croyez-moi, au quotidien c’est très énervant.
Il faut dire que je ne dépasse pas 1m60. Je ne suis même pas sûre de les atteindre d’ailleurs. Je me souviens qu’en maternelle et en primaire, j’étais la plus grande, j’avais vite poussé. Mais ma mère m’a toujours dit qu’avoir ses règles très jeune stoppait la croissance. Or, je les ai eues en primaire justement. Et depuis, plus rien. Ma taille a stagné et je n’ai plus grandi depuis le collège.
Un corps en décalage
J’ai aussi une toute petite poitrine. Elle a donc commencé à pousser tôt, mais elle s’est aussi arrêtée tôt. Cela ne me dérange pas. Bien que ma poitrine fut un grand complexe durant mon adolescence, j’ai vite appris à être fière de mon corps tel qu’il est — même si c’était très difficile vu toutes les remarques que je me prenais.
J’en suis tellement fière que je refuse de porter des soutiens-gorge rembourrés, du moins lorsque je porte un soutien-gorge. Le problème, c’est qu’il est très difficile d’en trouver des non-rembourrés. Je ressors souvent des magasins énervée.
Ma poitrine est une chose. Mes doigts en sont une autre. On m’a toujours dit que j’avais des mains de bébé, des doigts minuscules. Bon, c’est mignon les petits doigts, je préfère ça qu’avoir d’énormes paluches, mais c’est aussi handicapant.
Par chance, j’ai réussi à jouer de la guitare (avec beaucoup de difficultés en revanche), mais impossible de jouer du piano. Il me fallait mes deux mains pour ne faire qu’un seul accord. Je ne pouvais pas aller bien loin avec ça !
Je n’ai aussi jamais trouvé de bague à ma taille (à part chez les enfants). Le problème, c’est que j’arrive à un moment de ma vie où j’ai envie de porter autre chose aux doigts qu’un petit chat ou une coccinelle.
Pour les bracelets, pareil. Je les perds tous tellement mon poignet est fin et il m’a fallu des mois pour trouver une montre qui ne faisait pas trop « enfant » et qui m’allait.
De la difficulté de s’habiller
Descendons le long du corps et parlons des fringues en général. J’ai énormément de difficultés à m’habiller. Généralement je dois me rendre au rayon des enfants, et il m’arrive d’y trouver des habits trop grands.
Le truc, c’est que je suis une « geekette » comme on dit. Premièrement, on trouve très peu de fringues geek pour femmes, alors je dois me diriger vers le rayon des hommes. La taille S des vêtements pour hommes me donne l’impression d’être en chemise de nuit et, bien que pendant des années cela ne me dérangeait pas, je commence maintenant à avoir envie de ressembler à quelque chose, même en portant un tee-shirt Star Wars…
Deuxièmement, je trouve de temps en temps la mode geek au rayon pour femmes. Un beau pull Superman, rose et à paillettes. Je n’ai jamais été très féminine et je préfère largement un bon vieux tee-shirt Batman
noir et gris. Tout cela pour dire que, la plupart du temps, c’est au rayon des petits garçons que je m’habille. La grande fierté, donc !
Passons à la plus grande joie de toute ma vie : les chaussures. Comme dit plus haut, je n’ai jamais été très « féminine » et j’ai passé la plus grande partie de ma vie à porter des baskets. Aucune difficulté pour en trouver, bien que je fasse du 36. D’après ma mère, c’est mignon les petits pieds. Oui, c’est vrai, mais c’est aussi impossible à chausser.
En plus d’être trop petits, mes pieds sont aussi trop fins, ce qui m’a d’ailleurs valu quelques douleurs aux genoux suivies de semelles orthopédiques. Bref, impossible de porter des ballerines sans les perdre en marchant.
En ce moment, je suis à la recherche de chaussures avec un peu de talon compensé (mais pas trop) et fermées au bout car je déteste les chaussures ouvertes. J’en ai essayé des dizaines, du 35 au 37, même du 34, sans succès. Ma mère m’a dit d’aller chercher du côté des chaussures pour enfants. Sauf que là, je cherche des talons, pas des baskets. Encore une fois, je suis face à une impasse.
Mais tout ceci ne serait rien sans les remarques que les gens me font (ou non), qui rendent la vie quand on ne fait pas son âge très énervante.
Jugements hâtifs et et manque de respect
Dernièrement, il y a une soirée en particulier qui m’a bien insupportée. J’étais au restaurant avec ma mère et son copain, et ce dernier a commandé une bouteille de vin. Quelques minutes plus tard, le serveur est arrivé avec ladite bouteille et deux verres de vin. Bon, je ne bois jamais d’alcool, certes, mais je me suis sentie vexée.
Toujours au cours de ce même repas, le serveur a offert à ma mère et son compagnon deux petits verres d’un alcool italien. Cette fois-ci, j’ai haussé le ton après que le serveur soit reparti : « Et moi, je peux aller me faire voir, c’est ça ?! ». Même si je ne fais pas mon âge, et même si je ne bois pas, me demander au moins si j’en veux serait la moindre des choses !
Et les conséquences de mon apparence dépassent nos frontières… Alors que nous passions une semaine de vacances en Italie, nous nous sommes assis au bord d’un lac. Le niveau de l’eau était à environ deux mètres en-dessous du sol sur lequel nous marchions. J’ai passé mes jambes au-dessus de l’eau. Une petite fille d’environ 7 ans a voulu faire la même chose, mais sa mère le lui a interdit.
Et bien que je ne parle pas italien, je le comprends presque parfaitement. Cette gamine a rétorqué à sa mère : « Mais elle le fait, la petite fille ! ». Oui, elle a utilisé un terme qui voulait dire « petite fille » et j’ai failli me lever pour lui hurler que j’avais 20 ans et que j’aimerais un peu plus de respect.
Enfin, le meilleur pour la fin : laissez-moi vous raconter une anecdote shopping. Alors que ma mère et moi faisions les boutiques, j’ai repéré une petite nuisette trop mignonne. Ma mère a décidé de me l’acheter.
Elle est retournée dans le magasin le lendemain et est repassée en caisse avec la caissière de la veille. Celle-ci lui a lancé :
« Vous laissez votre fille de 14 ans acheter ce genre de choses ? »
Vous sentez la rage monter ? J’avais envie d’y retourner pour lui faire bouffer ma carte d’identité. Premièrement, je n’ai pas 14 ans ! Et deuxièmement, même si j’avais 14 ans… de quoi je me mêle ?
Vie scolaire et sociale
Heureusement, pour les études, à part le fait que les gens qui ne me connaissent pas pensent que j’ai sauté des classes, cela ne pose pas problème. Il y a juste eu cette élève de première année qui a cru que j’étais dans sa classe alors que je suis en L3. Mais je lui ai répondu en souriant que je la comprenais et que j’y étais habituée.
Il y a cependant pas mal de situations de ce genre où je me sens mise à l’écart à cause du fait qu’on pense que je n’ai pas l’âge de faire partie du groupe.
Pour ce qui est de ma vie amoureuse, mon copain a deux ans de plus que moi et mon physique de gamine n’a jamais vraiment influé notre relation. Nous vivons vraiment comme des gens de 20 et 22 ans. Mais j’ai toujours aimé les hommes plus âgés, et je me souviens du temps où j’étais célibataire et où je ne semblais pas taper dans l’œil des hommes qui m’attiraient.
J’ai toujours pensé que c’est parce qu’ils me trouvaient sans doute trop jeune. C’est très difficile de draguer un trentenaire quand il pense que vous avez 14 ans !
Je sais que je ne suis pas la seule dans cette situation et je compatis avec toutes les personnes dans mon cas. Ne perdez pas espoir : quand on aura 40 ans, on en paraîtra 30 !
Pour ma part, je vais aller me faire faire un tee-shirt avec écrit en gros dessus « Je suis majeure », on ne sait jamais.
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