L’avant -dernière fois que j’ai choisi un album de rock comme BO de ma vie, j’avais 13 ans, un baggy, une queue de cheval et j’étais amoureuse d’un gars du collège rival du mien, une fausse teigne qui portait un plâtre à cause d’une chute en skate sur le parvis de la mairie. Je trouvais ça terriblement sexy (ou cool, je ne sais plus, mais je crois qu’entre 12 et 16 ans, les deux mots sont synonymes) et les chansons que j’écoutais synthétisaient tout ce qui faisait ma vie d’ado blasée : des riffs de guitare aussi réguliers que l’appareil dentaire de ma tête à claque d’Apollon en sweat à capuche, des batteries saccadées à la façon des battements de mon cœur et des basses aussi lourdes que mon sourire était large quand je le voyais rentrer un misérable ollie sur la place. Hyper victime, je vous l’accorde.
La dernière fois est moins honteuse, je vous rassure : on est en 2010, c’est la fin de l’été et tous les matins, je bois une tasse de AdamKesher tout en écoutant mon café (ou l’inverse, je sais plus, le matin je suis un fantôme).
À vrai dire, Adam Kesher a tellement été la BO de ma vie cet été que j’ai maintenant l’impression qu’ils me connaissent depuis toujours et qu’on a fait plein de trucs ensemble, comme des vieux potes : rentrer de soirée ensemble, manger des cheese-burgers à 15 h, aller aux Buttes Chaumont à vélo, boire des bières dans mon salon. La principale conséquence de tout ça est mon incapacité aujourd’hui à trouver les mots pour décrire leur musique : les mots m’échappent comme quand, à force d’avoir trop squatté avec lui, vous n’arrivez plus à dire si votre cousin est un sale con ou un type formidable.
En tout cas, si vous ne les connaissez pas encore, je vous propose 2 moyens de faire connaissance avec les mecs les plus touchants du Bordeaux musical, que certains comparent à Phoenix :
1. En allant les voir ce soir au Social Club, en live – c’est à partir de 23 h et c’est gratuit (voir l’événement Facebook).
2. En discutant avec eux. Là maintenant, tout de suite. C’est parti ?
madmoiZelle : Adam Kesher est un personnage de Mulholland Drive. La question est hyper bateau, mais je n’ai trouvé la réponse nulle part : vous êtes fan de David Lynch ?
Ouais, on est super fan de Lynch. Surtout de Twin Peaks. Mais on aime aussi beaucoup Mullholland Drive, Blue Velvet, Eraserhead ou Inland Empire. Bon, c’est pas très original de dire que Lynch est un grand cinéaste mais il fait particulièrement sens pour nous en ce qu’il accorde une très grande place à la musique dans ses films, il s’en sert comme un levier dramatique, la plupart du temps, l’histoire bascule autour d’une chanson. À l’inverse, on a toujours voulu avoir une approche assez cinématographique de la musique. Il y a des accords, des sonorités, des emballements dans la musique qui ont une grande puissance d’évocation. Par exemple, tu ne peux plus utiliser un harmonica noyé dans de la reverb sans que les paysages de Monument Valley et les jeux de regards des films de Sergio Leone ne t’apparaissent. La musique et le cinéma sont intimement liés.
Challenging Nature est votre 3e album, et c’est aussi celui qui vous révèle enfin au grand public. Alors, quel effet ça fait ?
Challenging Nature est notre 2e album, mais c’est vrai qu’en plus du premier on a sorti plein de EP’s, du coup, beaucoup de gens ont du mal à s’y retrouver. On est très heureux que celui-ci soit un peu plus mis en avant, on commence à avoir des gens qui chantent les paroles des morceaux de manière frénétique aux concerts, c’est très émouvant. Mais il nous reste encore beaucoup de chemin à parcourir, on commence tout juste à faire attention à nous. On espère que ça va continuer.
Je n’arrive vraiment pas à me décider sur le meilleur de vos 10 morceaux. Je crois que je suis amoureuse de l’album tout entier. Y-a-t-il un morceau que vous aimez jouer plus que les autres ?
Oui, il y a le morceau Kiss me Kinski qui marche particulièrement bien en live, on ne sait pas pourquoi, mais il est très chouette à jouer, très enlevé. Sinon, on a dû jouer certains morceaux du disque en formation réduite pour le magazine Magic, on a dû les réarranger, les adoucir, en extraire la sève mélodique et c’était très agréable. C’est cool que tu dises que t’es amoureuse de l’album tout entier parce que c’est ce qu’on a recherché à faire avec Dave One de Chromeo qui a produit le disque, faire un album qui ait sa propre logique interne et qui ne soit pas juste une juxtaposition de morceaux.
https://www.youtube.com/watch?v=bD1hHfGbQYI
Vous êtes originaires de Bordeaux. Un bon vin à conseiller ? Histoire que je ne me fasse plus berner par les conseils aléatoires d’un vendeur de chez Nicolas.
Les jeunes de Bordeaux sont comme tous les autres jeunes de France, ils boivent souvent le vin le moins cher. Le Graves c’est peut-être le mieux, mais on n’a pas de château particulier en tête là… Y’en a qui ont des noms marrants, genre le « Mille secousses » vers Blaye, mais il est pas terrible. Le « Saint Julien », ça défonce, mais c’est du haut de gamme, c’est pour les darons.
C’est Maciek Pozoga qui a réalisé le clip Hundred Years Later. Racontez nous comment ça s’est passé.
Maciek fait notre artwork depuis le début du groupe, c’était assez naturel de lui demander de faire un clip. Il a écrit un synopsis avec Morgan Poyau, ils ont choppé une dizaine de potes à Bordeaux, une vitre en plexi et ils sont allés tourner à la dune du Pyla. Pour ce qui est du sens de la vidéo, on a chacun notre propre interprétation mais on ne va pas marcher sur ses plates-bandes. Après, à cause de ce clip, on a entendu dire qu’on venait du Cap Ferret. C’est absolument faux, ça craint.
On vous retrouve dans quelques heures au Social. Un mot sur la soirée ?
On est super excités, ça fait longtemps qu’on n’a pas joué à Paris. Et puis y’a les Monsieur Monsieur de Reims qui ont fait un super remix de notre morceau Hundred Years Later qui seront là aussi. Ça devrait être chouette.
> Référence album : Adam Kesher, Challenging Nature (chez Disque Primeur)
Plus d’infos sur leur site internet ADAMKESHER.COM et sur leur myspace MYSPACE.COM/ADAMKESHER.
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
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