L’association Human Rights Campaign a décidé de décerner un prix honorifique à la Kesha, qui a toujours été ouvertement engagée pour l’égalité, ce que souligne Blake Brockway, co-animateur du 21ème dîner annuel de l’organisation :
« Kesha a ouvertement utilisé son influence et son rayonnement international pour porter l’attention sur les inégalités vécues par les membres de la communauté LGBT. Nous sommes fièr•es de l’accueillir au dîner de HRC Nashville pour l’égalité, et de lui rendre hommage avec le Visibility Award de cette année »
Kesha est bisexuelle, elle en a parlé publiquement en 2013, et contrairement à ce qu’on peut lire sur sa page Wikipédia française, ce n’est pas « une volonté de faire parler d’elle », mais plutôt une volonté de faire parler des discriminations dont continuent de souffrir les personnes LGBT !
Ce qu’elle a confirmé en délivrant un discours d’acceptation déterminé, et particulièrement émouvant compte tenu des circonstances : Kesha elle-même est en conflit avec son producteur, Dr Luke, qu’elle accuse de viol, mais avec lequel elle est contractuellement obligée de continuer à travailler.
« Comment Kesha a changé ma vie »
C’est le chanteur Wrabel qui présente son prix à Kesha, en revenant sur l’engagement personnel de la jeune femme :
« Je suis très honoré de présenter ce prix à ma chère amie Kesha. Le Visibility Award est remis à des personnalités qui utilisent leur influence publique pour faire avancer la cause des LGBT. »
Il raconte ensuite sa première rencontre avec Kesha, et combien il a été touché par la sincérité et le naturel de la pop star, qui était déjà très connue à ce moment. Il avait peur d’être déçue par une diva hautaine et autocentrée, ce qui ne fut absolument pas le cas.
En s’intéressant aux « Animals », la communauté des fans de Kesha, il a été ému par la vidéo de Mattie, jeune femme transgenre qui témoigne face caméra.
https://youtu.be/Qevt3Oip53w
Warbel continue :
C’est si rare de rencontrer des gens qui sont réellement impliqués
« J’ai partagé cette vidéo à Kesha, qui l’a regardée et a envoyé un message à Mattie. J’ai été touché de réaliser à quel point elle s’implique réellement, et je me suis demandé ce que Mattie avait dû ressentir. C’est tellement rare dans l’industrie du spectacle, dans ce monde, en fait, de rencontrer des gens qui sont réellement impliqués.
Kesha est quelqu’un qui a le coeur brisé par les gens qui ont le coeur brisé, elle offre aux « monstres », aux « hors normes » et autres « inadapté•es » un espace sans jugement, elle leur donne la force de se libérer de leurs peurs, et de vivre leurs vies à coeur ouvert, et à pleine voix. »
Warbel termine son introduction en remerciant Kesha pour son amitié et son soutien.
« J’ai une connexion profonde avec la communauté LGBT »
Très émue, Kesha a remercié HRC pour cet honneur :
« La popularité est étrange, et pas naturelle, et j’en suis reconnaissante essentiellement parce qu’elle m’a mise dans une situation où je peux utiliser ma voix pour agir de façon positive dans ce monde. Et c’est le plus important pour moi.
J’aime écrire des chansons, de la musique, mais le plus gratifiant dans tout ça, c’est ce pouvoir. »
Kesha a remercié toutes celles et ceux qui l’ont soutenue, qui ont manifesté leur solidarité lorsque le verdict a été rendu, et qu’elle n’a pas obtenu la rupture du contrat la liant toujours à son producteur, qu’elle accuse de viol. Un épisode visiblement douloureux, qu’elle paraphrase pudiquement en « je traverse quelques trucs personnels ».
« Je suis venue vous parler aujourd’hui de quelque chose qui a marqué ma vie, et qui nous réunit tous et toutes ici : j’ai une connexion profonde avec la communauté LGBT, depuis que je suis toute petite, ici à Nashville. À cette époque, j’était une petite fille bizarre, avec des vêtements faits-maison surprenants, pas très douée pour se fondre dans le décor.
Comme vous pouvez le voir, ça n’a pas vraiment changé ! »
Effectivement, niveau look, ça ne passe pas le tapis rouge sans déchaîner la presse people !
« Nous étions harcelé•es parce que nous étions nous-mêmes »
« Ma mère m’a appris à aimer tout le monde, elle m’a appris que nous étions tous égaux, non seulement entre les hommes, mais elle m’a également enseigné le respect aux animaux, que nous devrions tous aimer tous les êtres vivants.
Ces convictions ne m’ont pas toujours permis de bien m’intégrer. Je me suis souvent sentie à part, c’est pourquoi je me rapprochais d’autres personnes singulières, souvent au sein de la communauté LGBT. Sauf qu’à cette époque, on ne savait pas ce que « LGBT » voulait dire.
On savait juste qu’on était harcelé•es lorsque nous étions nous-mêmes, on nous méprisait parce que nous étions « différent•es », qu’on nous poussait à cacher ce qui nous rendait uniques.
La musique était mon exutoire. J’ai commencé à écrire et enregistrer des chansons, de célébration et d’amour de soi, en quête d’un paradis rock’n roll.
Je voudrais vraiment donner à d’autres la confiance d’être eux-mêmes, et la réassurance qu’ils ne sont pas seuls. »
« Je ne veux pas vivre dans un monde où se traite comme ça »
Kesha continue en témoignant qu’être une star internationale ne l’a absolument pas protégée contre les critiques. Qu’elle subit toujours des commentaires et des insultes, juste parce qu’elle ne cache pas ce qu’elle est. (Oui je parle de vous les rédacteurs de sa page Wikipédia France, et des médias qui vous ont servi de source pour écrire que son coming out était un coup de pub : ça fait précisément partie de ces jugements blessants qu’elle dénonce dans ce discours.)
Kesha dénonce les lois américaines anti-égalité
Visiblement très émue, Kesha se reprend pour dénoncer très vivement les inégalités de droits des couples de même genre et des personnes LGBT vivant aux États-Unis. Elle se félicite de la décision de la Cour Suprême qui a finalement rendu le mariage pour tous légal dans tous les états. « Ça a mis le temps ! » souligne-t-elle.
« Je suis fière que ce soit notre génération, celle qui s’est levée pour promouvoir l’égalité. Nous envoyons le message à ceux qui nous gouvernent, que toute forme de discrimination institutionnalisée est tout simplement inadmissible. […]
Nous sommes tous égaux. Ce principe est un fondement de notre pays, mais il n’est pas encore une réalité. Aujourd’hui encore, nous avons des candidat•es à l’élection présidentielles qui sont contre le droit au mariage pour les couples de même sexe.
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« Nous n’accepterons plus vos double standards sexistes. »
C’est à nous de continuer à nous battre pour promouvoir l’égalité. Ce n’est pas « OK » de juste baisser la tête, et d’accepter quelque chose que nous savons injuste. Nous devons nous battre pour ce qui est juste, même si c’est difficile et que le sort est contre nous. C’est ainsi que le progrès arrive, et nous savons que ce travail est loin d’être terminé.
Nous n’accepterons plus vos double standards sexistes.
Ici au Tennesse, en ce moment, il y a 25 projets de loi anti-LGBT en attente d’examen, pour la session parlementaire en cours. Une loi en particulier, empêcherait les personnes transgenres d’accéder aux infrastructures distinctes selon le genre, correspondant à leur genre [en clair NDLR : une loi empêchant les trans d’utiliser les vestiaires et les toilettes qui correspondent à leur genre, et non à leur genre d’assignation à la naissance].
C’est n’importe quoi. Je ne suis pas d’accord avec ça.
Dans plusieurs États des États-Unis, les personnes LGBT peuvent légalement être virées ou se voir refuser des prestations de services, à cause de leur orientation sexuelle.
C’est injuste. Je ne suis pas d’accord avec ça. Ça ne devrait pas être légal ! »
John Oliver dénonçait aussi ces inepties en faisant l’inventaire des droits des personnes trans, dans un récent épisode de Last Week Tonight.
Kesha termine son discours en encourageant chacun•e à élever la voix lorsque nous sommes témoins ou victimes de discrimination, et de ne jamais renoncer à être nous-mêmes :
« Nous ne pouvons pas avoir peur de nous battre pour notre propre dignité. Ce sont nos droits humains élémentaires dont il s’agit. »
Pour revoir l’intégralité du discours de Kesha, introduit par Wrabel, c’est par ici !
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Ce discours n’est pas sans rappeler celui qu’Ellen Page avait livré, en faisant elle son coming out, en février 2014.
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