Je suis une femme de contradictions.
Putain, incroyable. J’allais faire un article totalement différent, sur un autre sujet, puis écrire cette phrase en intro m’a donné envie d’en écrire un sur une thématique qui n’a rien à voir.
J’ai écrit « je suis une femme » naturellement. Spontanément.
Et ça paraît logique, parce que je suis de genre et de sexe féminins, que j’ai 28 ans, mais ça m’a pris tellement de temps. Parce qu’avant, ce mot, ce « femme », c’est comme si je me le refusais. Pour parler de moi, je disais « fille ».
Annalise Keating, toujours aussi saoulée par mes conneries.
« Je suis une fille comme ça », « je suis pas une fille comme ça », ce genre de trucs. Parfois, je réalisais que, bon, je commençais à plus tellement être en âge de parler de moi comme d’une fille alors je disais « meuf ». Mais « femme », jamais.
Parfois, je réalisais que je commençais à plus tellement être en âge de parler de moi comme d’une fille, alors je disais « meuf ».
Je sais pas ce qui a changé, je sais pas si à un moment j’ai éternué quatre fois de suite un soir de pleine lune et que le sort a été conjuré, mais j’ai fini, y a quelques mois, par comprendre que le mot n’était pas réservé qu’aux autres et que j’avais moi aussi le droit de l’utiliser.
Qu’est-ce que ça change de se considérer comme une femme ?
Et alors là on pourrait s’imaginer, si on était dans un film des années 80, que d’un coup j’avais eu le déclic. Que ma vie avait changé du tout au tout.
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Que soudainement, mes mouvements étaient plus lascifs, que je me mettais à avoir une tête à chapeau et que ma voix est devenue grave et suave telle celle de Fanny Ardant.
Fanny Ardant me défiant bien de la tester.
Eh bah en fait, je te le donne en mille : ça a changé que dalle. Parce que j’avais déjà le quotidien d’une femme, en vrai, vu que la vie c’est pas comme les clichés.
Et surtout parce que je me sentais déjà comme telle. Dans ma tête, dans mon corps, dans mon palpitant (tiens « cœur », c’est un mot que j’ose toujours pas associer à moi, je sais pas pourquoi. Peut-être que je le trouve trop niais ? Mais ce serait un peu bête, c’est juste un organe).
Je ne me sens jamais femme dans les vêtements que je porte mais dans mon attitude, définitivement. Et les moments où j’embrasse le plus ma féminité, c’est pas quand je surprends des regards sur moi ou quand on me dit que je sens bon, c’est quand je participe à un élan de solidarité entre femmes.
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La peur de dire femme et l’angoisse d’être adulte
Je pense qu’au-delà de ça, c’est encore plus la peur d’être adulte qui me berçait dans ses bras qui sentent le Mustela. Pourtant c’est pareil : adulte, je l’étais, de bout en bout, du lever au couchant.
Adulte et femme. C’est comme si c’était une sorte de Graal, une dénomination intouchable, un terme à pas trop salir. Bullshit, ouais. Oui, même si je pleure de rire en regardant la vidéo d’une femme qui se sert des testicules de son mec comme d’un beauty blender, j’en suis pas moins femme.
Adulte et femme. C’est comme si c’était une sorte de Graal, une dénomination intouchable, un terme à pas trop salir.
Je suis adulte quand je relis et signe des contrats professionnels, même quand je fais ça avachie sur le canapé en écoutant une version karaoké de Je te survirai de Jean-Pierre François. Bon, je suis pas super digne. Mais être adulte ça veut pas dire être digne tout le temps, à ce que je sache.
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D’ailleurs, je vais vérifier selon la définition officielle :
« Qui est parvenu au terme de sa croissance, à son plein développement. »
Bon ensuite y a aussi :
« Qui fait preuve d’équilibre, de maturité (par opposition à infantile) : Un comportement adulte. »
Mais à ce que je sache, être avachie + écouter du Jean-Pierre François, ça s’équilibre plutôt pas mal avec le fait de relire un contrat professionnel, non ? AH !
C’est marrant parce que j’ai toujours pensé qu’il n’y avait pas une façon d’être adulte — je suis pas obligée de manger des salsifis en buvant du bon vin et en écoutant France Inter.
J’ai toujours été partisane du principe qu’il n’y avait pas non plus une manière d’être femme, mais qu’il y avait autant de façons d’être femme que de gens qui se sentaient femme. Toujours. Pourtant, quand il s’agissait de moi, bah c’était pas pareil. Et c’est complètement con.
Être une femme : se réapproprier les concepts
C’est bien gentil d’être hyper ouverte d’esprit pour les autres (pour moi, c’est même la base de la politesse mais passons) mais faut savoir balayer devant sa porte. Eh, y a quand même pas de mal à utiliser ses certitudes pour soi aussi.
Et je pense que ça a encore plus de force et d’impact si on y croit pour soi aussi.
Parce qu’il faut désacraliser l’idée qu’on se fait de la vie d’adulte, de la vie de femme. Mais aussi désacraliser les concepts pour se les approprier.
Moi et mes gow, tut tut en avant Philibert, vers la réappropriation des concepts complexants.
Finalement, ça devrait pas être si compliqué. Viens, on tente le coup !
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Les Commentaires
Il y a 2-3 ans de Ca, ma nièce me demande "Tatie, est ce que T es une fille?"
"Ben non je suis un garçon (banane)" que je lui dis!
"Mais non pas Comme Ca! Est ce que T es une fille... Ou une dame?" Qu elle me dit (!) L'est perspicace la gamine! (5-6 ans à L'époque!)
Alors là je me marre et je lui dis "Ecoute, Tatie elle même ne le sait pas vraiment... Qu est ce que T en penses toi?"
Et Apres quelques secondes de réflexion, elle me sort "Mmmm... Je pense que tu es une jeune dame."
Ou comment ma nièce répond à mes questionnements existentiels