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American Apparel est en faillite : retour sur le déclin fulgurant d’une marque culte

American Apparel, qui a tout de même pas mal de succès en France, est officiellement déclarée en faillite. Retour sur le déclin fulgurant mais pas très étonnant d’une marque culte.

Hier, une nouvelle pas très étonnante tombait dans un communiqué de presse dévoilé par American Apparel : la marque est officiellement en faillite.

En effet, la griffe battait de l’aile depuis plusieurs années. Notamment à cause de ses publicités provocatrices, beaucoup plus sexuelles que « sexy », à cause de la grossophobie, des discriminations à l’embauche à peine voilées, mais aussi et surtout aux déboires judiciaires de son sulfureux PDG, Dov Charney, foutu (à juste titre) à la porte en juin 2014.

À lire aussi : American Apparel se sépare de Dov Charney, son sulfureux PDG et fondateur

Tout ça n’a évidemment pas aidé American Apparel à renouveler sa clientèle perdue : après avoir lutté contre la banqueroute depuis plus de 5 ans, la marque se place aujourd’hui sous la protection de la loi sur les faillites, afin de trouver une restructuration efficace et nécessaire à sa survie.

American Apparel en faillite, ça veut dire…

Mais la faillite, qu’est-ce que ça veut dire exactement ? Cela veut-il dire que la marque va devoir mettre la clé sous la porte ? Pas forcément,  même si ça peut lui pendre au nez.

Si vous aimez American Apparel — et en soi, malgré leur éthique plus que discutable, il y a tout de même de quoi, car leurs vêtements sont bien coupés et de qualité, mais j’y viendrai un peu plus tard — n’ayez pas peur : ce n’est pas tout de suite qu’on va devoir dire bye-bye à leurs pantalons taille haute et autres body stylés.

Quand on parle de faillite, c’est que les dirigeants de la griffe se sont mis d’accord avec pratiquement l’ensemble de leurs créanciers (95% d’entre eux pour être précise) pour convenir d’une restructuration sur 6 mois, qui tentera de réduire les dettes de l’entreprise de 300 à 135 millions de dollars. Tout se fera via un remaniement interne, et l’apport de 70 millions de dollars par les créanciers pour stabiliser l’entreprise et la re-dynamiser sans que les activités en boutiques et sur l’e-shop ne soient pour l’instant affectées.

Voilà pour le côté financier de la chose : revenons maintenant sur le pourquoi du comment American Apparel en est arrivé là…

Une nouvelle pas très étonnante pour American Apparel

Créée en 1989 par Dov Charney, American Apparel a toujours joué sur un esprit provocateur pour promouvoir son image.  Si dans les années 90 la marque n’était pas très présente dans le monde la publicité et tentait encore de faire son trou dans la planète mode, c’est à partir des années 2000 que son créateur et directeur artistique a commencé à légèrement péter un câble.

Autour de 2005, les pubs se font de plus en plus trash, se rapprochant beaucoup plus du porno que du sexy. Loin du « sensuel », American Apparel fait dans la provoc… et en essayant de surfer sur la vague du porno-chic enclenchée par Marc Jacobs, elle se brûle les ailes en voulant aller beaucoup trop loin.

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Et vive le bon goût !

Le résultat ? On parle d’elle, oui, mais pas en bien, et sa clientèle va se raréfier d’année en année. On ne compte plus les dérapages médiatiques autour de la griffe : au-delà de ses publicités sexualisées à l’excès (oui le fion fait vendre, mais y a quand même des limites), elle est éclaboussée par différents scandales.

  • Les discriminations à l’embauche ne sont pas voilées, et American Apparel communique ouvertement sur les critères de beauté auxquels ses vendeuses doivent correspondre.
  • En 2010, la marque répond à une artiste burlesque qui demandait comment AA se plaçait au niveau de la mode « grande tailles » par la phrase très sèche « it’s not our demographic » (comprenez « ça ne fait pas partie de notre clientèle »).
  • Plusieurs fois en 2011 et 2014, la marque se fait attaquer en justice par des associations de parents d’élèves pour publicités pédo-pornographiques montrant de très jeunes filles nues, enfilant des culottes en coton, et plus récemment un zoom sur une mini-jupe très courte.
  • Après le drame de l’effondrement de l’usine textile au Bangladesh, American Apparel ne trouve rien de mieux à faire que de sortir une publicité mettant en scène une jeune femme torse nu, avec la légende « Made In Bangladesh » couvrant (à peu près) ses tétons, pour promouvoir les bonnes conditions de travail de ses employé•e•s et montrer qu’elle n’est pas concernée par cet événement meurtrier.

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Bof, vous auriez pu trouver mieux.

  • Le dernier en date : l’éviction de son PDG et fondateur Dov Charney en juin 2014, après de nombreuses plaintes déposées par des ex-employé•e•s de la marque, notamment pour harcèlement et agressions sexuelles, discrimination à l’embauche, comportement inapproprié au sein de l’entreprise… Bye bye Dov, tu ne me manquera pas.

Avec tous ces événements, ce n’est donc pas étonnant que la marque marque un déclin de 17% de vente d’année en année depuis cinq ans, et une baisse de sa valeur marchande de 87% l’année dernière. Aïe, ça pique.

La nouvelle directrice de publicité, Paula Schneider, avait d’ailleurs exprimé son souhait, à son arrivée en septembre 2014, d’arrêter ces images ouvertement sexuelles, pour partir sur une communication pointue & décalée. Ce qui n’a malheureusement pas (encore ?) pris, l’entreprise étant trop enlisée dans ses propres erreurs.

À lire aussi : La nouvelle égérie d’American Apparel est un… paresseux !

Mais si on se place uniquement du côté marchandise de la Force et que l’on observe American Apparel sans prendre en considération sa gestion d’image très mal choisie et chaotique, on peut tout de même se dire que c’est plutôt dommage, car les vêtements et le style ont du potentiel !

American Apparel, une marque au potentiel gâché par une éthique foireuse

Sans défendre l’image sur laquelle American Apparel s’obstinait à communiquer jusqu’à l’année dernière, on ne peut pas nier, quand on est ou quand on a été client•e de la marque, que les produits, eux, se démarquaient des autres sur le marché.

AA, c’est d’abord une vraie griffe : un savant mélange entre coupes simples mais travaillée, et un style pointu mais facilement adaptable à plusieurs looks différents. La marque a su se faire une place choix dans le paysage du prêt-à-porter, en imposant ses tenues à la fois cool et stylées dans bien des placards.

On ne compte plus les best-sellers American Apparel : le sweat aux bordures blanches disponible dans toutes les couleurs, le célèbre body à décolleté transparent descendant jusqu’au nombril ou encore les sacs de sports ronds en toile peuplent les rues, les dressings et les salles de gym !

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Non seulement les produits sont pointus et ont un style reconnaissable, mais ils sont aussi de très bonne qualité ! La plupart sont produits sur le sol américain ; les autres le sont dans le respect des conditions de travail des ouvrier•e•s, d’après cette charte.

Pour avoir été cliente d’American Apparel, je peux vous dire que ces fringues sont un bel investissement ! Il y a de ça 5 ans, j’achetais leur pantalon jodhpur dans une boutique londonienne. Je le mets assez souvent depuis, et je peux vous dire qu’en cette demi-décennie, il n’a pas bougé d’un poil : il est toujours aussi noir et élastique, là où d’autres jeans se déchirent en 9 mois.

Enfin, si la plupart des publicités American Apparel sont plus que discutables, on ne peut pas cracher sur toutes, car entre les différentes polémiques, certaines affiches ont fait du bien aux yeux et au coeur. Rappelons-nous de l’engagement dans la cause LGBT, notamment avec la commercialisation de t-shirts « Legalize Gay » ou « Gay is OK », et la visibilité que la marque a offert à des modèles trans.

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De plus, si les morphologies n’étaient pas très diversifiées, American Apparel a été, pendant son âge d’or (de 2006 à 2009), une des seules marques à engager des mannequins d’origines diverses. Elle a aussi donné sa chance à des modèles sexagénaires, à un jeune homme gay de 15 ans, à des femmes non-épilées… bref, il y a de quoi en tirer un peu de bon aussi.

À lire aussi : Brendan Jordan, 15 ans et découvert sur YouTube, devient égérie American Apparel

Face à la faillite et la refonte économique, j’espère qu’American Apparel saura se détacher définitivement de cette provoc inutile et foireuse qui a causé sa descente aux enfers. La marque a une seconde chance, il serait donc judicieux de sa part de se concentrer sur ce qui fait et a fait sa force : des engagements dans des causes justes et des vêtements de bonne qualité, au style indémodable et reconnaissable !

Et toi, que penses-tu de la mise en faillite d’American Apparel ?


Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.

Les Commentaires

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Avatar de Freehug
15 octobre 2015 à 19h10
Freehug
@Mrs Carter , @bat-momo : du calme, on est nombreuses à avoir détesté la com' d'American Apparel et à avoir un petit "haha bien fait pour vous" au fond de la tête tout en ayant conscience que faillite = chômage et sans porter aux nues une entreprise qui s'est à ce point obstinée dans le mauvais goût sans prendre en compte les critiques. Ce qui était en partie dû à l'ancien PDG apparemment. Maintenant je leur souhaite de repartir sur de meilleures bases.

Et au passage, si Abercrombie&Fitch pouvaient aussi avoir une petite prise de conscience sans forcément passer par des déboires financiers ce serait cool. Parce qu'ils sont gratinés eux aussi.
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