— Publié le 3 juillet 2013
J’étais persuadée que la fête des grands-mères était en juillet. Que nenni, c’est le premier dimanche de mars. Tant pis, j’ai le droit de parler de ma grand-mère quand je veux.
Quand je fais des mots croisés
Dans mon enfance, ma grand-mère n’était pas particulièrement adepte des cahiers de vacances ou des visites pédagogiques. En revanche je pense avoir suivi l’équivalent de cinq ans de cours intensifs de mots croisés grâce à elle. Dans notre petit fauteuil, chacune avec notre grille, moi force 2, elle force 57, et sa pédagogie toute particulière de cruciverbiste :
– Poisson en trois lettres ? Mais je connais aucun poisson en trois lettres moi… – Ide. – Plaît-il ? – Ide. I-D-E. C’est le mot que tu cherches. – C’est quoi ? – Un poisson. – Mais quoi comme poisson ? – Un poisson qu’on trouve que dans les mots croisés. – OK. Merci mamie.
Puits de connaissances en 5 lettres : mamie
Quand je fais des boutures
Je ne trouve pas que le jardinage soit particulièrement un truc de mamie. En revanche l’art de la bouture me fascine au plus haut point. J’ai vu ma grand-mère maîtriser la technique pendant des années sans jamais réussir à la reproduire (en même temps j’arrive à faire crever des cactus IKEA).
La simple prononciation du mot « bouture » suffit à m’évoquer mon aïeule préparant consciencieusement ses petits pots de terreau sous la véranda. Ma grand-mère c’est un peu Jésus : elle multiplie les géraniums. Elle n’allait pas acheter une barquette entière de fleurs alors qu’un seul pot aurait suffi à son jardin. Hors de question de se faire arnaquer par le vendeur de Jardiland qui lui fait du gringue (d’après elle).
Quand je cuisine de A à Z
Ma grand-mère cuisine plutôt bien (doux euphémisme) mais elle sait vivre avec son temps. Plats surgelés, mayo en tube, chips arôme E404… Ses placards regorgent de cochonneries que je m’empêche d’acheter pour ne pas sombrer dans l’anarchie. Si c’est « nouveau et pratique », ça vaut le coup : une vraie groupie de l’industrie agro-alimentaire !
C’est vrai qu’avoir un bocal de sauce tomate toute prête « ça va quand même plus vite » (même si elle n’arrive pas à l’ouvrir) et que passé 80 ans j’en aurai probablement plus grand-chose à faire d’avaler des matières grasses hydrogénées, tant que ça me laisse plus de temps libre (pour mes boutures par exemple).
Je ne me suis jamais sentie aussi proche de ma grand-mère que le jour où je me suis mise en tête de faire des lasagnes maison. De A à Z : la pâte, la sauce à partir de vraies tomates — bon, je n’ai pas tué le boeuf, mais presque. Ça m’a pris au moins toute une journée (peut-être davantage, j’avais perdu toute notion du temps). Le progrès, ça a du bon.
Quand je me transforme en pin-up vintage (tous les jours, comme vous vous en doutez)
Une année où l’été fut pluvieux (dans la dernière décennie en gros), j’ai entrepris des fouiller dans toutes les boîtes à chaussures poussiéreuses de ma famille et j’ai récolté un nombre conséquent de vieilles photos en noir et blanc.
C’est à cette occasion que j’ai découvert que nos grand-mères étaient toutes des bombasses. Depuis, chaque fois que je porte une capeline, une gaine ou une paire de bas, j’ai la sensation de transporter un demi-siècle de classitude avec moi-même
Ça n’a que des avantages, sauf quand je suis en train d’enlever mes bas langoureusement devant Charles-Henri et que c’est à ce moment-là que mémé se rappelle à mon bon souvenir.
Quand j’enregistre un programme télé
L’enregistrement des programmes télé, c’est dépassé. D’abord à la télé, « y a que des rediffs » et « de toute manière tout existe en replay ». Ajoutons à cela la concurrence du streaming et du téléchargement : forcément, il n’y a aucun intérêt à se lancer dans l’enregistrement.
Pourtant je trouve qu’il y a un charme surranné à prendre le temps de programmer les horaires de début et de fin d’enregistrement. Je pense toujours à ma grand-mère qui regarde chaque touche de la télécommande avant d’appuyer dessus. Enregistrer demande un peu d’organisation : il faut anticiper mais c’est aussi programmer un temps pour s’occuper de soi.
Planifier un après-midi emmitouflée dans un plaid avec une tisane pour regarder le Navarro diffusé au milieu de la nuit précédente, ça n’a pas de prix ! (Est-ce qu’on parle toujours de ma grand-mère ou est-ce un aveu coupable ? Le doute est permis.)
« Mais c’est pas Navarro ! » « Et comment ça se fait que tu le saches ? »
Quand le monde va trop vite pour moi
Une actualité politique bouillonnante, des dizaines de pays à découvrir et des collégiens qui utilisent déjà un langage que je ne maîtrise plus : tout cela me donne le tournis. Je suis toujours incapable de maîtriser les écrans tactiles de smartphone (gros déficit psycho-moteur) et quand mon PC plante inopinément il m’arrive d’utiliser la même astuce de Castor Junior que ma grand-mère, à savoir « bon, on va débrancher la prise, parfois quand on rebranche, ça remarche ».
De manière générale, face aux galères de l’inconnu, ma grand-mère a tendance à se raccrocher à ce qu’elle connaît bien. C’est souvent la bonne stratégie pour ne pas céder à la panique. J’en prends note pour ma vie future.
« Non mamie, à une main, comme ça » « Saperlipopette, J’ai fait une écharpe » sur lefthandedtoons.com
Et toi, il y a des moments ou des activités qui te font penser à tes grands-parents ?
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Les Commentaires
Donc à chaque fois que je vais chez elle je regarde, même si j'achète rien, ça occupe ^^
Les Malabars sont également un gros souvenir de chez elle ! Il n'y a pas que chez elle que j'en mangeais, mais à chaque fois elle nous en achetais un bonne dizaine, donc ça m'a plus marqué que quand j'en achetais qu'un ^^
Le tricot, parce que c'est elle qui m'a appris.
Et à chaque fois que j'entends mentionner les Père Castor, je pense aux après-midi chez elle où je regardais les cassettes !
Sinon, à chaque fois que je joue au Trivial Pursuit et que je tombe sur une question littérature, je pense à mon autre mamie parce que c'est une crack ! (Professeure de français, de latin et de grec ancien, s'il vous plaît)