Vous avez peut-être déjà entendu parler d’Adèle Castillon. Sans doute grâce à sa chaîne YouTube débutée dès l’âge de 13 ans en 2014, dans les films Sous le même toit (réalisé en 2017 par Dominique Farrugia, avec Gilles Lellouche et Louise Bourgoin) ou L’Heure de la sortie (de Sébastien Marnier en 2019 avec Laurent Lafitte), ou encore pour le groupe électro-pop qu’elle formait avec Matthieu Reynaud, Videoclub, de 2018 à 2021. Alors qu’elle a lancé sa carrière solo l’année suivante, et qu’elle vient de sortir son premier album Plaisir Risque Dépendance le 20 octobre 2023, elle en fait déjà la promo via des singles (comme « Rêve » dont elle a aussi réalisé le clip), des festivals (comme We Love Green 2023), et des interviews remarquées.
Au micro d’InPower, le podcast de la créatrice de contenus Louise Aubery (alias @mybetterself), Adèle Castillon a d’ailleurs fait des révélations inattendues concernant un problème d’addiction qui a marqué une partie de son adolescence et son passage à l’âge adulte.
Adèle Castillon évoque son addiction aux opiacés, sa cure de désintox et son sevrage
À partir de 6 minutes 50 dans cette interview fleuve, Adèle Castillon évoque pour la première fois son addiction passée aux opiacés :
« J’ai fait une addiction aux médicaments qui a débuté fin 2019. […] J’ai arrêté de consommer alcool et médicaments et toute drogue au début de l’année 2023. J’ai réussi à sortir de cette addiction aux opiacés : codéine, tramadol… C’est des antidouleurs que j’utilisais à des fins récréatives. […] Ça met complètement dans les choux et c’est extrêmement puissant, on parle presque d’effets semblables à l’héroïne. »
Adèle Castillon : « Je vivais pour consommer et je consommais pour vivre »
Adèle Castillon explique qu’elle a essayé pour la première fois ces médicaments prescrits uniquement sur ordonnance et détournés à des fins récréatives quand on lui en a proposés en soirée. Elle qui estime avoir un terrain addictif depuis très jeune raconte les sensations de sa toute première prise quand elle avait 16 ans, puis comment elle a recommencé en soirées, avant d’en prendre dès les matins avant d’aller en cours :
« En réalité, ce n’était pas du tout normal. Très vite, ma vie tournait autour de cette consommation. Je vivais pour consommer et je consommais pour vivre.
[…] Le plus gros impact a été ma perte de créativité. Il n’y avait plus qu’une chose qui comptait, c’était d’avoir des médicaments, les prendre, et vivre les choses que je devais vivre en étant défoncée. Quand on avait cette pression avec Videoclup de faire l’album, c’était hyper difficile de produire des chansons parce que je n’arrivais plus à me poser et faire de la musique. Ça devenait de plus en plus rare. Et ça c’est un truc que j’ai retrouvé une fois que j’ai arrêté vraiment : ma créativité est revenue fois mille. »
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L’addiction selon Adèle Castillon : « C’est très difficile de s’en sortir seul »
En parlant de ce qu’elle ressentait à l’époque où elle était au plus profond de son addiction, Adèle Castillon estime qu’elle cultivait une forme de déni :
« Ce qui est assez fou dans cette histoire, c’est que je suis malheureuse [à l’époque]. Je ne suis pas bien, je passe mon temps à pleurer quand je suis en espèce de redescente, à me dire que ma vie est terrible. À chaque fois j’essaye de me trouver toutes les excuses du monde pour essayer de comprendre pourquoi je suis si malheureuse, mais jamais je me dis que c’est à cause des médicaments. Jamais je me dis ça, parce que je ne veux pas que ce soit le problème. Et puis au fur et à mesure, l’addiction prend une autre tournure, j’ai des accidents à cause de ça, je fais des overdoses (ça m’est arrivée deux fois : une fois devant mon copain, une fois devant mes parents). »
Adèle Castillon raconte qu’elle manipulait beaucoup son entourage pour cacher son addiction, prétendre qu’elle la maîtrise, voire qu’elle est complètement sobre. Mais ces deux overdoses survenues en 2020 l’aident à murir l’idée de la nécessité de se sevrer. Elle s’y essaye à plusieurs reprises en solo, avant de décider d’aller en cure début 2023 :
« J’ai essayé trop de fois d’arrêter seule, et j’ai eu la chance de rencontrer quelqu’un avec qui je travaille qui est passé par la même épreuve que moi et qui décide de m’aider, et qui me dit ‘voilà, je connais cet endroit et je te conseille d’y aller.’ Donc j’ai pris un break dans mon travail, j’ai dit à tout le monde ‘je dois partir, je dois m’isoler’. Et je pars début 2023, et là, je me rends compte que c’est possible, je rencontre des gens qui ont arrêté, et j’apprends à en parler.
[…] J’ai compris plus tard aussi que l’addiction, c’est une maladie. C’est très difficile de s’en sortir seul·e. Évidemment, si des gens écoutent, qui sont malades, qui sont addicts, et qui ont réussi à s’en sortir seuls, je suis trop fière d’eux et bravo, mais c’est hyper difficile. Je trouve que l’addiction ça t’isole tellement, t’es déjà tellement seul·e… C’est tellement important d’en parler, en fait.
[…] Pour ma carrière, je n’aurais pas pu continuer si j’étais encore défoncée, et puis c’était aussi une question de vie ou de mort, en fait. J’allais vers la mort. J’ai compris plus tard que, ce que je faisais c’était de me suicider à petit feu. À partir du moment où je suis allé en cure et que j’ai vu des gens qu’étaient spécialisés, qui voyaient des gens addicts tout le temps, ça a pu répondre à tellement de questions que j’avais. C’est là que j’ai compris que j’avais un problème à gérer mes émotions, qu’il y avait de l’espoir, que [l’addiction] est une maladie, et qu’on peut mettre en place des choses dans la vie pour contrer ses envies. Aujourd’hui, c’est vrai qu’il m’arrive encore d’avoir envie de me défoncer, mais maintenant je sais ce qu’il faut faire pour contrer ces envies-là. À commencer par voir ma psy régulièrement, le plus important, c’est de parler. »
L’accoutumance aux opioïdes provoquerait 5 morts par semaine en France
En se basant sur des données de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), Le Monde relevait en 2019 que le nombre d’hospitalisations liées à la consommation d’antalgiques opiacés a presque triplé (avec une hausse de 167 %) entre 2000 et 2017, tandis que le nombre de décès a augmenté de 146 % entre 2000 et 2015. D’après les données de l’Assurance-maladie, près de dix millions de Français·e·s ont eu une prescription de ce type d’antalgiques en 2015. En 2021, Libération notait combien ce fléau s’avère largement sous-estimé en France, et que l’accoutumance aux opioïdes provoquerait aujourd’hui dans l’Hexagone au moins cinq morts par semaine.
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