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Vie quotidienne

Pourquoi je n’arrive pas à arrêter de boire — Carnets de sobriété #2

Clémence vous offre le deuxième épisode de ses Carnets de Sobriété, où elle continue son introspection et les raisons qui l’empêchent d’arrêter de boire.

Je n’ai pas peur de l’échec, mais je déteste ça. Aussi, quand j’ai constaté que mes diverses tentatives d’arrêter l’alcool se soldaient par de cuisants échecs en moins d’une semaine, j’en ai conclu que je n’y mettais simplement pas assez de volonté.

C’était plus facile et beaucoup plus rassurant que d’analyser les raisons pour lesquelles la sobriété s’avérait être un objectif bien plus difficile à atteindre qu’initialement estimé.

À lire aussi : Suis-je alcoolique ? — Carnets de sobriété #1

La pression sociale

Ma principale intuition était correcte : puisque ma consommation d’alcool était essentiellement sociale, le principal obstacle à ma sobriété était la pression sociale.

À lire aussi : Je n’aime pas l’alcool, et ça me regarde, bon sang !

Mais puisque je ne me considère pas comme une personne influençable, j’ai mis longtemps à admettre que si, je me laissais totalement entraîner par le groupe, et que je pliais très facilement devant la peur (réelle ou fantasmée) du

jugement des autres.

Il aurait fallu que je dise ouvertement à ma bonne compagnie : je ne bois pas. Il y aurait sans doute eu des questions, peut-être même un froid jeté sur la tablée, je ne sais pas, puisque je n’ai jamais eu le courage de tous les affronter pour leur dire : je veux arrêter de boire. Et je vais commencer ce soir, en fait. Donc ce sera neuf pintes, et un Perrier rondelle pour moi, s’il vous plaît.

J’aurais dû assumer mon choix, mon envie, mon objectif. Sans ça, j’avais aucune chance.

À lire aussi : J’assume… de ne pas tout assumer — La leçon de la semaine, par Sophie Riche

Au lieu de ça, je tournais autour du pot « hmm, y a quoi, je peux voir la carte ? » et le serveur parisien d’énumérer rapidement et à la limite de l’agacement la liste des bières pression et des cocktails maison. J’attrape un « sinon y a les softs » au passage, et j’ose même plus demander « lesquels » que mes ami•es ont déjà passé commande.

Et je ne vais pas prendre un Coca, je ne bois pas de gazeux ni de sucré.

Et ben Clémence, t’es malade ? Haha, non non, je suis juste un peu fatiguée, et j’ai une grosse journée demain… Ah toi aussi… Allez oui, bon mais juste un demi, alors !

Sauf que je ne me suis jamais arrêtée à « juste un demi ». Et je le sais.

L’illusion du coût

En happy hour, dans ce bar, c’est 3,30€ la pinte… et 3,50€ le Perrier !

Ma deuxième « excuse » m’est apparue quand j’ai commencé à examiner mes options « sans alcool » dans les terrasses parisiennes. Non mais vous avez vu les prix ? En happy hour, dans ce bar, c’est 3,30€ la pinte… et 3,50€ le Perrier ! Les softs sont à 4€ et plus, les cocktails sans alcool sont à quelques euros de moins que leurs alter-ego… 5€ le citron-pressé, pour 5cl de jus et une carafe d’eau… Bordel Paris, je veux bien faire des efforts, mais aide-moi un peu, aussi.

À côté de ça, des crus dont je connais bien les cépages me font de l’oeil à 4€ le verre. Juste un verre, qui me durera une bonne heure, si je le déguste lentement (tandis que le citron pressé, je vais le descendre en dix minutes, c’est sûr).

Et le demi, parlons-en ! Quand la pinte n’est pas quasiment donnée en happy hour, il y a toujours la petite soeur, parfois même à moins de 3€ ! Pour 25cl de boisson fraîche et doucement amère…

La différence de prix n’est pas folle entre un verre de Chardonnay et un citron pressé, ni entre le demi et le Perrier, mais en termes de qualité, y a pas photo. En soi, 3,50€, c’est pas cher. Mais 3,50€ pour un verre de Perrier et une rondelle de citron quand la bouteille est à moins de 2€ ! Ne me prends pas pour une dinde, Paris. (Mais c’est pareil en province, cela dit…)

Quitte à débourser 4€ pour papoter en terrasse avec une copine, je préfèrerais que ce soit en savourant un bon rouge plutôt qu’en buvant de l’eau gazeuse à la paille. Pour le même prix, c’est vraiment pas la même qualité.

Sauf que j’ai jamais arrêté une addition à un seul verre. Et je le sais.

La désinhibition, ou le coeur de l’addiction

Au fond, j’avais pas tout à fait tort, avec mon diagnostic de manque de volonté. Les deux premières excuses auraient pu sauter assez facilement, si j’y avais mis du coeur. Mais en creusant suffisamment mon année entière d’échecs, j’ai fini par déterrer une troisième raison, et finalement toucher au coeur du problème.

J’ai jamais abusé de l’alcool jusqu’à perdre la mémoire, mais j’aime la sensation que me procure le deux ou troisième verre.

L’alcool désinhibe, et j’aime cette sensation. Il y a belle lurette que je ne bois plus au point de me rendre malade, et mes quelques cuites mémorables ont souvent été des accidents.

J’ai jamais abusé de l’alcool jusqu’à perdre la mémoire, mais j’aime la sensation que me procure le deux ou troisième verre, quand mon esprit ralentit, que mes mots se mélangent, et quand tout me fait rire encore plus vite et encore plus fort que d’habitude.

J’ai pratiquement écrit tout un roman sous l’influence de l’alcool : j’adore écrire dans les bars. J’adore l’atmosphère des pubs, et je ne vais pas dans un pub pour boire un thé vert, surtout quand il y a une ambrée à la pression.

J’aime l’état de détente profond dans lequel l’alcool m’emporte, malgré le prix à payer le lendemain. Mais comme je n’abuse pas, j’ai la sensation de toujours sortir gagnante de ce dilemme. Boire un à trois verres les soirs où je sors ne m’a jamais empêchée d’être fraîche et productive le lendemain.

Tout juste à sauter ma séance de sport matinale si on est plus proche du trois que du un, mais c’est un moindre mal… J’irais le soir, sauf si je sors encore, et que je me remets à boire…

Finalement, j’avais ma réponse. Je ne suis pas alcoolique, je ne suis pas accroc à l’alcool… Mais j’aime trop la sensation qu’il me procure pour pouvoir m’en passer. Cette addiction ne m’empêche pas d’avoir une vie normale et n’a pas d’incidence sur mon travail, donc ce n’est pas une maladie… Mais c’est bien une addiction, vu que je ne veux pas — ne peux pas ? m’en passer.

Quand j’ai compris ça, je suis allée chercher l’aide d’une psy. Si j’ai une addiction, c’est que j’ai peut-être quelque chose à compenser, à « soigner », que je cache derrière ce besoin de désinhibition forcée.

Une année entière d’échecs, c’était finalement assez pour que je réalise une chose : si je n’arrivais pas à arrêter de boire toute seule, c’est que j’avais peut-être besoin d’aide.

Lisez la suite : Comment j’ai arrêté de boire – Carnets de Sobriété #3

Si vous sentez que vous perdez le contrôle de votre consommation, n’hésitez pas et prenez contact avec un centre d’alcoologie.

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Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.

Les Commentaires

80
Avatar de Dan-ge
4 décembre 2016 à 20h12
Dan-ge
Bonsoir, je partage cet article que j'ai lu il y a quelques mois sur le rapport des femmes a l'alcool et ou je me suis reconnue (par contre c'est en anglais)

Giving up alcohol opened my eyes to the infuriating truth about why women drink

http://qz.com/762868/giving-up-alco...-the-infuriating-truth-about-why-women-drink/

"Is it really that hard, being a First World woman? Is it really so tough to have the career and the spouse and the pets and the herb garden and the core strengthening and the oh-I-just-woke-up-like-this makeup and the face injections and the Uber driver who might possibly be a rapist? Is it so hard to work ten hours for your rightful 77% of a salary, walk home past a drunk who invites you to suck his cock, and turn on the TV to hear the men who run this country talk about protecting you from abortion regret by forcing you to grow children inside your body?"
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