J’ai des poils, tu as des poils, nous avons des poils. C’est un fait, oui, mais ce n’est pas pour autant qu’il est facile de les assumer.
Et encore moins quand on est une femme… De 17 ans !
Parler de ses poils dans le journal du lycée
Il y a quelques semaines, j’ai reçu un mail de Lilas, 17 ans, qui tenait à partager avec les lectrices et lectures de madmoiZelle l’article paru au mois de mars dans le journal de son lycée de Saint-Denis sur l’Île de la Réunion.
Dans ce numéro centré sur les complexes, elle et sa copine Chloé ont décidé de parler ouvertement, photos à l’appui, de leurs poils, et de leur choix de vivre en paix avec eux.
Les accepter, oui, mais pas sans peine ni sans courage ! Parce que non, Chloé et Lilas ne se sont pas réveillées un matin en acceptant complètement leurs poils et le regard des autres sur leurs aisselles…
Comment accepter ses poils
Chloé explique dans l’article :
« En 6ème, quand avec la puberté les poils ont commencé à pointer le bout de leur nez, un garçon m’a posé une question un peu idiote :
— Chloé, pourquoi tu as des poils sous les bras ?
Toute cette année, j’ai eu peur de lever la main en cours lorsque je portais un débardeur. J’ai commencé à m’épiler en 5ème suite à la suggestion de ma mère, et j’ai pu m’affranchir de ce complexe et surtout du regard des autres.
Sauf que je me suis vite rendue compte que s’épiler… Ça fait mal. J’ai malgré cela continué : après tout, la grande majorité des filles le font et arrivent à le supporter, donc pourquoi pas moi ?
Avec mon entrée au lycée et mon emploi du temps plus chargé, je me suis mise à espacer mes rendez-vous chez l’esthéticienne, par manque de temps.
Je laissais mes poils pousser un peu plus avant de m’épiler, et pendant ce temps je participais un peu moins en classe.
Je mettais quand même des shorts ou des robes : les poils sur mes jambes m’ont toujours moins gênée que sous mes aisselles, à cause de cette remarque en 6e qui m’est restée peut-être…
Et puis un jour, en début de Terminale, je me suis rendue compte que je ne m’étais pas épilée depuis au moins un mois et demi.
Ça n’a même pas été une décision consciente au départ : ça s’est juste fait, comme ça. »
Lilas raconte aussi les remarques auxquelles elle a dû faire face :
« J’ai commencé à arrêter de couper mes poils il y a deux ans environ. Ça a commencé par les jambes, moins voyantes et choquantes que les dessous de bras.
Au début c’était assez facile, j’étais tout le temps en jean, il ne faisait pas encore chaud.
C’était la première étape, et rien que pour ça j’ai eu le droit à de nombreuses remarques, questionnements ou juste simples regards de la part de tous et toutes.
— Pourquoi tu fais ça au juste ? — Franchement chez les filles je n’arrive pas à accepter, encore les mecs ouais mais là… — Et ton copain il en pense quoi ? — Mais tu comptes quand même les enlever à un moment non ?
Les gens se donnaient le droit de donner leur avis sur mes poils, comme si je devais écouter leurs conseils.
Quelques mois ont passé, ça pousse… Et puis il fait chaud. Le moment des shorts et des jupes arrive à grands pas.
Après un an j’ai décidé de passer à l’étape ultime : les aisselles. Je l’ai fait petit à petit parce que les jambes ne sont vraiment rien face aux dessous de bras.
Ma technique : retarder de plus en plus le passage du rasoir. Au début quelques jours, puis quelques semaines, puis lorsque j’en avais envie.
Maintenant cela fait plus de deux mois que je n’ai pas ressenti le besoin de toucher à mes poils. Et je me sens bien comme ça. »
Se sentir belle avec ses poils
Dans l’article, Chloé raconte qu’elle a recommencé à s’épiler à cause de la pression des remarques et de son entourage quotidien.
Parce que non, s’épiler n’est pas un problème si c’est par choix personnel et intime, mais ça le devient selon elle
si c’est par pression et par sentiment d’obligation.
« Moi au bout d’un certain temps, j’ai craqué : je me suis de nouveau épilée, à cause de la pression, pas parce que j’en avais envie.
Depuis mes poils ont repoussé, cela ne fait que quelques mois, mais comme j’ai de base une forte pilosité on ne peut plus les manquer.
Il y a toujours certaines insécurités qui remontent à la surface, notamment quand on se rend compte qu‘on est plus poilue que certains garçons…
Mais j‘ai appris à ne plus avoir honte.
Et il y a quelques semaines, le déclic : j’ai appris à trouver mes poils beaux. À me trouver belle, avec et non pas malgré ma pilosité.
À mieux supporter les remarques parce que je sais qu‘au fond, c’est comme ça que je me sens bien, belle, féminine.
Avec mes poils. Et tant pis si ça dérange.
Malheureusement pour les rageux, cela ne regarde en réalité que notre propre personne. C’est une décision que l’on a prise seule, on vit avec seule donc il n’y aucune raison de se permettre de nous faire des remarques là-dessus !
Au bout d’un moment on en a assez des réflexions, des regards choqués dès qu’on lève un bras, de la culpabilité de garder ses poils sachant que son copain n’aime pas ça, d’être épuisée par une simple journée à cause de l’effort mental que ça prend d’encaisser.
Non pas à cause de soi mais des autres, les poils peuvent devenir un complexe. Ils l’ont été pour nous pendant longtemps. »
https://www.youtube.com/watch?v=zRhMXjimCtY
Veet dénonce les remarques qui font complexer dans ce spot de pub.
Se décoincer sur les poils des femmes
Je ne sais pas toi chère lectrice, mais moi j’ai pris une sacré leçon dans les dents à la lecture des mots de Chloé et Lilas !
Moi qui, à 25 ans commence tout juste à assumer mes poils, et qui ne les accepte encore que très difficilement dans ma vie intime…
Au final, pour ces adolescentes, malgré la difficulté des débuts, aujourd’hui vivre avec leurs poils c’est surtout un gain de temps et d’énergie.
Et elles ont aussi profité de cet article dans le journal du lycée pour donner quelques petits conseils à leurs camarades :
« Maintenant, on a compris que ne pas s’épiler procurait des avantages : gagner du temps, de l’argent et surtout ne plus avoir mal.
Cela nous évite aussi le stress du fameux « mince j’ai loupé un endroit » ou de savoir si on aura le temps de s’épiler avant la repousse.
Et au final, les poils, ce n’est pas sale. Il ne faut pas confondre esthétique et hygiène.
Si les poils vous dérangent dans vos critères de beauté, cela ne regarde que vous. Car ils sont utiles au niveau biologique, ils sont là pour une raison.
Voilà, nous avons décidé de vous parler de ce combat quotidien que vivent les femmes. Il ne faut pas oublier que l’épilation, c’est un choix personnel, comme la coupe de ses cheveux ou encore la couleur de ses chaussures.
Vous avez le droit de trouver cela beau ou pas, de demander pourquoi ce choix, mais il est difficile d’écouter des remarques non constructives qui sont trop intrusives.
Donc garder ses yeux pour lire les cours et sa bouche pour participer en classe au lieu de juger les choix des autres vous est conseillé, afin de préserver la liberté de tous et toutes ! »
Les réactions des lycéens aux poils féminins
Après la publication de leurs mots et de leurs photos dans le journal du lycée, Lilas m’explique leur surprise quant aux retours qu’elles ont eu de leur entourage :
« Plusieurs personnes (élèves comme enseignants) qu’on ne connaissait pas particulièrement sont venus nous parler, nous poser des questions ou encore nous féliciter pour notre acte.
Aujourd’hui on est d’ailleurs un peu reconnues comme « les filles à poils » de notre lycée.
Ce qui peut parfois être dur à porter à l’Île de la Réunion, car ici les préjugés et normes en tous genres sont, j’ai l’impression, beaucoup plus ancrés qu’en métropole…
Mais c’est une de nos plus grande fiertés ! D’ailleurs, notre journal a été envoyé au concours académique Médiatiks où il a reçu le prix Coup de Cœur du jury, et il sera envoyé au concours national cette année ! »
Depuis que Lilas m’a écris, le résultats du concours sont sortis : c’est leur article qui a reçu le prix national au concours Médiatiks !
L’article est donc disponible dans son intégralité sur le site officiel du concours si tu veux y jeter un œil.
Et toi, tu en es où dans ta relation avec tes poils ?
À lire aussi : Mes poils, l’été, et moi, la jolie réflexion anti-complexes de Léa Castor — strip et vidéo !
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Les Commentaires
Par contre je trouve ça hypertexte choquant les personnes qui ont des points à la place. On dirait qu'on a arraché des plumes à un poulet. :-(
Comme quoi les normes n'ont pas d'effet sur tout le monde... :-)