Quand je suis arrivée à la projection presse du nouveau film d’Alan Rickman, je n’étais pas dans les meilleures conditions. Il pleuvait, j’étais sortie du boulot en retard, je n’avais pas de parapluie, et le chemin entre la station de métro et le cinéma était assez long pour me permettre de me tordre la cheville et de me présenter à l’accueil avec tout le panache d’un chien trempé et asthmatique.
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Bref. Autant vous dire que me faire mouiller avait rendu moins attrayante la perspective de découvrir Les Jardins du roi, et l’histoire d’amour au temps de Louis XIV que les premières images m’avaient promise. On a peu de patience pour les gens qui se bécotent sur grand écran quand on rêve d’être au sec sous sa couette.
Et pourtant ! L’eau, ça sèche (si), et quand bien même j’aurais conservé l’apparence d’une serpillère pendant les deux heures de film… Je n’en serais pas moins ressortie avec le coeur léger et le sourire aux lèvres.
Les Jardins d’Alan Rickman, a.k.a le Roi Soleil
Mais prenons les choses dans l’ordre. Pour commencer, oui, vous avez bien lu, Les Jardins du roi est une réalisation d’Alan Rickman – la seconde pour être précise. Ce film marque donc son grand retour derrière la caméra, puisque son tout premier, L’invitée de l’hiver (The Winter Guest), date de 1997. S’il n’était pas particulièrement joyeux, le film avait reçu de bonnes critiques pour une première réalisation.
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On est ainsi en droit de penser qu’Alan Rickman sait ce qu’il fait. Et ce malgré le changement radical de registre : Les Jardins du roi est avant tout une comédie romantique dont le casting a été établi avec soin. C’est Matthias Schoenaerts qui (re)donne vie à André Le Nôtre, le célèbre jardinier de Louis XIV, dont le morne quotidien s’illumine lorsqu’il rencontre Madame Sabine de Barra, un personnage en revanche fictif incarné par Kate Winslet.
Et ils sont si mignons.
Si on ajoute à ça le charisme de Stanley Tucci en fringant Duc d’Orléans, et celui d’Alan Rickman lui-même qui lâche la caméra le temps d’incarner le Roi Soleil… On part déjà gagnant.
Non mais, Alan Rickman en Roi Soleil. Je ne sais pas si vous vous rendez compte. Le rôle de sa vie, je vous dis.
Pour autant, le protagoniste principal n’est pas Louis XIV, mais Sabine de Barra, une veuve qui a su assurer sa prospérité (voire sa survie) sans se remarier, grâce à son talent de paysagiste. Suite à un entretien plutôt désastreux mené par le jardinier du roi lui-même, à la recherche d’une aide pour réaliser une pièce maîtresse des jardins, celui-ci finit néanmoins par l’inviter à Versailles, intrigué par l’originalité de cette femme qui détonne avec tout ce qui se fait à la cour.
Il faut dire que Sabine de Barra, la symétrie et la pelouse rasée de près typiques des jardins français, c’est pas son truc. C’est donc sans surprise qu’elle choisit de faire de sa carte blanche un projet ambitieux : une salle de bal en plein air qui deviendra le célèbre Bosquet des Rocailles.
Les Jardins du roi, un film feel good et bucolique
Bon, on s’en doute dès le départ, hein. Le Nôtre a beau faire celui qui n’y touche pas, et partir bouder dans son coin, on sait très bien qu’il joue la carte de l’indifférence pour essayer de pécho. En plus poétique, c’est un peu la rencontre de deux génies, introvertis et isolés au beau milieu de la cour du Roi Soleil, qui éprouvent une admiration mutuelle, s’apprivoisent, et finissent par trouver le bonheur. C’est une comédie romantique, quoi.
Mais pas que ! Pour avoir généralement du mal avec les histoires d’amour, je peux affirmer que Les Jardins du roi a fait battre ce petit coeur que l’on aurait pu croire absent de ma poitrine. D’abord, parce que Matthias Schoenaerts et Kate Winslet forment un duo parfait, et ont su rendre touchante la relation timide qui se noue entre leurs deux personnages, sans sombrer dans la mièvrerie.
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Ensuite, parce que l’intrigue principale n’est pas qu’une histoire de coeur, mais l’histoire de Sabine de Barra, cette femme qui va à l’encontre des conventions sociales de l’époque en travaillant, seule, et non mariée. Bon, je vous préviens tout de suite : Sabine de Barra n’a pas vraiment existé, et aucune jardinière n’aurait foulé le palais de Versailles pour entretenir des conversations inspirées avec Louis XIV. D’ailleurs Louis XIV, c’était pas Alan Rickman en vrai (désolée). Mais on aime à le croire le temps d’un film…
Et d’un beau film, qui plus est. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’Alan Rickman a soigné l’esthétique jusqu’au bout, et il s’est donné les moyens pour faire revivre la cour de Louis XIV et la splendeur de Versailles. On alterne entre le quotidien luxueux, surchargé et plein de faux-semblants des courtisans, et le cadre bucolique des jardiniers, volontairement isolés de la cour. Dans les deux cas, les images sont étudiées avec soin et ça en met plein la vue !
Excusez du peu.
Une mention spéciale, d’ailleurs, à la toute dernière scène du film. Sans spoiler, disons qu’elle symbolise parfaitement toute la magnificence et le second degré d’Alan Rickman en Roi Soleil…
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Et ce Roi Soleil qui signe ici une jolie réussite. Les Jardins du roi reste une comédie romantique assez simpliste et sans grandes surprises, mais qui fonctionne. Notamment grâce à un jeu d’acteur convaincant, et une histoire d’amour très douce et subtile qui produit un contraste agréable avec la frénésie de la cour de Versailles. Rien de tel pour vous réchauffer le coeur par une sombre journée pluvieuse !
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