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Vie quotidienne

Quelques mots à ma meilleure amie, la même depuis 20 ans

Kalindi délaisse les films et séries un moment, pour te raconter une histoire toute simple. Celle de sa plus vieille amitié.

Publié le 11 janvier 2019

Ce soir, ma marraine a eu 60 ans.

À 15 minutes à pieds de Montmartre, au 48 rue des Cloys, elle a bu pas mal de champagne et mangé avec gourmandise une grosse part de gâteau à la poire, recouverte de crème anglaise.

Quand l’amitié traverse les décennies

Le pianiste a entamé à sa façon les plus grands tubes du répertoire français, de Brassens à Aznavour sans bien sûr oublier Joe Dassin.

Accoutré d’un costume chelou qui lui allait pourtant bien, il a fait rire ma marraine, ma mère, et les autres invités en entrecoupant les couplets de ses propres blagues.

Tous les amis se sont esclaffés, et puis ils ont pas mal dansé aussi.

Debout, un peu ivre, ma marraine est restée fidèle à elle-même : drôle et survoltée, l’œil fou et le sourire malin.

Ce soir, je l’ai trouvée encore plus joyeuse que d’habitude, pendue aux bras de ses potes et surtout à celui de sa plus vieille amie, ma mère.

Celle-ci a accueilli chacune de ses étreintes avec bonheur. Toutes les deux ont tournoyé avec la maladresse des adultes qui ont bu plus de deux coupes de champagne.

Moi, j’étais assise à table à les regarder. Ma mère a chanté doucement à côté du pianiste, comme elle fait toujours, puis s’est interrompue pour me prendre par les épaules.

« Tu te rends compte ? Ça fait plus de 40 ans qu’on est amies avec Karine. 40 ans…»

Karine justement a déballé ses cadeaux.

Le pianiste a entamé un air dramatique pour entretenir le suspense.

« Mets nous un air judéo-espagnol », elle a hurlé en riant. « Joue-nous donc un air judéo-espagnol ! »

Tout le monde a bien ri avec elle. Et sur Mazal Tov de Siman Tov, elle s’est levée pour sauter, sauter, sauter.

Une histoire toute simple

J’ai tapé dans mes mains en rythme avec les autres, et elle a continué de sauter jusqu’à la fin de la chanson, avant de finalement déballer ses cadeaux, essoufflée.

Émue, elle a fait un discours tout simple. Simple et drôle comme elle, pour remercier les invités.

« Merci pour votre bienveillance, merci pour votre présence depuis toutes ces années. J’espère qu’on sera tous là dans 10 ans encore pour fêter un nouveau décade. »

Dans un câlin échangé avec ma mère, sa plus vieille amie, j’ai vu toute la tendresse qu’un humain peut donner à un autre.

Ça aussi c’était tout simple.

Mais tu vois, douce lectrice, à force d’analyses de films, de relais d’informations factuels et d’intellectualisation de la culture, j’oublie parfois d’écrire des choses toutes simples.

Ce soir donc, j’ai envie de te raconter l’histoire la plus simple au monde.

Ma meilleure amie est là depuis 20 ans

J’avais 6 ans quand j’ai rencontré Elise, et je ne saurais pas te dire comment nous sommes devenues copines, mais ça a du être comme pour tous les enfants.

Peut-être qu’on s’est assises à côté, peut-être qu’elle m’a prêté un stylo bic, peut-être même qu’elle m’a filé une réponse à un contrôle puisqu’elle a toujours eu les réponses avant moi.

En tous cas, d’aussi loin que je me souvienne, Elise est là.

Elle est là même quand je ne le suis pas, même quand je le suis moins, trop occupée à rire aux vannes de mes nouvelles amies, que j’idolâtre les premiers mois de notre rencontre.

En général, j’ai chaque année au moins un coup de foudre amical, et rien ni personne ne peut infiltrer le duo que je forme avec mon nouvel humain préféré.

Mais Elise le comprend et sait qu’après ma phase de lune de miel, la même que celle des nouveaux amants, je reviens vers elle désolée d’avoir été moins présente. Égoïste même.

Car Elise n’est pas jalouse, et accueille les évolutions des autres d’un cœur inassouvi.

Contrairement à ce que le temps fait à l’amour, à savoir l’émousser, il a renforcé notre amitié.

Depuis 20 ans, Elise écoute toutes mes complaintes, supporte mes crises d’hystérie, et me conseille avec objectivité.

Autant te dire douce lectrice, que cette meuf a une patience illimitée.

Elise, c’est ma constance, mon équilibre, mon pilier (de bar), mon soleil.

J’entretiens avec elle la relation la plus solide que deux humains puissent avoir.

À l’exception d’une dispute tous les cinq ans, qui aboutit généralement à une discussion nécessaire, où l’on remet chacune les pendules de l’autre à l’heure, le ton ne monte jamais entre nous.

Pourtant, ses manières m’agacent souvent.

Comprendre que nos amis aussi sont imparfaits

Parce qu’Elise est snob, même si elle le nie. Elise exagère les situations jusqu’à parfois les rendre plus dramatiques qu’elles ne le sont en réalité. Elise est mal à l’aise en société, se livre difficilement, procède par la moquerie quand elle ne se sent pas à sa place.

Bref, Elise adopte de temps en temps les mêmes travers que les autres êtres humains. Quoi de plus normal ?

Dans ces moments-là, je lui en veux d’être imparfaite, de se dérober à l’image idéale qu’elle me renvoie d’ordinaire.

Je regrette qu’elle ne soit pas plus juste, plus bienveillante, moins grinçante.

Après l’énervement passager vient la réflexion. Je dédie un morceau de temps à ma propre remise en question et m’en veux terriblement d’être un humain cruel, difficile et injuste.

Car c’est moi qui le suis, en lui reprochant de ne pas l’être.

Et il est ridicule de penser qu’Elise n’est pas juste.

Elise est la justesse même, la gentillesse, la douceur, la folie, l’humour, l’amour. Elle est tout ce dont le monde a besoin.

Elle est ce que tous les autres devraient m’envier. 

Depuis 20 ans, je n’ai jamais douté d’une chose : c’est avec Elise que je finirai ma vie.

Comme un vieux couple, on mangera des caramels mous et on ne se parlera plus parce qu’il n’y aura plus rien à dire.

Quand les amis deviennent la famille

Un jour, on ira dans la même maison de retraite et on deviendra zinzins ensemble. Peut-être même qu’on oubliera nos jeunes années, et les vieilles aussi.

Mais avant cette étape finale et inévitable, je sais qu’elle sera là pour mes 60 ans et moi pour les siens, à Montmartre ou ailleurs, avec encore plus de champagne qu’il y en avait ce soir.

On ne dansera sûrement pas sur Aznavour mais sur les musiques qui auront fait notre époque, et Elise râlera parce que la pianiste aura joué du Rihanna en abusant des vocalises.

Je lui dédierai un morceau de mon discours, juste à elle, pour la remercier de m’avoir dit que se faire tatouer Notre besoin de consolation est impossible à rassasier au creux des reins, c’était vraiment de la merde.

Je la remercierai d’avoir regardé ma vie avec autant de bienveillance, d’avoir été là pour applaudir mes réussites et effacé mes ratés.

Je peux d’ailleurs lui dire aujourd’hui, et directement.

Lison, je sais que tu liras cet article, comme tu lis tous les autres.

Un jour il y a bien 15 ans, j’ai dit à ma mère que si elle mourait j’irais vivre chez toi et même que tes parents m’adopteraient.

Je n’ai eu besoin d’aucune disparition pour que vous m’adoptiez tous, tes parents, tes grands-parents, ta sœur et toi.

Depuis 20 ans, j’ai une famille en dehors de ma famille.

Merci pour ça, pour le reste aussi, et surtout pour être le soleil de ma vie.

À lire aussi : J’ai perdu un parent à l’adolescence, voici comment j’ai vécu mon deuil

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Les Commentaires

6
Avatar de ClemBouBou
30 juillet 2019 à 12h07
ClemBouBou
C’est tellement émouvant comme hommage

Je regarde toujours avec curiosité ces amitiés qui traversent les décennies.
Je suis incapable de garder les mêmes ami.e.s pendant plusieurs années (5 ans en moyenne). Je ne sais pas pourquoi.
Tout le monde change avec le temps, alors je me demande pourquoi malgré tout, certain.e.s arrivent à rester ami.e.s sur le long terme et d’autres pas.
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Voir les 6 commentaires

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