Ça fait belle lurette que des femmes piochent dans le vestiaire masculin des habits du pouvoir ou du pratique, comme le pantalon, le costume, le smoking, le caban, la marinière ou encore la saharienne. C’est peut-être aussi par souci de confort qu’on peut adorer la coupe des jeans dits « boyfriend » — qui n’ont pas besoin d’être littéralement piqués à un petit-ami comme le suggère leur nom.
C’est d’ailleurs une formule particulièrement cishétéronormative que de désigner « boyfriend » ce genre de coupes amples lorsqu’elles sont portées par des femmes, qui sont peut-être juste allées au rayon homme pour bénéficier du confort, des poches, et de la qualité différente des matières premières dont elles sont bien trop souvent privées ! On n’est pas toujours en train de performer l’hétérosexualité, quoi, même si la mode adore partir de ce présupposé.
Toujours est-il qu’un phénomène semblable se dessine également au rayon lingerie. Froufrous, dentelles, agrafes et jarretières peuvent avoir leur charme, mais ne riment pas toujours avec confort et durabilité. C’est pourquoi de plus en plus de femmes optent aussi pour des slips, boxers et des caleçons piqués au rayon homme. Parce qu’ils sont taillés pour leur fonctionnalité avant tout, et non pour satisfaire le female ou le male gaze…
À force d’acheter des sous-vêtements pour les mecs de leur entourage, les femmes en portent aussi pour elles-mêmes
Qu’on l’ait récupéré ou piqué à un père, un frère, un ex ou un amant de passage, ou même qu’on apprécie d’en emprunter à un éventuel petit-ami actuel, le sous-vêtement masculin se dispense de fioriture. C’est juste une taille élastiquée, une toile de coton, et basta. D’ailleurs, c’est bien souvent les femmes de l’entourage des mecs cis hétéros qui leur (r)achètent des boxers ou caleçons (on les connaît, ceux capables de continuer de porter pendant des années les mêmes modèles détendus, élimés, voire troués, sans s’en soucier).
D’après une enquête réalisée par TNS-Worldpanel pour le Salon international de la lingerie de 2009, les trois quarts des acheteurs de sous-vêtements pour hommes sont des femmes en France. Cette statistique a sûrement bougé ces dix dernières années, avec notamment l’essor du e-commerce, les avancées du féminisme et les réflexions sur les masculinités, mais ça en dit quand même long.
Et peut-être qu’à force d’acheter des sous-vêtements pour les mecs de leur entourage, ou juste d’en voir, de plus en plus de femmes semblent se mettre à en porter pour elles-mêmes ! En pyjama, pour traîner à la maison, ou même en sous-vêtement du quotidien. Si bien que des marques se mettent à proposer aux femmes des coupes dites masculines, mais adaptées à leur morphologie.
C’est le cas par exemple de Les Girls Les Boys, Alfie Paris, ou encore HommeGirls — autant de griffes qui jouent à brouiller les frontières entre masculin et féminin, avec des pièces adressées à tous les genres. Citons aussi les marques de culottes menstruelles qui proposent des boxers menstruels gender-free dans un souci d’inclusivité.
Les marques se saisissent de la tendance des caleçons masculins pour femmes, à exhiber au-dessus de son pantalon
Olivia Francis, fondatrice de la marque de sous-vêtement pour homme Hamilton + Hare, vient de décliner son savoir-faire pour créer un caleçon destiné aux femmes auprès de la marque de chemises With Nothing Underneath, comme elle le raconte au Vogue britannique :
« C’est un mélange de petits détails comme par exemple arrondir l’ourlet pour qu’il soit plus flatteur au niveau des cuisses, ou encore garder le design de la braguette boutonnée, mais la coudre pour qu’elle reste bien droite. Nous avons déjà eu un avis de cliente qui disait que la ceinture plus large n’écrasait pas ses hanches comme le font les boxers de son mari — et c’était exactement ce que nous voulions !
Nous voulons prendre les bases traditionnellement masculines et les rendre plus adaptées au corps d’une femme. »
La pandémie et ses confinements n’ont fait que confirmer cette tendance pour des sous-vêtements plus amples, dans lesquels ont peut traîner à la maison plus confortablement. Mais aussi les laisser largement apparaître, voire volontairement blouser un peu, au-dessus de la ceinture d’un pantalon, maintenant qu’on peut remettre le nez et le nombril dehors ! C’est ce qu’on appelle le sagging.
Peut-être plus facile à assumer que le string qui dépasse volontairement, cette tendance du sous-vêtement masculin apparent pour femmes a déjà été aperçue sur les podiums de Jacquemus, Y/Project, ou encore Vivienne Westwood. Et s’avère donc assez facile à adopter avec n’importe quel caleçon qui traîne chez soi (en le lavant avant, évidemment).
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