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Arts & Expos

Philippe Parreno, un artiste-OVNI qui vous veut du bien

Philippe Parreno, actuellement à l’honneur au Palais de Tokyo, est un artiste contemporain qui vaut le détour !

Si comme moi vous avez passe? une semaine grise et froide, a? vous faire crachoter au visage par le ciel de Paris, de France ou de Navarre, et si par-dessus le marche?, vous n’avez rien pre?vu de re?jouissant pour ce week-end, allez donc faire un petit tour au Palais de Tokyo, vous m’en direz des nouvelles !

Re?pondant a? l’invitation du muse?e, qui lui a laisse? carte blanche, Philippe Parreno investit, jusqu’au 12 janvier 2014, les quelques 22 000 m² de salles d’exposition, de couloirs et de recoins que totalise de?sormais le palais de Tokyo. Oui rien que c?a !

De quoi normalement, vous perdre ou vous e?cœurer a? vie de l’art contemporain, c’est selon ! Pourtant je peux vous assurer que cette exposition n’est pas une enfilade e?puisante d’oeuvres d’art, a? la queue leu leu, et vous n’y resterez pas indifférent-e-s.

?Dans Anywhere, anywhere out of the world, Philippe Parreno e?labore un dialogue constant entre ses œuvres et l’architecture de ce muse?e ge?ant. Ses installations sont dispose?es dans un de?cor e?pure?, ou? elles jouent avec les particularite?s propres a? chaque pie?ce : hauteur de plafond hallucinante, superficie gigantissime, manque de lumie?re, et autres ale?as architecturaux impose?s par le lieu. Tout ce qui aurait pu e?tre un handicap pour d’autres semble e?tre un atout pour Philippe Parreno.

Il re?ussi tre?s subtilement a? apprivoiser ce lieu en jouant avec le vide, l’obscurite? et le silence pour donner plus de force aux objets, a? la lumie?re et au son.

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Sans trop s’emballer, on pourrait me?me aller jusqu’a? dire de cette exposition qu’elle est une « œuvre d’art totale », autrement dit une œuvre dans laquelle l’artiste utilise de nombreux me?diums, ainsi que diffe?rentes disciplines artistiques.

Installation, dessins, vide?os, performances, peintures… Parreno ratisse large ! Il fait partie de cette cate?gorie d’artistes qui ont choisi de ne pas se limiter a? une pratique particulie?re, mais de pluto?t utiliser ce dont ils ont besoin, au moment ou? ils en ont besoin. Une sorte de nomade de l’art contemporain, sculpteur un jour, vide?aste le lendemain, selon l’humeur !

Un nomade qui nous emme?ne avec lui au travers de paysages sonores et sensoriels. Il faut avoir passe? une vingtaine de minutes dans l’exposition, pour prendre conscience du fait que le son est omnipre?sent.

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De?s l’entre?e, avant me?me de les avoir vus, on perc?oit les e?chos de quatre gros pianos noirs, qui nous jouent une version revisite?e de Petrouchka, une symphonie compose?e par Igor Stravinski en 1910. Cette me?lodie nous accompagne ensuite dans quasiment tout le muse?e. On entend les premie?res notes, on cherche d’ou? vient le bruit, et quand on a re?solu le myste?re, on passe a? autre chose. Elle devient alors une sorte de musique d’ambiance, un peu comme s’il s’agissait de la bande son de notre visite.

Il arrive souvent que les sons se parasitent entre eux. L’artiste en a rempli l’espace d’exposition. Certains sont tre?s puissants et d’autres beaucoup plus discrets, comme ceux des pas d’un danseur invisible, qui donnent la sensation aux spectateurs que quelqu’un se de?place sur le sol, le plafond et les murs. Une œuvre pluto?t belle, mais encore faut-il l’avoir perc?ue ! Il m’a fallu faire une deuxie?me visite pour la de?couvrir.

Et puis il y a les infra-basses, ces vibrations constantes qui semblent sortir de partout. Peut-e?tre produites par les œuvres, les lumie?res ou les robots, allez savoir ! Des sons qui paraissent a? peine audibles quand on visite les e?tages supe?rieurs, mais qui prennent de plus en plus d’ampleur, a? mesure que l’on s’enfonce dans les sous-sols du palais.

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Parreno nous fait traverser des paysages de banquise, des de?serts noirs, des lieux fictifs, dans des salles bien re?elles ou? il fait de plus en plus sombre. L’artiste joue e?norme?ment du rapport entre la lumie?re et l’obscurite?, et s’arrange au passage pour nous perdre et nous de?stabiliser.

C?a commence avec le gigantesque e?cran lumineux qui vous de?fonce les yeux, alors que vous allez gentiment acheter votre billet d’entre?e, c?a continue avec une salle d’exposition qui s’e?teint d’un coup au moment ou? vous la traversez, ce qui a pour but de re?ve?ler les se?rigraphies phosphorescentes accroche?es aux murs.

Il y a aussi la rediffusion d’un match de Zidane, en simultane?, sur 17 e?crans. Un Zizou lumineux et de?multiplie?, qui vous causerait presque des renvois de coquillettes-jambon.

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Et puis a? l’inverse, comme je le disais plus haut, plus on progresse dans l’exposition et plus il fait noir. Les couloirs que nous empruntons sont e?claire?s par quelques spots lumineux. Une ambiance un peu anxioge?ne qui peut nous amener a? douter : « est-ce que c’e?tait le bon chemin ? Est-ce que je suis sortie de l’exposition sans le faire expre?s ? Fallait-il prendre a? droite en sortant des toilettes ? ».

Et tous ces doutes sont justifie?s, car en temps normal nous n’aurions rien a? faire la?. Ces espaces sont habituellement ferme?s au public

, si bien qu’il n’est pas rare de croiser dans un couloir une femme de me?nage qui traîne son chariot de produits d’entretien, ou le cuisinier du restaurant du muse?e qui passe dans une salle vide, sans nous voir… Bon, bien sûr, faut pas s’attendre a? ce qu’un squelette vienne vous chatouiller le cra?ne fac?on train fanto?me, mais je dois avouer tout de me?me, que pour une trouillarde comme moi, la fin de l’expo s’est accompagne?e de quelques frissons !

?Il vous faudra ouvrir grand vos yeux et vos oreilles, si vous ne voulez pas passer a? co?te? de certaines œuvres, car me?me si l’espace peut sembler vide au premier abord, il se peut que l’artiste re?ussisse a? vous surprendre : avec lui tout est susceptible d’e?tre une œuvre.

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Il est donc ne?cessaire de prendre son temps, de de?ambuler, de fouiller, et de s’accorder le droit de revenir en arrie?re, pour saisir toutes les subtilite?s du travail de Parreno.

Je vous dis c?a, mais apre?s tout, vous pouvez aussi bien la faire en courant, et passer rapidement d’une pie?ce a? l’autre. Vous pouvez la faire de jour comme de nuit (c’est un des avantages du Palais de Tokyo), et y retourner plusieurs fois, seul-e ou accompagne?-e. Philippe Parreno dit, a? ce propos, avoir pense? l’exposition comme un lieu coupe? du monde, un ailleurs on l’on pourrait revenir a? chaque fois qu’on le de?sire.

C’est encore le titre de l’exposition qui illustre le mieux la volonte? de l’artiste. Anywhere, anywhere out of the world (comprenez « n‘importe ou?, n’importe ou? pourvu que ce soit en-dehors du monde ») est une citation d’Edgar Allan Poe qui nous introduit pluto?t bien a? l’univers de Philippe Parreno.

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Un univers dans lequel on e?voluerait toujours a? demi-re?veille?-e, a? demi-endormi-e, en proie a? des re?ves e?tranges, dans lesquels les machines dessinent a? la place de l’artiste, ou? l’on peut pousser une bibliothe?que et de?couvrir une pie?ce secre?te ; un univers ou? les tableaux changent, ou? les objets semblent avoir gagne? leur inde?pendance, et e?voluent de?sormais sans nous. Philippe Parreno rame?ne me?me Marilyn Monroe a? la vie ! Son fanto?me, du moins (c’est un bon artiste, mais quand me?me, il a ses limites)…

Et ce n’est pas la seule revenante qui soit convie?e au spectacle : il y a aussi Ann Lee, ce personnage de manga dont Philippe Parreno et Pierre Huyghe ont rachete? les droits pour offrir a? d’autres artistes le loisir de lui cre?er une histoire, un passe?. Pour cette exposition, c’est Tino Segal qui s’est empare? de ce personnage et qui a de?cide? de lui donner vie.

Au de?tour d’une salle, apre?s s’e?tre assis-e devant la vide?o présentant une Ann Lee virtuelle, on se retrouve devant une Ann Lee en chair et os, qui s’adresse a? nous, du haut de ses 11 ans, avec des gestes un peu machinaux, un peu saccade?s. Elle pose des questions aux spectateurs : « est ce que vous allez bien ? » — silence de mort, personne n’ose re?pondre. « Ok, prenez soin de vous »… et elle s’en va aussi vite qu’elle est arrive?e.

Bref cette exposition est un OVNI, et me?me si je pourrais encore trouver des choses a? vous raconter, le mieux c’est d’aller voir tout c?a par vous-me?me ! Elle pourra, cependant, vous sembler un peu complexe. Mais que celles qui ne fre?quentent pas souvent les muse?es se rassurent : le Palais de Tokyo a mobilise? une arme?e de me?diateurs culturels, tre?s compe?tents, pour vous accompagner tout au long de la visite, et re?pondre a? toutes vos questions.

Et en partant, n’oubliez surtout pas d’aller chercher le DVD, offert par Philippe Parreno, dans lequel vous retrouverez une des plus chouettes vide?os de l’exposition. Un DVD a? usage unique qui s’efface juste apre?s avoir e?te? visionne?.

Infos pratiques

  • Anywhere, anywhere out of this world, jusqu’au 12 janvier 2014
  • Palais de Tokyo, 13 avenue du Président Wilson, 75 116 Paris
  • De midi à minuit, tous les jours sauf le mardi
  • Tarif plein 10€ / Tarif réduit 8€ / Gratuit sous conditions

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Les Commentaires

1
Avatar de Roughie
27 novembre 2013 à 13h11
Roughie
Ohoui ! Jai adoré cette expo ? j'y ai vraiment retrouvé tout ce que je cherchais dans un musée : un truc où on est obligé de se déplacer pour vivre l'expérience. Y a beaucoup de choses dont on peut avoir une grosse idée sur internet maintenant, mais celle là faut vraiment y aller pour réaliser, même une vidéo ne traduit pas bien la fameuse salle des lumières ?
Et je l'ai trouvée très accessible moi, beaucoup de gens se diront wtf mais y en a pour tous les gouts et c'est ludique. Et si y a encore l'expo sur les chaussures à côté, le combo des deux est vraiment parfait ?
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