La troisième saison de la série American Horror Story fait en ce moment une pause, au bout de neuf épisodes sur treize. En janvier, les quatre derniers épisodes de Coven, le sous-titre de cette année, viendront boucler cette sombre histoire de sorcières. Que vous ayez décroché l’année dernière ou que vous découvriez la série, c’est le moment ou jamais de se mettre à jour avant le grand final. Petit topo sur cette série complètement dingue.
American Horror Story est une étrange créature, qui change de peau d’année en année. Chaque saison se déroule dans une époque, un lieu, un univers différent, mais avec une bonne partie des mêmes acteurs. Les rôles sont redistribués et un gentil peut d’un coup jouer un méchant ou inversement.
L’un des intérêts de la mécanique est que chaque saison peut être regardée de manière indépendante des autres. On peut ne pas accrocher aux histoires de fantômes de la première année, adorer la folle histoire de l’asile de la seconde et de nouveau ne pas accrocher aux sorcières de cette année (hérésie !).
Cette troisième saison, donc, se déroule de nos jours à la Nouvelle Orléans. On y suit les aventures d’une assemblée de sorcières (« coven ») réunies dans une grande maison. Là-bas, quatre jeunes filles apprennent à utiliser leurs pouvoirs qui vont du vagin meurtrier (!) à la capacité d’infliger aux autres les blessures que l’on se porte (poupée vaudou humaine). Imaginez une sorte d’institut des X-Men, réservé aux filles, mais en version malaise.
À la tête de l’assemblée, la Suprême, jouée par la sublime Jessica Lange. Âgée, sur le point d’être remplacée, la Suprême est prête à tout pour prolonger son règne, y compris à assassiner les prétendantes au trône. Au même moment, de l’autre côté de la ville vivent les sorcières noires, descendantes d’esclaves, qui ont jusqu’ici accepté une trêve dans leur guerre avec leurs sœurs blanches aux cheveux blonds. Mais quand la Suprême fait appel à Delphine LaLaurie (figure historique réelle, raciste et serial killer d’esclave au 19ème siècle), il n’y a plus de trêve qui tienne.
Ajoutez à ça un minotaure, une horde de zombies, un monstre de Frankenstein, un tueur fantôme et vous aurez un vague début d’idée de ce qu’il s’est passé cette année dans American Horror Story.
Car les créateurs de la série, Ryan Murphy et Brad Falchuk, sont tombés dans le yolo quand ils étaient petits
(ou quand ils écrivaient déjà Nip/Tuck). L’une des caractéristiques principale du show est de tout mélanger, tout le temps, à toute vitesse et sans aucune considération pour les bonnes mœurs.
L’avantage est d’avoir une série qui fonce à toute vitesse, qui crame plus d’idées en un épisode que d’autres en une saison, et qui est prête à tout pour choquer. On aura par exemple vu une héroïne violer à mort un violeur (?!) avec son vagin tueur, ou une mère infliger un lavement à la Javel à son fils parce qu’il a eu le malheur de regarder une autre fille. Le malaise est absolu, le trigger-warning-o-mètre explose.
Pourquoi est-ce qu’il ne peut pas mater du porno et se branler comme les autres mecs ?
Dès lors, beaucoup reprochent à Murphy et son équipe de se vautrer dans les clichés les plus choquants, de brasser une tonnes de thématiques ultra dures (le racisme, le sexisme, le viol, l’esclavagisme) dans une ambiance absurde. Mais l’accumulation est la marque de fabrique de la série, l’outrance est sa force, pour peu qu’on accepte le postulat de départ. C’est aussi passer à côté du fait que les scénaristes nous mettent le nez dans la fange, au plus près, vont plus loin que les autres, nous confrontent à ce que l’on ne pensait pas être capables de voir.
De plus, Coven est une saison particulière, dans laquelle les hommes sont complètement marginalisés. Il n’y a aucun personnage principal de sexe masculin, et les héros secondaires sont soit littéralement muets, soit des ordures et/ou des victimes des femmes. Les héroïnes sont donc obligées d’assumer la totalité du spectre des rôles, ce qui crée une palette de personnages féminins rarement vue à la TV.
Là où la saison dernière, Asylum, mettait en scène des femmes bafouées par les hommes qui finissent par se venger du « sexe fort », cette saison ce sont clairement les femmes qui sont aux commandes, qui sont héroïques, cruelles, qui tuent, qui aiment, qui violent, qui pardonnent, qui souffrent. Une palette de personnalités féminines denses et complexes, rarement toutes représentées au sein d’une même série. Et rien que pour ça, au-delà des aspects plus critiquables, c’est intéressant, c’est important.
Comme toute saison d’American Horror Story, Coven est un trop grand foutoir pour être recommandable sans réserves. Mais pour celles et ceux qui acceptent les règles du jeu, qui apprécient une narration complètement folle, déconnectée de la plupart des autres séries existantes, c’est un bonheur de chaque instant.
À condition de ne pas la regarder à l’heure du diner.
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