Entre 1966 et 1970, 4 500 dispositifs intra-utérins (stérilets) auraient été posés sans consentement sur des femmes et des jeunes filles au Groenland. Un chiffre effroyable qui représente, à l’époque, la moitié de la population féminine en âge d’avoir des enfants sur l’archipel.
Dans Le Monde, on apprend que le gouvernement danois aurait accepté début juin de lancer une enquête sur cet aspect de son passé colonial.
Le contrôle des naissances comme outil colonial
C’est un outil colonial documenté : aux quatre coins du globe, prendre le contrôle de l’utérus des personnes menstruées est un moyen de régulation des populations colonisées ou opprimées. Ainsi, au 20ᵉ siècle, aux États-Unis ou au Canada, un grand nombre de femmes natives américaines auraient été stérilisées de force. À la Réunion, entre les années 60 et 70, des milliers d’avortements et de stérilisation sans consentement sont pratiqués sur des patientes alors que l’IVG est encore interdite sur le territoire hexagonal.
Au Groenland, qui ne deviendra autonome du Danemark qu’en 1979, ce sont les autorités danoises qui imposent le contrôle de la natalité, pour « moderniser » le Groenland. Selon le site d’information High North News :
« L’objectif officiel de la campagne danoise était de faire baisser la natalité au Groenland. Les autorités danoises étaient inquiètes du nombre de naissances d’enfants en dehors du mariage, et de mères en dessous de l’âge de 20 ans. L’augmentation de la population était aussi un frein à la modernisation du Groenland, qui devenait plus chère que ce que l’État danois avait prévu à l’origine. »
Ce fut le cas pour Naja Lyberth, dont le témoignage est cité dans les colonnes du Monde, à l’âge de 14 ans. En 1976, après une visite médicale à l’école, elle et toutes ses camarades de classe sont envoyées à l’hôpital pour se faire poser un stérilet. Leurs parents ne sont pas prévenus, et il leur est impossible de refuser.
Une enquête au sein du gouvernement danois
Après des témoignages de femmes ayant été forcées de porter un stérilet dès leur plus jeune âge, deux journalistes ont décidé d’enquêter au sujet de cette « campagne des stérilets ». Dans un podcast publié en mai, Anne Pilegaard Petersen et Celine Klint reviennent sur cet épisode de l’histoire coloniale du Danemark.
Selon Le Monde, partout au Groenland, la mise en lumière de cette histoire a créé un choc. La députée groenlandaise au Parlement danois, Aki-Matilda Høegh-Dam dénonce un « génocide ». Auprès de différents médias, la parole de celles qui ont subi cette contraception forcée se libère. Dans la presse par exemple, Britta Mortensen explique avoir longtemps gardé le silence par honte. Aujourd’hui, elle affirme qu‘il est temps pour les victimes d’obtenir réparation.
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Crédit photo : Capture d’écran Youtube / Interview de Britta Mortensen pour l’AFP
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
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