Si la rédac’ a pleinement profité de 15 jours de bronzette nos madmoiZelles, elles, n’ont pas chômé !
Une petite annonce avant de vous présenter quelques uns de leurs textes : le thème de la semaine est La poésie et l’argot. Il s’agit de rédiger une poésie (pourquoi pas un sonnet ?) en utilisant le langage populaire et ses expressions. Vous pouvez trouver les consignes pour participer sur cette page, on a vraiment envie de vous lire !
Queen Bitch nous a concocté un superbe texte sur le thème de la semaine passée : Les dieux interviennent. L’objectif était d’imaginer les dieux de l’Antiquité à notre époque, et le texte de Queen Bitch a fait l’unanimité parmi ses lectrices :
Une bière et des pantoufles
J’ai vécu dans l’enchantement. J’ai baisé à peu près quand je voulais et quand il fallait. Je dis fallait, ça paraît bizarre, mais vous verriez la tête de ma bonne femme vous comprendriez de suite. Pis je parle à l’imparfait, c’est pas que je m’en aille casser ma pipe bientôt, loin de là, mais c’est que depuis quelques temps je me suis fait discret, la vieille aussi d’ailleurs. C’est tout juste si on sort faire les courses, de peur de se faire remarquer. On reste chez nous assis sur nos fesses et je peux vous dire que c’était déjà pas la joie à l’époque mais alors là c’est toute la journée, pas moyen d’échapper aux reproches de ma bonne femme. Tout le temps à me ressortir les noms de toutes les gamines que j’ai engrossées dans mon temps, comme si qu’elles avaient pas toutes clamsé depuis belle lurette.
Eh ouais, faites pas ces têtes, je vous avais prévenu. A une époque, à l’époque, suffisait que je voie une jolie poule pour démarrer au quart de tour. Et pis pas moyen de m’arrêter. Oh, elles étaient plutôt pas farouches, rapport à mon statut, voyez. « Roi des dieux », tout de suite, ça impose le respect et ça fait tomber les culottes. Je dis ça, c’était en général, je vous cacherai pas qu’y en a eu qu’ont essayé d’y échapper. Mais aucune n’a réussi, elles passaient toutes à la casserole. C’était le bon temps, quoi.
Et pis, bon, ils ont commencé à devenir sceptiques, les humains. Y a un p’tit malin qu’est allé leur mettre dans la tête que non, y avait qu’un Dieu un seul et que nous bah on était des bobards, des histoires de bonnes femmes. Non seulement ça devenait dur de tirer son coup, mais même les interventions plus « officielles » diront-nous étaient vachement ralenties voire même parfois elles aboutissaient plus. Vous avez pas connu vous mais à une époque, suffisait que je dise ouf pour que les guerres éclatent ou s’achèvent. Et ouais. Pis quand on a vu que tout le monde se mettait à croire un gamin qui prétendait être le fils de l’un de nous mais que personne ne se souvenait d’avoir connu sa mère, on a su qu’il était temps de déguerpir. Je vois plus mes gosses, je suis obligé de supporter ma connasse de femme et ses jérémiades à longueur de journée, chais pas ce que j’ai fait de mal pour mériter ça.
De temps en temps, pour le plaisir, et surtout pour me prouver à moi-même qu’j’en suis encore capable, j’attends que la mère Héra roupille, et je redescends. En général c’est pour chercher une gonzesse, surtout depuis que les mœurs sont devenues plus légères et que j’ai plus besoin de prendre la forme du mari de quelqu’une pour tirer mon coup. Ouais, je sais bien qu’y a les putains, mais j’ai toujours trouvé ça vulgaire de payer pour ça. Donc, je disais, en général je me cherche une gonzesse, mais parfois, quand vraiment je me fais chier et que je suis pris de nostalgie du bon vieux, je m’éclate à déclencher une guerre, comme ça, pour se marrer, quoi. Le problème quand je fais ça c’est qu’en général je me fais pincer par la vieille qui devine tout de suite que c’était moi et je me fais sacrément enguirlander. Elle gueule, elle gueule, c’est surtout parce qu’elle a plus le courage de le faire elle-même. De toute façon je lui dis toujours, on devrait mettre ce monde à la poubelle et en faire un autre, un comme avant, où on nous respecte et tout. Je crois que le chômage la rend flemmarde parce qu’elle soupire et change de sujet mais je vois bien que ses yeux brillent. Un jour, pour la fête de mère, je vais demander aux gamins de s’y mettre. Parce que, bon, j’ai pas que ça à faire non plus, moi.
Apoya vole de ses propres ailes sur le thème de L’escapade :
Ca y est, je vais sortir, je suis rentrée il n’y a pas de raisons que le chemin inverse soit impossible… Voilà le ciel, oh oui voilà le ciel, plus je m’approche et plus j’en aperçois. Mon élément, mon doux élément. Ca bouge en dessous, m’en fous je suis bientôt libre. Tiens il y a même du vert, plusieurs verts, des verts moelleux, des verts profonds. Allez, j’y suis presque, ça valait le coup, je suis comblée, repue, gorgée, rassasiée, il ne faut pas croire les petites vielles amputées, elles voulaient garder cet Eden de sucre, cet orgie culinaire pour elles. Ok, j’ai vu des copines coincées sur une bande, mais elles n’avaient pas l’air malheureuses, la face collé au sucre, je veux dire si c’est mauvais elles font comme nous toutes, elles vont voir ailleurs. Ah, Voilà la sortie. Voilà la sortie. Voilà la sortie. Voilà la sortie. J’ai dit voilà la sortie!
– C’est quand même con une mouche. Ouvre la fenêtre poussin avant que papa dégaine la tapette !
Pour le thème Le penseur de Rodin, Neïa se demande si trop penser ne serait pas mauvais pour la santé ?
Assis, je vois tous ces gens qui défilent devant moi. Qui défilent, me regardent, me scrutent, comme pour trouver tous les défauts de mon corps, comme pour percer mon corps de leur regard curieux. Je les vois, et je pense. Je pense à eux, à ce qu’ils pensent de moi…
Pourquoi me regardez-vous ainsi ?
Est-ce ma nudité qui vous interpelle ? Mes muscles que vous jalousez ? Ou encore ma position qui vous surprend ?
Ne me dites pas que vous ne pensez jamais, vous. Tous les hommes pensent. Ou en tout cas, tous les hommes sont censés penser. Vous faites peut-être partie de ces misérables qui n’ont pas ce don. Pauvre de vous…Depuis combien de temps suis-je assis là ?
A vrai dire, je ne m’en souviens pas moi-même. Je me rappelle qu’un jour -je ne saurai vous ire quand exactement- je marchais tranquillement. C’était à l’aube, il me semble. Et je me suis arrêté, frappé par un phénomène que je n’aurai pu expliquer. Etonné de n’avoir aucune explication, je me suis assis sur une pierre, et j’ai réfléchi. J’ai réfléchi à « quelle est la cause rationnelle de ce phénomène ? ». J’avoue ne plus me souvenir si j’ai trouvé la réponse, cela remonte à si loin…
En tout cas, mon cheminement spirituel a fait son chemin, a pris des sentiers égarés, a rebondi et m’a entrainé vers d’autres sujets de réflexion.
Depuis, je pense. Je pense à tout, je pense continuellement. Je pense que jamais je ne pourrai m’arrêter de penser. J’ai perdu l’habitude de ne plus penser. Et les habitudes, c’est si difficile à perdre…Il faut que je pense à perdre mon habitude.
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