Après le sacre de meilleure réalisatrice pour Chloé Zhao il y a deux ans, puis celui de Jane Campion l’année dernière, on pouvait croire que les lignes avaient bougé dans le monde très patriarcal des Oscars. Malheureusement, les nominations de 2023 marquent un retour en arrière.
3 femmes nominées depuis 1929, aucune en 2023
Cette année, l’Académie des Oscars a décidé qu’aucune femme n’allait concourir dans la principale catégorie de la cérémonie : celle de la meilleure réalisation.
Les cinq concurrents au prestigieux titre sont tous des hommes. Sur la liste des cinq finalistes, on retrouve ainsi les noms de Martin McDonagh pour Les Banshees d’Inisherin, Daniel Scheinert et Daniel Kwan pour Everything Everywhere All at Once, Steven Spielberg avec The Fabelmans, Todd Field pour Tar ainsi que Ruben Östlund, dont le film Sans Filtre a déjà décroché la Palme d’or au festival de Cannes l’année dernière.
Avec une telle sélection, il est difficile de croire que l’Académie soit décidée à inverser une norme sexiste à l’œuvre depuis la création des Oscars. En effet, depuis 1929, seules trois femmes ont été récompensées du trophée de la meilleure réalisation. Kathryn Bigelow était la première avec son film Démineurs en… 2010, soit 81 ans après la première cérémonie. À l’inverse, 18 réalisateurs ont décroché le titre non pas une, mais deux fois.
Cette année, les grands films réalisés par des femmes ne manquaient pas
Malgré ce choix des jurés, les concurrentes légitimes ne manquaient pas. Où sont passés les excellents Aftersun de Charlotte Wells, The Woman King de Gina Prince-Bythewood ou encore She Said, épopée de Maria Schrader dénonçant précisément le patriarcat et la culture du viol à Hollywood ?
Si l’on peut se réjouir qu’Everything Everywhere All at Once, porté par l’actrice malaisienne de 60 ans Michelle Yeoh, ait raflé 11 nominations, on note aussi deux oublis remarqués. En effet, on regrette l’absence des sublimes Saint Omer d’Alice Diop et de Joyland de Saim Sadiq, deux grands films féministes qui n’ont pas été retenus dans la catégorie du meilleur long-métrage international.
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Les Commentaires
C’est le premier film de Charlotte Wells mais Sam Mendes, Jordan Peele ou encore Damien Chazelle ont eu des nominations pour Meilleur Film ou Meilleur Réalisation pour leurs premiers films. Est-ce qu’on le justifierait comme ça si Charlotte Wells était un homme? (Vraie question car c’est quelque chose que j’ai pas mal lu dans certains articles à propos d’Aftersun)
De très bons films ont été réalisées par des femmes (même si c’est tout à fait vrai qu’il y a un problème au niveau des opportunités) donc la vraie question pour moi est: pourquoi les Oscars ne votent pas pour elles?
Je ne pense pas que la qualité des films soit le premier critère mais que c’est un monde misogyne où les jurés votent pour ceux qui leur ressemblent et ceux qu’ils ont l’habitude de voir. Il y a un biais de base vis à vis des réalisatrices. Et comme la notion de bonne réalisation est subjective, ils vont juste dire que c’est pas bon alors que je pense que pas mal de gens ne seraient pas forcément d’accord avec leurs choix. Ils sont dans une position de pouvoir et ne remettent pas en cause les biais qui font que cette année il n’y a pas de réalisatrices.