Je sais ce que vous en pensez, mais j’trouve qu’on s’énerve un peu trop de nos jours. Tous. Pour pas grand-chose. Pour des trucs importants aussi, hein, mais surtout pour du rien, du vide, des petites choses totalement insignifiantes.
On notera avant toute chose l’ironie d’un tel article qui revient globalement à dire « Arrêtez de dire aux gens d’arrêter de faire des trucs, c’est vilain ! » – gardez bien en tête que j’ai conscience du côté bancal de la chose, mais bon, si on se met à chipoter pour tout aussi…
1. Les tweets météo
Alors certes, si vous n’êtes pas sur Twitter, vous ne connaissez pas ce grand phénomène qui survient dès qu’il neige, pleut, vente, ou caniculise (mais vous attendez quoi pour nous rejoindre sur Twitter, au fait ?!). Mais sachez qu’à chaque fois que la météo fait un truc, même si c’est juste un vague postillon dans une ruelle sombre, beaucoup de gens se sentent OBLIGÉS de le tweeter. Par souci de transparence, autant vous le dire : j’en fais partie. Je déteste la neige, alors chaque hiver, je suis heureuse de pouvoir crier « AAAAAH MAIS MERDE TEMPS DE MERDE MONDE DE MERDE J’EMMERDE LA NEIGE ALLEZ TOUS MOURIR J’SORS PLUS JAMAIS DE CHEZ MOI ». Quand il faut trop chaud, j’adore dire « Je ne suis qu’une flaque visqueuse sur le parquet de la vie, je fonds, aidez-moi ». Ça sert à rien, certes – mais alors là, donnez moi un peu le pourcentage exact de tweets/statuts qui “servent” à quelque chose, qu’on rigole – mais ça soulage.
Et à chaque fois, c’est pareil. Les gens s’énervent pour RIEN. “Putain voilà comme chaque année tout le monde redécouvre la neige”, “OUAIS, ÇA VA, ON SAIT, IL PLEUT, ARRÊTEZ DE FAIRE CHIER MAINTENANT”. Et à chaque fois, je me demande ce qui peut bien les pousser à se faire autant de mal en criant très fort comme ça sur des gens qui n’en ont pas grand chose à foutre. Si on pouvait se détendre un peu du slip et accepter une bonne fois pour toutes que le point météo est inévitable, tout irait beaucoup mieux. Je suis d’ailleurs persuadée que la première discussion orale qui s’est tenue entre deux individus sur cette Terre parlait de météo.
2. Les goûts des gens
Globalement, sans aller dans les extrêmes qui peuvent effectivement faire l’objet de débats intéressants (à tout hasard, les materneuses, par exemple), y a moyen qu’on se lâche un peu la grappe sur pas mal de trucs. Les centres d’intérêt, les petites manies, les passions secrètes, ça fait jamais de mal à personne – au contraire, ça fait même du bien à ceux qui les entretiennent.
Ça veut donc dire arrêter de râler en voyant les gens qui ont le nez collé à leur smartphone dans les transports en commun – tout le monde n’a pas envie de vous regarder dans les yeux ou de fixer une tache étrange sur votre siège, c’est comme ça, et c’est pas grave. Idem pour ceux qui écoutent de la “musique de merde”, personne ne vous oblige à les suivre (sauf quand ils la font partager à fond dans le métro, là, ok, ça mérite éventuellement un coup de barre à mine dans la carotide) et vous perdez une quantité d’énergie totalement ridicule en vous énervant pour des cacahuètes. C’est pas en leur gueulant dessus (derrière votre écran, tant qu’à faire) que vous allez faire “évoluer” (mais quelle prétention) les fans de Justin Bieber ou de Skrillex. Et je dis pas ça parce que j’écoute Bieber ET Skrillex, de temps en temps. Rien à voir.
Après, tout ça, ça vaut pour le style vestimentaire des gens, leur couleur de cheveux, leur passion, leurs obsessions, leurs idoles, leurs séries préférées, et que sais-je encore. Lâchons-nous mutuellement les basques deux minutes, ça nous fera tellement de bien
.
Foutez donc la paix à tous ces gens qui font des choses que vous ne faites pas, que vous détestez, qui vous “dérangent” (la bonne blague) et occupez-vous un peu de vos fesses.
3. Les démonstrations d’amour en public
Ouais alors voilà, un couple se sonde les amygdales à grands coups de langue devant vous, et soudain votre journée est gâchée, c’est ça ? Il faut tweeter, facebooker, textoter votre haine contre cet acte immonde, répugnant, perpétré par ces individus sans aucun sens moral, ni aucune considération pour les pauvres gens (et les célibataires !!!) qui les entourent. Ces salauds. Mais sinon, il existe une autre option : se contenter de se réjouir pour ces deux tourtereaux qui vivent probablement un super moment, qui kiffent la vie, plus que jamais, et qui aimeraient bien qu’on les laisse faire en paix.
Ouais, ok, niveau pudeur, y a peut-être quelques progrès à faire, mais on est pas réputés pour être super malins quand on tombe amoureux, j’vous rappelle. Niveau réflexion, ça s’arrête quelque part entre “Hihihihihi” et “Baiserbaiserbaiser” – faudrait voir à pas trop leur en demander.
La vie est belle, les oiseaux chantent, les amoureux se bavent dessus/dedans, c’est le cycle éternel, tout ça.
4. Les gens qui se la pètent
Il se trouve qu’il est très mal vu de se vanter, chez nous. Pourquoi, comment, d’où ça vient, ça, j’en sais foutre rien, mais c’est le cas. Vantez-vous d’un truc que vous avez accompli, de votre superbe apparence, ou de vos multiples talents et vous serez virtuellement lapidés, envoyés en exil et boudés par tout le monde.
Mais aujourd’hui j’en suis arrivée à me dire qu’on devrait tous se lâcher un peu sur l’auto-congratulation. On devrait pouvoir parler de nos talents, de nos qualités, de tout ce qu’on aime chez nous, tout ce qui nous rend fier, sans avoir peur de passer pour un monstre de prétention. On devrait pouvoir admettre tout ça sans en rougir, sans bafouiller, sans tenter de minimiser un peu notre propos façon « Oui enfin bon, je suis pas non plus au top quoi mais je me démerde pas trop mal enfin j’essaye quoi j’me démerde mais j’suis assez contente, bon c’est toujours perfectible hein mais… », parce que ça pue ça.
On devrait d’abord se réjouir pour ceux qui ont l’honnêteté d’admettre qu’ils se trouvent plutôt cool, au lieu de vouloir à tout prix les “remettre à leur place”. Y a pas d’mal à se faire du bien, ni à laisser les autres s’en faire aussi. Faites donc une petite liste de tout ce que vous savez super bien faire, de tout ce que vous trouvez sympa chez vous, et apprenez à dire quelques petites douceurs à voix haute de temps en temps. Même devant des gens, si si.
5. Les gens, dehors, dans le monde réel
Alors ouais, je sais, je prends le métro matin et soir, je suis Parisienne de naissance, j’ai passé quasi 24 piges dans la capitale de la mauvaise humeur (hahaha laissez-moi rire), donc croyez-moi quand je vous dis que JE SAIS à quel point les gens peuvent être énervants. Dans les transports en commun, dans les couloirs du métro, dans la rue, dans les magasins… on se marche dessus, on se bouscule, on se jette des regards noirs, on se toise, on s’embrouille – souvent pour rien.
À chaque fois que je rentre chez moi après une journée passée dans le monde réel (pouah !), je suis épuisée. J’ai râlé contre les gens qui prenaient toute la place sur le trottoir, j’ai mis un coup d’épaule au mec qui voulait pas me laisser sortir du métro, j’ai soupiré dans la queue du supermarché parce qu’une femme mettait vingt ans à sortir sa thune, j’ai gueulé contre un conducteur qui a manqué de me renverser… Bref, je suis vidée, laminée, lassée, et je n’ai qu’une envie : m’enfermer chez moi et ne plus jamais ressortir.
Du coup j’oublie le reste. Les petites blagues à la con échangées chaque jour avec le personnel du Carrefour Market, le « Bonjour » tout sourire de la femme qui tient ma rôtisserie préférée, le petit garçon qui a joué à cache-cache avec moi, bien installé dans sa pousette, le tout-petit-chien qui m’a sauté dessus pour dire bonjour ou la jeune maman dont j’ai porté les sacs dans les escaliers du métro. J’oublie que ça aussi, ça arrive, tous les jours. Que j’énerve moi-même beaucoup (trop) de monde encore. Qu’ils ont leurs soucis, leurs emmerdes, leurs chagrins, leurs mauvais jours – comme moi. Et pour quelqu’un qui exprime très fort ses émotions, qu’elles soient positives ou négatives, je me trouve bien prétentieuse de vouloir que tout le monde ferme sa gueule pour me laisser vivre.
Alors quand on se bouscule un peu, qu’on se chauffe pour un rien, j’essaye, tant que je peux, de rétablir l’équilibre en souriant, en m’excusant, en pardonnant plus facilement que d’habitude. Et je rentre vachement moins fatiguée.
Sur ces paroles de hippie des bois, je vous laisse, faut que j’aille crier mon amour au monde.
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires
Je dis de nos jours, mais je sais pas comment c'était avant hein ! Peut-être que les gens s'envoyaient des fleurs dès qu'ils se voyaient .... ou peut-être pas !
J'ai aussi cette tendance à la râlerie parfois, mais j'arrive à me botter les fesses moi-même (enfin pour de faux ) en me disant que oui, moi aussi je saoule tout le monde avec ma putain de valise dans le métro !
Juste une remarque à propos des tweets-météo :
Je n'ai pas tweeter, mais j'imagine très bien le phénomène ... et ça me fait penser aux quelques semaines que j'ai passées dans une famille en Irlande. Je prenais ça pour un préjugé, mais sur les îles britanniques (Irlande et RU confondus), il FAUT avoir parlé de la météo avant de pouvoir commencer un dialogue, un vrai ! Impossible autrement ! C'est assez ridicule d'ailleurs, mais TOUTES les discussions commencent par ça. Une manière de se mettre d'accord sur ce ciel de merde avant de passer à des choses plus intéressantes