Samedi dernier, en rentrant chez moi, je suis tombé nez à nez avec un ragondin tout pâle en pleine redescente. Puis, était-ce la marque des lunettes de piscine sur son museau ou le fait que ma porte fait face à un miroir, j’ai compris que ce charmant rongeur, c’était moi.
Cette déconvenue, je l’ai outrepassée sans peine, car j’étais déjà furax (du latin furax). Moi, moche et mouillé, j’avais été malmené soixante minutes durant en allant à la piscine municipale. Mon humide laideur n’était plus qu’un détail.
Les lieux publics ont parfois un énorme inconvénient. Des gens qui ne sont pas moi les fréquentent. C’est pénible. Les piscines ne font pas exception à la règle. C’est donc dans mon appartement où les Pullitzer font office de bibelot et avec mon triste reflet pour partenaire que j’ai compris que c’était à moi, mi-homme, mi-daurade, de rétablir la justice.
Voilà donc les 5 choses que l’on (je) ne veut plus souffrir à la piscine.
1. Les gens qui perdent leurs pansements
On vous a entaillé le pied à la hache (ou un patin à glace vous a lacéré le panard, chacun ses dimanches) ? Vous vous êtes pris l’orteil dans un coin de table ? Vous avez plus d’ampoules sur la cheville qu’il n’en faut pour le spectacle son et lumière du Futuroscope ? Gardez vos santiags (et donc vos pansements) et restez hors du bassin.
La longue chute de votre pansement vers le fond de la piscine ne fait rêver personne. Quand Alain Bernard et moi fonçons à toute berzingue à travers les longs couloirs, il nous arrive de boire la tasse (surtout lui). Je ne veux pas de jus de vous dans mon verre de chlore, s’il vous plaît. Et je peux assurer sans trop me mouiller (rires) que lui non plus.
2. Les gens qui restent au milieu des lignes
Quoi ? Vous n’êtes pas là pour la perf’ ? Mais que dirait Philippe Lucas (mon inspiration platine, je dois l’avouer) ?
Tout est pardonné. Et puisque le monde est bien fait (sauf les États-Unis), il existe plusieurs couloirs ! Et quand vraiment les planètes s’alignent, l’humanité se classe par vitesse. Chantal Chandail peut se laisser dériver d’un bord à l’autre sur la droite du bassin et Toxic Patrick peut lâcher son meilleur papillon tout à gauche.
Mais qu’est-ce qu’une belle histoire sans son élément perturbateur ? Élément qui prend parfois les traits de Manu Mascu, l’homme qui peine à partager l’espace public jusque dans l’eau, Isabeau Chaos, toujours à contre-courant ou encore cette aristocrate qui pile, acte notarial dans la main, comme si le bassin était le sien.
3. Les Jean-Michel Perv
Il possède un slip de bain avec le persil qui dépasse du cabas, trois cheveux brossés en arrière et un sérieux problème avec la pudeur. Jean-Michel Perv est de tous les bassins. Son moment préféré ? La douche.
Et le pire, c’est que Jean-Michel peut défiler pour Balenciaga. Le problème reste le même. Quand on se trimbale en maillot, les murs ont des yeux.
À la piscine plus qu’ailleurs, un regard bien appuyé (dans le meilleur des cas) suffit à faire d’une simple baignade une séquence extrêmement humiliante. Donc, le scanner malvenu de Jean-Michel, c’est non.
4. Les gens qui nagent en sous-vêtement
Là, comme ça, ça semble tordu. Mais je suis un journaliste de terrain. Tout ce que je vous dis est vrai. Testé et désapprouvé.
Quelle ne fut pas ma surprise en croisant dans ma ligne d’eau un petit homme avec un semblant de sac plastique transparent ficelé autour de la taille, un caché-dévoilé qui n’a rien à envier aux plus belles pièces de Mugler. Et oui, les slips blancs vivent mal l’épreuve de l’eau. Mais René l’intrépide (le nom a été changé pour des raisons évidentes) n’en a cure. You go girl.
Attention, nuance de taille. René l’intrépide et Jean-Michel Perv ne sont pas nécessairement la même personne. Si René a fait l’économie d’un maillot, il peut le faire sans un regard déplacé pour autrui.
5. Les Catherine et Liliane qui papotent en bout de ligne
On les connaissait au bureau à bitcher sur le commun des mortels. Découvrez-les dans votre piscine, bonnet de bain sévèrement vissé sur le crâne (ou porté plus ample, à la manière d’un skateboarder sexy des années 1990) !
Tout lieu public est un lieu de sociabilité (groundbreaking, trailblazing, scuba-diving). Sauf qu’on ne choisit pas la natation pour rien. Une fois la tête sous l’eau, vous pouvez vous épargner l’avis de votre collègue Fabrice sur la météo ou la politique monétaire de la République tchèque.
Si vous devez absolument pérorer sur le prix du melon, grand bien vous en fasse, mais laissez-nous, grands sportifs aux muscles saillants, fendre les flots, effectuer la plus ravissante des culbutes avant de repartir dans un crawl parfait (Paris 2024 ou rien).
Il reste bien des maux que ma plume saillante pourrait dénoncer. Les gens démesurément présentables alors que je possède le capital esthétique d’une huître à marée basse, les adolescents qui ont la moitié de mon âge et le double de mes capacités pulmonaires, les enfants qui pissent dans l’eau…
En vérité, faites ce que vous voulez, du dos crawlé le plus endiablé à cette nage indienne énigmatique dont vous avez le secret. Mais à la piscine comme ailleurs, n’oubliez pas que vous n’êtes pas le seul poisson dans l’eau.
À lire aussi : J’ai tenté la natation synchronisée avec une championne du monde et ce fut un très long moment de vie
Crédit photo image de une : Stranger Things / Netflix
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Les Commentaires
Le pire que j'ai connu?
Un nageur régulier qui laissait derrière lui une trainée digne de l'eau de rinçage d'une serpillère de bar. Je suppose qu'il était alcoolique, dégager une odeur pareille c'est impossible avec juste une bière occasionnelle.
Sinon sans rapport avec l'hygiène (ou presque), le comportement hyper malaisant pour moi c'est les mecs (jamais des femmes tiens) qui pendant la douche poussent des soupirs/râles/grognements d'aise POURQUOI ils font ça? le pire c'est quand ils sont dans des cabines fermées et qu'on les entend quand même, c'est à se demander si ils ne font que se laver