Parler d’argent, en France, c’est encore tabou. Pourtant, c’est un sujet passionnant, et par certains aspects… féministe ! Dans notre rubrique Règlement de comptes, des personnes en tout genre viennent éplucher leur budget, nous parler de leur organisation financière (en couple ou solo) et de leur rapport à l’argent. Aujourd’hui, c’est Audrey qui a accepté de nous ouvrir ses comptes.
- Prénom : Audrey
- Âge : 38 ans
- Profession : Infirmière en Suisse
- Salaire net avant prélèvement à la source : 5 842,60 € soit 5 457,50 chf
- Salaire net après prélèvement à la source : 4 959,09 € soit 4643 20 chf
- Lieu de vie : Annemasse (Haute-Savoie) et Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine)
La situation et les revenus d’Audrey
Audrey a 38 ans et travaille en CDI à temps partiel (24 heures par semaine) depuis deux ans dans une maison de retraite en Suisse. Avant cela, elle a été infirmière de nuit durant douze ans en région parisienne.
« Maintenant, je gagne autant que ce que je gagnais en travaillant 84 heures par semaine. Car auparavant, en plus de mon CDI, je travaillais dans deux autres hôpitaux afin d’anticiper les grosses factures (taxe foncière, charges de copropriété…) qui arrivaient pendant les vacances. »
C’est à la suite d’un burn-out qu’Audrey a décidé de changer de vie.
« L’idée m’est venue de travailler à l’étranger, mais je voulais d’ abord accéder à la propriété avant d’entamer cette démarche. Changer d’air m’a permis de reprendre goût à mon métier. Au fil des années, j’ai pu voir la dégradation et la mise en business du secteur de la santé. Et je n’ai pas signé pour ça. »
Aujourd’hui, la jeune femme partage son temps entre Paris et la Haute-Savoie. Elle loue un appartement meublé dans le centre-ville d’Annemasse, à la frontière, d’où elle peut rejoindre son lieu de travail en trottinette ou en transports en commun en 30 minutes.
Elle est aussi propriétaire depuis 2019 d’un appartement de 28m2 à Issy-les-Moulineaux, où elle rentre toutes les deux semaines pour voir sa famille et ses amis.
Aujourd’hui, pour son mi-temps dans une maison de retraite à Annemasse, Audrey touche un salaire mensuel net de 5 842,60 €. Soit 4 959,09 € une fois les impôts sur le revenu déduits. Ce qui lui convient très bien.
« J’ai conscience que je suis très bien payée. Je ne dirais pas que je suis riche, mais ma situation de frontalière solo est très confortable. Un Suisse dirait qu’il est mal payé, cela fait partie des bas salaires. Mais pour moi, c’est largement suffisant car je combine travail et temps pour moi. »
Le rapport à l’argent d’Audrey et son organisation financière
Audrey a grandi dans une « famille pauvre » avec cinq enfants, ce qui lui a appris à être sur ses gardes lorsqu’il est question d’argent.
« J’ai vu ma mère faire croire à mon père qu’ elle avait contracté un prêt pour se faire rembourser par mon père, afin de nous éviter de nous faire expulser par deux fois, car il ne payait pas les loyers. J’ ai vu ma mère avoir des saisies sur salaire pour des amendes impayées par mon père. Avec lui, on ne voyait jamais la couleur de l’argent, il nous mettait souvent dans la galère, comme rester plusieurs mois sans électricité ou sans eau chaude.
Malgré cela, ma mère a toujours essayé de nous préserver et nous inculquer une éducation financière. Élever cinq enfants en étant en situation précaire n’a pas été évident. »
Cette enfance difficile a forgé le rapport à l’argent d’Audrey, jamais à découvert, elle sait qu’elle doit « s’auto-assurer » et ne compter que sur elle-même.
« C’est pourquoi j’épargne et j’investis, et que je priorise les factures avant les plaisirs. »
Elle a d’ailleurs une routine bien installée. Dès qu’elle reçoit son salaire, elle met au minimum 2 000 € de côté par mois : 1 000 € pour le budget économie et 1 000 € sur le budget voyage.
« Je fais toujours le calcul prévisionnel de ce que je vais dépenser dans le mois. Comme ça, je retire en espèces ce dont j’ ai besoin en utilisant la technique des enveloppes. »
Audrey a aussi ouvert un Plan d’épargne retraite (PER), une assurance vie, un LLDS (livret de développement durable et solidaire) et un livret A, sur lesquels elle verse chaque mois de l’argent.
« Ma mère m’a bien appris la technique de la fourmi car à mes 25 ans, j’avais 20 000 € d épargne pour démarrer la vie. »
Aujourd’hui, la jeune femme gagne aussi suffisamment bien sa vie pour aider financièrement sa mère.
Les dépenses d’Audrey
Parce qu’elle partage sa vie entre Annemasse et Issy-les-Moulineaux, Audrey a nécessairement des frais immobiliers importants : un loyer de 750 € et le remboursement d’un prêt de 678 €. Il s’agit de son premier poste de dépenses.
Audrey ne paye des charges que sur l’appartement dont elle est propriétaire (à Annemasse, elles sont incluses dans le loyer) : 51 € d’électricité et 88 € pour divers abonnements (Netflix, internet dans ses deux logements et son téléphone).
Ses deux assurances habitation lui reviennent à 200 € mensuels et elle paye 80 € de frais de transports, hors abonnement annuel de 250 € pour prendre le train.
« Je paye 80 € l’aller-retour Paris-Genève deux fois par semaine, mais mon employeur en prend en charge la moitié. »
Concernant les impôts, Audrey est redevable de la taxe foncière (514 € annuels) et de la taxe d’habitation (1 228 € par an), qu’elle paye en une fois. Lissées sur l’année, ces deux dépenses lui reviennent à 145 € mensuels.
Quant aux frais bancaires, ils sont d’un peu plus de 21 €.
« Je suis en mode healthy diet »
Pour se nourrir seule, en Suisse et en France, Audrey s’en sort très bien puisqu’elle ne paye que… 100 € de courses alimentaires par mois ! « On a du mal à la croire mais c’est la vérité. Et je mange sainement ! Auparavant, je faisais 400 € de courses par mois, et je me suis rendu compte que c’était beaucoup trop. »
La jeune femme se rend principalement à Leclerc. Elle explique payer si peu pour manger parce qu’en plus de faire beaucoup de sport, elle fait très attention à son alimentation.
« Je suis en mode healthy diet. Je cuisine en gros pour la semaine et je privilégie au maximum le sans gluten. Je regarde le prix au kilo et je profite des promotions. Je m’en sors très bien, en achetant quand même du poisson, des légumes surgelés, du lait végétal, des produits frais… »
Pour éviter de dépenser trop, Audrey privilégie les marques distributeurs « qui, en plus, présentent moins d’additifs superflus ».
Côté dépenses dites « féminines », elle les estime à 20 € par mois.
« J’ai une cup depuis huit ans et j’utilise des culottes menstruelles depuis un an. Je n’achète plus de make-up, hormis un eye liner ou un crayon de temps en temps. »
En revanche, Audrey dépense une fois par an 400 € en médecine esthétique. Elle a aussi réglé cette année 1 674 € pour huit séances de Lazeo (épilation laser). Lissées sur l’année, ces deux dépenses lui reviennent à 172,5 € par an.
Les loisirs d’Audrey
Audrey adore voyager : ce sont dans ces escapades qu’elle investit la majeure partie de son budget loisirs.
« Je voyage souvent seule, alors je suis souvent en mode backpacker et je chine les meilleurs tarifs de voyage. Je suis la reine des bons plans pour voyager pas cher ! »
D’ailleurs, son dernier « craquage » est d’être partie seule pendant deux jours à Berlin et de s’être offert un hôtel à 400 € les deux nuits.
Audrey arrive à financer ses escapades grâce à une enveloppe spéciale vacances. Sinon, ses sorties entre amis, soirées salsa et restaurants lui coûtent en moyenne 100 € par mois.
« J’ai aussi un abonnement à un club de sport qui est accessible au Portugal, en Espagne et au Maroc. Du coup, même quand je voyage, je peux aller au sport. »
Cette salle de sport lui revient à 25 € par mois.
Outre ces dépenses de loisirs, Audrey fait un don mensuel à la Croix Rouge (12 €) et un autre à Médecins Sans Frontières (10 €).
L’épargne et les projets d’avenir d’Audrey
Chaque mois, Audrey parvient à économiser environ 2 500 € « car l’argent du précédent salaire, je le mets de côté aussi ».
En plus d’aider sa mère tous les mois, Audrey envisage d’utiliser cette épargne pour s’acheter sa première voiture, puisqu’elle vient de décrocher son permis de conduire.
« Je n’en voyais pas l’utilité en étant à Paris, mais pour la Haute-Savoie et ses paysages montagneux, c’est plus simple d’avoir une voiture pour découvrir les environs. » Elle envisage aussi d’investir dans l’immobilier.
« Je suis heureuse de ma vie quotidienne, j’ai du temps pour moi car je travaille seulement six mois sur l’année et je gagne bien ma vie. Aujourd’hui, je voyage souvent, et je peux encore plus m’épanouir et partir découvrir le monde. »
Merci à Audrey de nous avoir ouvert ses comptes !
Pour témoigner sur Madmoizelle, écrivez-nous à :
[email protected]
On a hâte de vous lire !
Vous aimez nos articles ? Vous adorerez nos podcasts. Toutes nos séries, à écouter d’urgence ici.
Les Commentaires
J'ai une question du coup en relisant l'article. Vous dites que vous travaillez moins de temps et je vois noté 6 mois dans l'année. Du coup ce salaire vous le touchez tous les mois pour 24h par semaine ou seulement quelques mois dans l'année ?
Je trouve qu'il manque un élément important : vous faites quoi de tout cet argent économisé ? A priori pas d'enfants pour hériter et vous avez déjà un budget voyage sympa (même si à mon goût 1000€ par mois ce n'est pas assez pour mes voyage