La série noire continue pour la CIIVISE. Moins de deux mois après la nomination par la ministre déléguée chargée de l’Enfance, de la Jeunesse et des Familles Sarah El Haïry, la nouvelle présidence de la commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants est à nouveau dans la tourmente.
Jeudi 23 mai, dans la soirée, l’ancien député de l’Eure Bruno Questel a été contraint de quitter la présidence collégiale de la CIIVISE, qu’il partageait avec le pédopsychiatre Thierry Baudet, la présidente de la fédération France Victimes Maryse le Men Régnier et la présidente de l’association Face à l’inceste Solène Podevin Favre.
Cette décision fait suite à la parution, dans Le Courrier de l’Eure, d’un article sur le procès en première instance d’un homme accusé d’agression sexuelle sur sa fille adolescente, depuis condamné à dix mois d’emprisonnement avec sursis. Ce dernier était défendu par Bruno Questel, qui aurait déclaré durant l’audience :
« J’ai accepté d’assurer sa défense car je ne sais pas. On ne sait pas ce qui s’est exactement passé. Ce qui est sûr, c’est qu’il est meurtri et en souffrance et qu’il est très malheureux de ne pas voir ses enfants. S’il a commis une faute, c’est d’avoir dormi avec sa fille. »
Bruno Questel est même allé plus loin, en déclarant dans un entretien accordé au Courrier de l’Eure qu’il avait « l’intime conviction » que son client, qu’il « connaît depuis longtemps », « n’était pas coupable ». « Il m’avait sollicité avant que je sois dans la Ciivise. L’une des règles de la profession d’avocat est que quand on s’engage à défendre quelqu’un on va jusque bout. »
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La CIIVISE et les associations se désolidarisent
Des propos inacceptables, pour d’anciens membres de la CIIVISE, mais aussi pour des associations de défense des droits des victimes de violences sexuelles. Sur X, l’activiste des droits des enfants Arnaud Gallais, et membre démissionnaire de la CIIVISE, a dénoncé « des propos scandaleux ».
Les associations Face à l’inceste, l’Enfant Bleu se sont aussi désolidarisées des propos de l’ancien député de l’Eure, lui-même victime d’inceste à l’âge de 11 ans, en rappelant qu’elles se positionneraient toujours du côté des victimes.
L’Enfant Bleu a par ailleurs annoncé se retirer de la Commission contre l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants.
Face à la colère provoquée par de tels propos, Bruno Questel a fini par annoncer jeudi dans la soirée sa démission de la CIIVISE, avant de supprimer son message. L’instance a, dans la foulée, publié un communiqué établissant le départ de Bruno Questel de sa présidence et annoncé qu’elle poursuivait ses travaux « guidée par l’intérêt supérieur de l’enfant ».
Mais la CIIVISE pourra-t-elle vraiment poursuivre sereinement sa mission, qui est de lutter contre les violences sexuelles faites aux enfants ? Déjà ébranlée par l’éviction de sa première présidence, dont le juge des enfants Édouard Durand fin 2023, la commission avait dû essuyer en février les démissions en cascade de ses deux nouveaux présidents, Sébastien Boueilh, co-fondateur de l’association Colosse aux pieds d’argile, et la pédiatre et légiste Caroline Rey-Salmon. Cette dernière a depuis fait l’objet d’une plainte pour agression sexuelle.
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Les Commentaires
Même pour sa propre histoire, il a du mal à avoir du recul et les avocats ont souvent de très fortes convictions. Quand ils ont un client, coupable ou non, ils le défendront jusqu'au bout.
Mais un tel échec est incroyable face à l'énorme travail de cette commission du temps de Durand.