Sur la table au milieu de la rédac, on trouve de tout.
Des bonbons, un cahier de gratitude, le sel pas débarrassé du déjeuner, des mots d’amour des lectrices… et puis, de temps à autres, des livres.
Amours Solitaires, une histoire d’amour délicate
Ce matin-là, la tête dans le coton et dans le café, je suis tombée sur un exemplaire d’Amours Solitaires, la première pépite de Morgane Ortin, la créatrice du compte Instagram éponyme.
Intriguée par le titre, j’ai feuilleté l’ouvrage et en le parcourant, c’est son format qui a attiré mon attention.
Pas de paragraphes, pas de dialogues : juste une suite de bulles reproduisant les textos qui emplissent nos téléphones.
Alors que je plonge dans la préface de Morgane Ortin, je saisis l’équilibre risqué dans lequel son projet s’est lancé :
« Il y a deux ans, je suis tombée très amoureuse. Mon téléphone était devenu le paradis caché de mes échanges passionnés, ceux qu’il serait dommage d’oublier. […]
Amoureuse éperdue de l’amour, je voulais, en créant le compte Instagram @Amours_Solitaires, rassembler tous les beaux mots de l’amour en un seul lieu.
Un lieu numérique où l’on pourrait se souvenir pour toujours des mots qui ont compté. Je voulais montrer que la sensibilité n’est pas une faiblesse et que l’expression du sentiment est constitutive de notre humanité. »
Il aura suffi d’une pause déjeuner pour que je dévore l’histoire d’amour de ces deux anonymes dont les sentiments résonnent au fond de nous toutes, tant leur intime est universel.
Amours Solitaires et mon romantisme 2.0
Le romantisme, j’y ai surtout été confrontée au lycée, à travers les relations épistolaires des Liaisons dangereuses et les échanges d’Oscar Wilde avec Bosie qui ont inspiré de sulfureux courriers avec mon premier amour breton.
Savoir bien écrire l’amour, quelle sagesse. Savoir bien décrire l’amour, quelle puissance du cœur !
J’ai ressenti les plus belles émotions en couchant sur papier les mouvements de mes émotions et en lisant ceux de mes partenaires.
Puis Messenger et les applis de rencontre sont arrivées, et avec, de nouvelles règles de badinage, plus rapides, plus spontanées, mais aussi plus ardues : avec les texto et les MP, pas de droit à l’erreur.
Envoyés en l’espace de quelques secondes, certains messages laissent peu de place au temps et au développement de la pensée.
Et avec ces supports, de nouveaux défis, de nouvelles angoisses. Comment gérer les silences, les notifications incessantes, les « Vu » sans réponse ?
« La lettre n’est pas morte : elle a évolué avec les nouveaux supports que nous offre la technologie. » (Morgane Ortin, Amours Solitaires)
Dans nos échanges virtuels, la moindre erreur me trahit et j’en viens à renverser les codes du langage pour mieux me faire comprendre.
Tous les jours, je résiste à la tentation d’insérer des emoji qui témoignent plus rapidement de mon état que de longues phrases dont la ponctuation est parfois trop sèche.
Qui n’a jamais flippé en recevant un message conclu par un « . » cinglant ?
Certains commentateurs se sont étonnés des pages « vides » qui parsèment Amours Solitaires les jours de silence radio entre les deux protagonistes.
Mais par ce choix éditorial, Morgane rappelle que les silences sont partie intégrante de l’amour et qu’ils peuvent être un choix. Le choix de ralentir, de prendre le temps de ressentir, de prendre du recul.
Je suis romantique (mais poucave pas stp)
« Amoureuse de l’amour. »
Cette idée m’a trotté dans la tête pendant un moment avant que je ne saisisse pourquoi elle m’obsédait.
« Depuis de trop nombreuses années, le sentiment amoureux est tombé en désuétude. On le dénigre, le laisse sur le bas-côté, on le moque, le jugeant trop fleur bleue, trop fragile, trop ringard.
« Fuis-moi, je te suis, suis-moi, je te fuis ».
Ce que prône ce dicton, c’est le fait de masquer ses sentiments et d’adopter une attitude d’indifférence totalement contradictoire à ce que l’on ressent intérieurement pour séduire, plaire et garder près de soi l’être aimé. »
Morgane Ortin, Amours Solitaires
Là.
Morgane Ortin venait de réveiller un sentiment qui sommeillait en moi. Depuis plus de dix ans, je ne m’étais pas permis de penser l’amour et de parler d’amour.
Une fois la période de séduction passée, entrainée dans le quotidien de mes relations, j’enchaînais les attentions mais j’exprimais peu le feu qui brûlait au fond de mon bide, la chaleur qui encerclait mon cœur quand j’étais avec celui que j’aimais.
Il existe mille manières d’exprimer son amour. D’ailleurs, Nina Luka l’explique parfaitement dans une de ses vidéos : niveau expression de nos sentiments, nous ne sommes pas toutes logées à la même enseigne.
Certaines aiment dire et entendre « Je t’aime », d’autres témoignent leur attachement par des attentions, ou encore par des gestes.
Avec le temps, j’ai développé une relation d’amour-haine au romantisme que je trouve tantôt vulgaire, tantôt fin, tantôt maladroit, tantôt original, tantôt touchant, tantôt commercial.
Plus jeune, j’ai bouffé du Marc Levy, du Katherine Pancol ou du Éric-Emmanuel Schmitt et ils ont façonné mon image du couple, de l’expression des sentiments et de l’amour.
J’ai lu ici que Levy était un auteur niais, que Pancol était naïve, que Schmitt était trop commercial.
J’ai commencé à culpabiliser et à avoir honte de cette culture de l’amour que la société jugeait comme cucul, trop fleur bleue, trop bête. Trop.
Même sur YouTube, mes vidéastes préférés (dont Marion Seclin, ma star) ont commencé à me dire qu’exprimer son attachement intense à l’autre, c’était franchement gênant pour tout le monde-omg-please-don’t.
Alors je l’ai étouffée, cette part de moi qui veut de la passion, qui l’exprime au grand jour, qui dit « je t’aime » sans rougir.
Être romantique, c’est avant tout s’écouter
Amours Solitaires est sans doute le plus beau livre d’amour que j’ai lu ces 10 dernières années.
Parce qu’il raconte les histoires de centaines de cœurs solitaires qui se sont trouvés, croisés, séparés, avec modernité et authenticité.
Parce qu’il nous autorise à nous écouter, nous, avant d’écouter les autres, pour mieux nous aimer.
Parce qu’il lève le tabou du romantisme et prône avec force le droit d’exprimer ses émotions.
Parce qu’il montre nos vulnérabilités, nos peurs, nos faiblesses dès lors que le cœur est à vif.
Mais c’est aussi un livre incontournable en ceci qu’il vient aussi (surtout ?) décomplexer les mecs qui n’osent pas exprimer leurs sentiments.
« Longtemps, l’histoire nous a laissé entendre que la sensibilité était une caractéristique féminine. On s’imaginait que seules les femmes étaient capables de s’émouvoir, de souffrir d’amour, d’être mélancoliques.
À l’inverse, le désir a longtemps été pensé comme une pulsion masculine : seuls les hommes pouvaient ressentir et exprimer du désir, utiliser des mots crus, alors que c’est faux ! »
Morgane Ortin, Amours Solitaires
Il y a là de quoi éviter des guerres, tu ne crois pas ?
Dans les messages anonymes du compte Instagram @Amours_Solitaires, seuls des indices grammaticaux trahissent parfois le genre des amoureux ou amoureuses.
Elle est peut-être là, la modernité ultime : considérer qu’au delà des genres, finalement, nous ne sommes que des humains en quête d’amour.
Et toi, es-tu amoureuse de l’amour ?
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires
Comme je lui ai dit un jours : son compte est un endroit plein d'amour où on peut se confier sans peur de jugement, ni haine. C'est un des rare endroit d'Internet consacré à l'amour et la compréhension sans rien attendre d'autre !
Bref moi j'aime l'amour donc j'aime énormément amour solitaire ! De plus On ne peut pas rêver mieux que Morgane comme gardienne de l'amour, étant elle même une personne remplie d'amour et de compassion ❤❤