La Daronne est la reine des conseils pas si cons enrobés dans une grosse dose d’humour plus ou moins subtil. La voici de retour pour voler au secours d’une lectrice !
La question pour la Daronne
Chère Daronne,
Durant le confinement, un nouveau collègue a rejoint mon équipe. À l’époque, nous étions en télétravail et nous avons tous bien accroché avec lui. Il est performant et très sympa. Sauf que quand nous sommes retournés au bureau, nous nous sommes rendus compte qu’il sentait horriblement mauvais.
Ça peut avoir l’air trivial, mais du fait de notre bonne entente virtuelle, il est très souvent avec nous et se tient très proche, et son odeur est très difficile à supporter. Tout le monde en vient à l’éviter, et on tremble quand il s’approche. Surtout qu’il n’a pas du tout l’air de réaliser à quel point… Il pue.
Je suis assise à côté de lui et j’ai vraiment du mal à m’habituer à sa mauvaise odeur, mais je ne sais pas quoi faire pour le lui dire gentiment. Help !
Hortense
La réponse de la Daronne
Mon petit sapin,
Comme je compatis, les mauvaises odeurs, c’est l’enfer, surtout en open-space où elles volettent comme des petites perruches vertes (nombreuses et sans le moindre prédateur pour endiguer la prolifération effrénée de l’espèce).
Tout le monde a le droit de sentir mauvais de temps en temps. Ça t’arrive aussi. Ce n’est pas grave, l’être humain au naturel sent le fennec décomposé, et ce n’est qu’après des siècles de domptage acharné à coup de savon abrasif, que nous avons enfin réussi à transcender notre vraie nature. Ok super. Mais si toi, tu fais l’effort de limiter l’intensité de tes relents, tu es en droit d’exiger des autres qu’ils en fassent autant. Je te soutiens à 100 % : à titre personnel, les odeurs corporelles de gens me débectent, même quand elles sont inoffensives, alors j’imagine bien ton inconfort.
Heureusement, il existe des solutions. Malheureusement, la solution va consister à prévenir l’intéressé. Ou à te mettre du camphre ou de la pâte d’eucalyptus sous le nez, à la manière des médecins légistes, en dernier recours. Oui ça brûle, mais les effluves du collègue aussi alors…
Pourquoi les gens qui puent, puent ?
Certains font de la comptabilité ou du suivi de projet comme métier, moi, je tape sur Google « Pourquoi certaines personnes sentent mauvais ? ». Chacun son truc. Et donc, voilà pourquoi les gens sentent mauvais :
- Mauvaise hygiène : NO SHIT SHERLOCK !
- Troubles de santé qui peuvent compromettre l’entretien intime ;
- Amour immodéré pour certains aliments comme l’ail ou l’oignon ;
- Consommation d’alcool et / ou de certains médicaments ;
- Stress ;
- Transpiration excessive ;
- Mauvaise technique de lavage textile.
Ce qui est bien avec la plupart des raisons que j’ai pu répertorier, c’est qu’elles s’abordent tranquillement et sans tabou. GÉNIAL. Non.
Ne reste pas sans rien dire pour autant. Si tu ne le fais pas pour toi, fais-le pour ton collègue. Aussi brillant et sympathique soit-il, les gens n’aiment pas que les autres gens puent et il risque de passer à côté de nombreuses opportunités s’il ne règle pas rapidement ses petits problèmes d’émanation. Aussi triviale soit-elle, l’odeur corporelle peut constituer un critère rédhibitoire quand il s’agit d’embauche ou d’interaction sociale. Voilà, donc que quelqu’un se dévoue pour rendre service à ce pauvre homme.
Comment dire à quelqu’un qui pue qu’il pue ?
Je vous vois vous refiler la patate chaude entre collègues persifleurs. Chacun espérant secrètement qu’un des autres sera suffisamment bourré à la soirée de Noël qui approche pour lâcher le morceau. STOP. Ne faites pas ça, c’est moche et quelqu’un doit se dévouer une bonne fois pour toutes. Il peut s’agir d’un collègue proche, d’un superviseur ou au contraire d’une personne plus extérieure à l’équipe, selon ce que vous estimerez être le plus bienveillant pour votre collaborateur. Pour la suite, les psys du net ont mis sur pied un protocole très précis à mettre en place lorsque l’on annonce à quelqu’un qu’il sent mauvais et qu’on n’en peut plus :
Parler à l’intéressé à l’abri des regards : « – On pourrait se parler en privé toi et moi ? Je dois te dire quelque chose d’important. – Ah bah oui, j’ai dix minutes, on peut prendre une salle de réunion, si tu veux – NON NON, euh, on va marcher dehors plutôt ? – Ok, j’appelle l’ascenseur. NON Non… Euh descendre 10 étages à pied, ça fait du bien, non ? ».
Se montrer bienveillant, mais direct : avant de se lancer, il faut réaffirmer son respect au collègue et le prévenir que ce qu’on va lui dire n’est pas facile, mais qu’à sa place, on aurait aimé être mis au courant. Ensuite, c’est le moment de se lancer. J’ai même trouvé (et traduit, car je suis sympa) la phrase type pour aborder ce genre de situation : « J’ai remarqué que tu avais une odeur assez forte sur toi. Est-ce que c’est quelque chose dont tu as conscience ? Et est-ce que tu penses que tu pourrais faire quelque chose à ce sujet ? ».
Reprendre le cours de sa vie normale : ce serait tentant de vouloir développer le sujet et y aller de sa petite interprétation personnelle du type : est-ce que tu connais le principe d’un gel douche ? Et peut-être aussi que tu devrais arrêter de manger des asperges ? Et puis je te conseille de… NON. Tu n’es pas dans la vie de cette personne, restes à ta place. Au contraire, une fois la boule puante lâchée (pardon), le sujet peut se clore très vite.
Les choses à ne pas faire :
Semer des indices : même si tout le monde a suivi la formation contre le harcèlement sur le lieu de travail, t’en as toujours qui ne se gênent pas pour faire marrer la galerie aux dépens des autres. Flacon de déodorant abandonné subtilement sur le bureau de l’intéressé, « Waw ça sent mauvais ici !!! » lancés à la cantonade, autant de petites agressions mesquines à éviter, parce qu’on est des gens bien. Du moins on essaye.
Demander aux RH de reprendre le dossier : à la limite, demander conseil à une personne des ressources humaines pour connaître la meilleure façon d’appréhender ce problème et se couvrir, d’accord. Mais pour ce qui est d’annoncer la nouvelle, il vaut mieux envoyer le superviseur ou un collègue de confiance.
Accuser les autres : comme ce serait tentant « Moi, j’ai l’anosmie. Et je t’adore HEIN. Ce n’est pas moi qui dis que tu pues, ce sont les autres ». Eh bah désolée, mais c’est celui qui parle doit le faire en son nom, même s’il est soutenu par tous les autres. Et si le collègue demande si d’autres se sont plaints de son fumet soutenu, il suffit de répondre : « Je pense que si je l’ai remarqué, les autres l’ont remarqué aussi. ». Pas la peine de forcer sur l’effet seul contre tous, le collaborateur est déjà suffisamment mortifié comme ça.
Renvoyer l’employé sous un autre motif : tout ça parce que vous n’aurez pas eu le bide de lui dire la vérité en face, bande de lâches.
Oh lala, mais qu’il est long ce Chère Daronne, mais que veux-tu, c’était pour la bonne cause.
Allez, je te laisse, je dois aller me doucher, mon mari ne va pas tarder à rentrer,
La bisette,
Ta daronne
Crédit photo image de une : Getty Images
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