L’excuse de la migraine étant dépassée depuis l’invention de l’aspirine (1899), il est temps de changer de répertoire. Aujourd’hui, l’esquive du sexe est devenu un art de ninja : il a ses gourous, ses figures imposées et ses championnats du monde retransmis sur Râteau TV. On dit que les moines Shaolin l’ont inventé. On murmure que le film La Fureur du Dragon n’est qu’une métaphore de la colère d’un homme rejeté. Autant dire qu’en 2010, manquer de subtilité face à son partenaire, par exemple en accueillant son érection par un simple « j’ai sommeil » ou « j’ai pas envie » serait d’une inélégance totale. Votre mec mérite mieux que ça.
1. On fait un Street Fighter ?
C’est ma préférée. Je l’utilise contre mon copain qui l’utilise aussi contre moi, du coup, on ne fait jamais l’amour. Par contre avec Chun Li, on tabasse sévère. A noter que ça marche avec n’importe quel jeu vidéo. Vous saviez que les premiers Atari ont été sponsorisés par les lobbys pro-abstinence ? Y’a pas de hasard.
2. Faut qu’on parle.
C’est un peu l’arme de destruction massive anti-érection. Peu importe ce que vous ajouterez ensuite, ces trois syllabes viennent à bout du mec le plus motivé. La perspective d’une prise de tête est scientifiquement incompatible avec une libido.
3. Je finis juste mon chapitre.
Une envie de sexe, c’est passager. Pourvu que votre prétendu chapitre dure plus de trois pages, votre copain sera passé à autre chose. En plus, se voir préférer Twilight à la position de la loutre sur le lotus, ça vous rappelle tout de suite le sens des priorités.
4. Mes règles sont en retard, j’ai dû m’embrouiller dans ma pilule.
C’est un classique mais c’est toujours efficace. Le mâle, rappelé à ses responsabilités et au contrôle de ses spermatozoïdes, le cerveau empli de visions cauchemardesques de couches-culottes et de mercredi après-midis perdus, se mettra à gamberger pendant deux heures. Or dans deux heures, vous, vous dormirez comme un loir.
5. Je crois que j’ai une petite infection.
Vous dites « petite infection », l’homme comprend « machin douloureux, durable, peut-être pourvu de dents ». Expliquez que ça gratouille, ou que ça fait un peu mal. Si l’envie vous prend, quelques instants plus tard, de finalement vous jeter sur votre copain, dites simplement que c’était votre culotte qui vous avait irritée. Les garçons ne posent jamais de questions.
6. Je me sens pas belle.
Un peu de victimisation gratuite, ça sonne toujours vrai. Commencez à vous plaindre de votre cellulite : non seulement c’est à mourir d’ennui mais ça énerve. On appelle ça, en langage technique, le double impact.
7. Ta mère a appelé.
Ou pire, si vraiment vous êtes méchante : « au fait, ta mère a appelé. » Ce « au fait » devrait totalement perturber le mâle. En langage technique ? Blam, dommage collatéral.
8. Écoute, c’est pas le moment.
A prononcer avec un regard lourd de sous-entendus. Inutile d’ajouter quoi que ce soit. Si vous ne savez pas pourquoi c’est pas le moment, lui, il le sait (chaussettes abandonnées, vaisselle pas faite, amante dans le placard, etc). Un couple qui tient est un couple qui sait jouer sur la ligne étroite entre amour et terreur.
9. J’ai pas envie de faire ça bêtement.
Inventez un super fantasme irréalisable dans la minute, nécessitant une bonne semaine de préparation. Non seulement vous esquivez, mais vous donnez du grain à moudre à un copain totalement ravi. En plus, dans une semaine, vous ferez l’amour pas bêtement. Ce qui est chouette. Au pire, une semaine pour inventer une nouvelle excuse, ou déménager, c’est un délai idéal.
10. Prout.
Bah oui. Ce n’est pas une phrase mais ça casse quand même bien l’ambiance et, après tout, on aurait tort de se priver des classiques inspirés de la cuisine mexicaine. Pois chiches à midi, haricots le soir, et vous pourrez dégainer votre arme à volonté : munitions illimitées !
Certaines demanderont peut-être, pourquoi ruiner une ambiance sexe ? Les réponses sont multiples. Parce qu’on peut. Parce qu’on veut. Parce que sans grands moments de vide sexuel, pas d’extase possible. En ces temps de jouissance obligatoire et téléguidée, ça fait du bien de se poser trois minutes. Avec un bouquin et une aspirine, par exemple.
— Dessins Maud Benaddi
Outre ses agissements sur madmoiZelle, Maïa Mazaurette est également connue pour écrire d’une main de maîtresse dans son blog Sexactu.com.
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Les Commentaires
Le temps qui j'y aille et que je reviens, lui il s'est ré habillé et mis devant l'ordi
c'est pas ma faute si j'ai une petite vessie et que l'envie vienne juste quand môssieur désire un câlin...