Elle assure n’avoir « vraiment aucun désir de distinction« , mais on aime la présence de cet Ovni féministe dans cette institution vieille de 121 qu’est le prix Nobel. Comme prévu, Annie Ernaux recevra, samedi 10 décembre, à Stockholm, le prix Nobel de la littérature. Si l’écrivaine de 82 ans n’a jamais émis de doute sur le fait d’accepter cette prestigieuse récompense, cela ne l’empêche pas d’avoir un avis critique sur ce qui entoure son attribution. Fidèle à ses valeurs féministes, qui ont nourri ses œuvres pendant 40 ans et qui lui valent aujourd’hui cette grande distinction, elle a confié à l’AFP que le Prix Nobel était une institution faite « pour les hommes« , et a suggéré quelques changements.
Pouvoir, faste et tradition
« Cela se manifeste par ce goût d’une tradition, dans les costumes. Il me semble que l’attachement aux traditions, c’est peut-être plus masculin, au fond, on se transmet le pouvoir comme ça« , a déclaré Annie Ernaux au sujet du prix Nobel. Il faut dire que depuis sa création en 1901, les lauréats de cette récompense sont en immense majorité des hommes. L’autrice du chef-d’œuvre Les Années (2008) n’est en effet que la 17e femme à recevoir un prix Nobel, sur 838 personnes récompensées au total.
Outre l’aspect très patriarcal du Nobel, Annie Ernaux a également proposé d’en faire un peu moins sur le côté strass et paillettes qui accompagne la remise des prix. « Est-ce qu’on peut imaginer qu’il y ait moins de faste, moins de robes longues et de queues de pie ?« , a-t-elle suggéré. En effet, chaque année, la cérémonie de remise des prix a lieu au Konserthuset, la salle de concert de Stockholm, où environ 1300 personnes sont conviées. Un grand banquet est ensuite organisé à l’Hôtel de ville, auquel il est inutile de préciser qu’une tenue plus que correcte est exigée. L’année dernière, et ce, malgré les ajustements apportés à la réception en raison du Covid, même la famille royale suédoise était présente.
Un discours croustillant ?
Enfin, il y a quelque chose de plus savoureux encore que le fait de voir Annie Ernaux recevoir le prix Nobel de littérature, c’est son discours. « La parole a quand même été monopolisée presque toujours par les hommes et j’ai remarqué que les femmes sont souvent moins prolixes dans leur discours que les hommes, sachant bien qu’elles sont plus pratiques« , a noté l’écrivaine. Qu’en sera-t-il du sien ? Invitée du micro de France Inter, vendredi 7 octobre, elle avait alors déclaré ne pas avoir encore en tête ce qu’elle allait dire lors du traditionnel discours prononcé par chaque lauréat. « Mais je sais une chose, avait-elle ajouté, c’est que, bien entendu, ce sera un discours, allez, engagé.«
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Crédit photo de Une : Annie Ernaux sur le plateau télé de La grande librairie © Capture d’écran YouTube
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