Installée dans le paysage sériel depuis une décennie, l’anthologie horrifique American Horror Story nous a habituée au meilleur (Murder House, Coven) comme au pire (Double Feature, Roanoke). Pour la première fois en douze saisons, Ryan Murphy a laissé sa place de showrunner. La nouvelle venue Halley Feiffer a pour mission d’adapter le roman “Delicate Condition”, écrit par Danielle Valentine. Ce slow-burner suit la descente aux enfers d’Anna Alcott, une actrice qui peine à avoir un enfant.
Après une fausse couche et une énième FIV, elle y parvient, mais sa joie est de courte durée. Elle se sent traquée, vit des changements corporels intenses et pense qu’une entité maléfique en a après son bébé. La série reprend cette prémisse, avec Emma Roberts, visage familier de AHS, dans le rôle principal.
L’angoisse de la grossesse est une thématique récurrente dans le genre horrifique, comme Rosemary’s Baby (1968). L’écrivaine Danielle Valentine explique de son côté avoir été inspirée par Alien (Ridley Scott, 1979) pour son histoire :
« C’est assez ironique qu’un groupe d’hommes ait cherché la chose la plus effrayante à laquelle ils pouvaient penser, et aient eu cette idée qu’il pourrait y avoir quelque chose qui grandit à l’intérieur de votre corps, sur lequel vous n’avez aucun contrôle, qui vous fait ces choses, et finit par sortir de vous. En gros, ils ont juste écrit une histoire sur la grossesse. »
La nouveauté, c’est que du roman à son adaptation, en passant par la réalisation (Jessica Yu et Jennifer Lynch donnent leur patte esthétique à la saison), AHS Delicate compte des têtes pensantes féminines, qui placent cette saison du côté du female gaze. Et ça marche plutôt pas mal si vous êtes fan de thrillers psychologiques qui prennent leur temps.
Dans le corps et dans l’esprit d’une femme enceinte
Anna Alcott est à peine un rôle de composition pour Emma Roberts : elle-même actrice célèbre, elle a récemment donné naissance à un enfant, tout en poursuivant sa carrière dans ce milieu aussi privilégié que carnassier. Et ce n’est pas une sinécure : dans la série, Anna jongle entre ses rendez-vous à la clinique de la fertilité, ses insécurités balayées d’un revers de la main par ses proches et la promotion de son dernier film, qui pourrait lui valoir un Oscar et booster sa carrière comme jamais. La série retranscrit à la fois les changements corporels inquiétants que traverse Anna (les saignements de dents, les ongles qui se détachent ou plus simplement, un bouton persistant sur son visage qui l’obsède) et ce qui se passe dans sa tête.
Des alertes physiques obligent Anna à revoir son gynécologue pas franchement rassurant. Elle se sent également espionnée, par une fan obsessionnelle ou autre chose de plus inquiétant encore… Derrière sa façade de mari compréhensif, son mari, Dex, ne la croit pas, et il n’est pas le seul. Personne dans son entourage ne la prend au sérieux. On lui dit de se reposer, que ses hormones et ses médicaments lui jouent des tours… Une situation terriblement frustrante de gaslighting, qui parlera à nombre de femmes et en particulier à celles passées par l’expérience de la grossesse. Il faut avoir le cœur bien accroché pour visionner AHS Delicate qui s’empare au scalpel de sujets comme les violences obstétricales (les scènes les plus effrayantes), la fausse couche ou le deuil périnatal.
Kim K, la bonne surprise
Face à une Emma Roberts solide dans un rôle compliqué d’une femme dont on n’écoute pas les douleurs, on attendait avec curiosité la performance de Kim Kardashian, nouvelle venue dans l’univers glam et sanglant d’American Horror Story. Jusqu’ici, la star s’est surtout illustrée dans les téléréalités sur sa famille. Elle incarne Siobhan Corbyni, la PR et la BFF d’Anna. Et dès le premier dialogue (“Dis aux Daniel de me sucer le clito !”), elle est comme un poisson dans l’eau ! Ses scènes avec Emma Roberts nous réveillent, au cœur d’un thriller qui manque parfois de rythme. Elle-même entourée de PR, Kim K tire un plaisir manifeste à incarner cette figure de boss mi-réconfortante, mi-inquiétante. On n’est plus circonspectes quant à l’arrivée d’une autre célébrité, Cara Delevingne, qui peine à s’imposer dans un rôle plus mince de méchante non-identifiée.
L’actrice trans Mj Rodriguez intègre aussi AHS cette saison, dans le rôle de Nicolette Smith, une gouvernante de maison, nouvellement mère. Si son personnage n’est pas explicitement trans (pour le moment, la suite de la saison sera diffusée en 2024), la scène d’introduction, qui la voit tirer son lait devant Anna, a forcément quelque chose de politique à l’heure où la transphobie fait rage. AHS Delicate s’inscrit ainsi dans la continuité d’une série horrifique qui a toujours fait la part belle aux personnages féminins.
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Les Commentaires
Surtout les saisons où il y a Evan Peters, Sarah Paulson et Jessica Lange (l’Asile reste ma préférée)
Dommage, aucun des trois n’y est
Je ne suis pas très fan d’Emma Roberts dans AHS, elle joue toujours une peste que j’ai envie de virer de l’écran !
Et j’aime bien les Kardashian / Jenner donc hâte de voir Kim en actrice.
Par contre c’est visible sur Canal+ ? Mais ils soûlent à balancer les séries de plateforme en plateforme ! Faut s’inscrire partout
V’nez sur Disney là !!