Si vous aviez été une petite souris cachée dans mon appartement il y a dix jours (ce qui aurait été un peu inquiétant et très anti-hygiénique, mais je vous rassure, je n’ai pas de rongeurs chez moi), vous auriez pu me voir sourire bêtement de joie en lisant les journaux : Amin Maalouf faisait son entrée à l’Académie Française, au sein de laquelle il avait été élu en 2011, à la place de feu Claude Lévi-Strauss. Et moi, j’aime bien Amin Maalouf, je l’aime beaucoup, je l’aime d’amour littéraire comme seul-e un-e féru-e de bouquins peut aimer un-e écrivain-e. Collez-moi un de ses bouquins entre les mains et oubliez-moi, je serai partie en Orient, assise sous un oranger en fleurs, à croquer dattes, amandes, gâteaux au miel et mouton grillé à la coriandre.
Pendant longtemps, Amin Maalouf, dans mon esprit c’était un auteur « pour mon Papa » ou « pour ma Maman ». Un Orientaliste qui avait l’air bien intéressant, mais dont les romans historiques me semblaient bien plus à leur place dans les mains de mon paternel sur son hamac en plein été que dans mon sac d’étudiante plongée dans ses Stephen King. Un jour, prise d’un élan de « J’ai plus rien à liiiiiiire je m’ennuiiiiie« , j’ai pioché Samarcande dans la bibliothèque parentale. Et là, boum, la claque, l’amour, l’évasion, la totale.
Amin Maalouf a vécu plus de 25 ans au Liban, son pays natal, avant de le quitter à cause de la guerre en 1976. Il arrive avec sa famille en France, son intégration étant facilitée par la francophonie de sa mère et sa passion pour la littérature française. Il devient rapidement le rédacteur en chef de Jeune Afrique mais devra attendre 1983 pour que son premier essai, Les Croisades vues par les Arabes, soit publié et connaisse le succès en présentant les guerres religieuses du XIème, XIIème et XIIIème siècle du point de vue oriental, en se basant sur les très sérieux travaux des chroniqueurs arabes de l’époque. Il deviendra réellement populaire trois ans plus tard avec Léon l’Africain
, une biographie romancée du diplomate et écrivain arabo-andalou Hassan el-Wazzan, et recevra le prix Goncourt pour son cinquième roman, Les Rochers de Tanios, en 1993.
Son oeuvre majeure reste, à mes yeux, Samarcande, paru en 1988, qui nous fait voyager à travers la Perse et l’Histoire, entre le XIème et le XXème siècle. Amin Maalouf y conte l’histoire – vraie, bien que romancée – du poète Omar Khayyam, libre penseur, amoureux du vin (bien que musulman) et astronome, et de sa rencontre avec Hassan ibn al-Sabbah, le fondateur de la célèbre et redoutable secte de meurtriers, les Assassins. Le roman se base sur la découverte, au XXème siècle, d’un manuscrit fictif, extrait des Robaïyat (l’orthographe varie) d’Omar Khayyam, perdu par le narrateur, Benjamin O. Lesage, lors du naufrage du Titanic (sur lequel un exemplaire, peut-être le dernier, de ce manuscrit était réellement présent). Désespéré par la disparition de ce trésor, il en conte l’histoire, nous plongeant dans la Perse ancienne, de palais en ruelle, de festin en beuverie, d’amours sensuelles en géopolitique complexe. Jamais on ne s’ennuie dans cette fantastique épopée orientale qui nous plonge dans le secret des alcôves, des fumeries et de cette secte incroyable que furent les Assassins, mettant au passage un petit taquet à certains clichés qui peuvent circuler sur le sujet.
Les oeuvres d’Amin Maalouf fascineront tou-te-s les passionné-e-s d’Histoire, mais aussi les gens comme moi qui veulent simplement se plonger dans un récit incroyable et enrichir au passage sa culture G et ses connaissances historiques. Si vous voulez vous rêver en Shéhérazade, posée façon Daenerys Targaryen dans un sofa moelleux, grignotant des gâteaux à l’eau de rose et buvant du thé ou du vin moelleux en écoutant un conteur jusqu’aux premières lueurs du jour, jetez-vous dessus. Vous ne serez pas déçu-e-s.
Les Commentaires
Enfin peut être.