— Image par Anaïs Bourdet, via la Page Facebook des Glorieuses
C’est fou, non ? De se dire que juste parce que je suis une femme, je vais être payée en moyenne 10,5% de moins que mes collègues masculins, toutes choses égales par ailleurs : même expérience, même ancienneté, mêmes compétences, même formation, etc.
Parce qu’en France, en 2016, il existe encore et toujours une différence entre les salaires des hommes et ceux des femmes, à postes et compétences égales.
10,5 % d’inégalités salariales restent non expliquées
Comme l’explique l’Observatoire des inégalités, un écart de salaire de 10,5% persiste entre les hommes et les femmes, une fois tous les facteurs pris en compte (données 2012, source INSEE).
Parmi ces facteurs, on trouve l’effet temps partiel (-9,4% sur le salaire des femmes par rapport aux hommes), l’inégale répartition des métiers (-3,5%), et les effets de structure (-2,3%), c’est-à-dire le secteur d’activité, l’âge, la taille de l’entreprise et le type de contrat.
Une fois toutes ces composantes prises en compte, il reste encore 10,5% de différence « non expliquée », ou ainsi que l’exprime l’Observatoire des inégalités :
« Cette différence de traitement se rapproche d’une discrimination pure (ou « toutes choses égales par ailleurs ») pratiquée par les employeurs à l’encontre des femmes.
Cependant, d’autres facteurs non mesurés ici peuvent entrer en jeu et justifier partiellement ce phénomène, à l’instar de la situation familiale, du domaine du diplôme possédé ou des interruptions de carrière. »
Une « inégalité inexpliquée », ça veut dire que tous paramètres égaux, niveaux de diplômes, de compétences, d’expérience, etc, il reste encore un écart entre les rémunérations des femmes, versus celles des hommes.
Qu’est-ce qui justifie, ou même simplement qui explique le fait qu’il y ait encore des écarts aussi significatifs, en France, en 2016 ?
Les écarts de salaire, ou la pire des inégalités
Pourquoi je dis que l’inégalité salariale est la pire des inégalités ? Parce qu’elle est matérialisée très concrètement sur ma fiche de paie, et parce que contrairement à bien d’autres injustices que subissent les femmes en France — harcèlement de rue, culture du viol
… — elle ne trouve pas d’excuses dans les moeurs et les prétendues traditions.
À moins de revendiquer fièrement l’héritage sexiste de nos aïeux, je vois mal ce qui justifierait de défendre la persistance d’un écart de salaires entre les femmes et les hommes.
Je peux comprendre qu’il soit compliqué de légiférer contre le harcèlement de rue (et pourtant, on y arrive), qu’il soit difficile parfois de faire condamner des agresseurs en l’absence de preuves matérielles. Tout ceci est insupportable, mais compréhensible, d’une certaine façon. On n’éradiquera pas les violences faites aux femmes à coups de décrets. Ça sera un travail de longue haleine, qui passera aussi par l’éducation, les prises de conscience. Le changement doit aussi venir de nous. Bien sûr.
Mais l’égalité des salaires, ce n’est pas une question de société. Ou plutôt, le piège est justement de considérer qu’il s’agit de la prolongation économique de phénomènes de société : les femmes s’occupent davantage des enfants, moins de leurs carrières… Elles demandent moins d’augmentations et de promotions…
Tout ceci est vrai. En quoi, cependant, tout ceci justifierait de maintenir les femmes dans cette situation inégalitaire ?
Messieurs, l’égalité salariale, c’est votre avenir aussi
Je peux comprendre les hommes qui se sentent un peu étrangers aux luttes féministes, mais j’aimerais que vous preniez conscience, messieurs, que si ce combat ne vous concerne pas directement, vous avez néanmoins tout intérêt à le soutenir, et à le rejoindre... sauf à parier que ni vous ni vos enfants n’auront des filles, plus tard.
Vos soeurs, vos cousines, vos femmes sont aujourd’hui moins bien rémunérées que vous messieurs, juste parce qu’elles sont des femmes. Vos filles, puis vos petites filles connaîtront la même injustice, jusqu’en 2077.
Et avant d’être vos soeurs, vos cousines, vos femmes, rappelez-vous : ce sont d’abord des êtres humains, qui méritent un traitement égal au vôtre dans cette société.
Si on ne fait rien, l’égalité salariale mettra 60 ans à arriver
Je ne sais pas combien de temps il nous faudra pour débarrasser notre société du harcèlement de rue, des violences sexuelles, de toutes les agressions sexistes dont bien trop de femmes sont victimes.
En revanche, je sais combien de temps il nous faudra, à ce rythme, pour atteindre l’égalité salariale en France : 60 ans. Ce sera pour 2077, sauf à agir volontairement dans ce sens. Et en 2186 pour le reste du monde, selon ce rapport du World Economic Forum.
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Alors cette année, l’écart salarial moyen entre les femmes et les hommes est encore d’environ 15%, et selon ce chiffre retenu par Les Glorieuses pour effectuer leur calcul, cela équivaut à 38 jours ouvrés.
Les femmes qui travaillent en France peuvent considérer qu’elles ne sont plus rémunérées pour leurs activités professionnelles jusqu’au 31 décembre.
Alors, à 16h34, vous pouvez arrêter de travailler pour protester contre cette situation, qui que vous soyez, quel que soit votre genre. Quel que soit votre niveau de rémunération.
Notre genre ne devrait conditionner ni notre accès à l’emploi, ni notre niveau de rémunération. Et nous ne devrions pas avoir à attendre 60 ans pour que cette situation appartienne enfin à un passé que nous ne regretterons pas.
15% d’écarts de salaire en moyenne entre les femmes et les hommes
Ce pourcentage, c’est celui partagé par Les Glorieuses, qui se base sur des données d’Eurostat de 2010. En rafraîchissant un peu les données, cet écart est plutôt de 14% (données 2013, source INSEE) au niveau médian des salaires.
Autre information intéressante, l’écart varie en fonction du niveau de salaire : plus les salaires sont bas, plus l’écart se réduit, avec 8% de salaire en moins pour les femmes parmi la tranche la moins bien payée de la population.
Inversement, quand les salaires s’envolent, c’est aussi le cas des inégalités qui caracolent à 22% de salaire en moins pour les femmes pour les salaires les plus élevés, comme l’explique l’Observatoire des inégalités.
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