Non, il n’y a définitivement pas de norme en ce qui concerne la sexualité.
Il y a les personnes qui préfèrent qu’on les touche comme ceci, celles qui ne vivent que pour une pratique en particulier… Et au milieu de tout ça, il y a aussi de nombreuses personnes qui n’ont tout simplement jamais d’orgasme.
Absence d’orgasme : faire l’amour sans jouir
Fin 2015, une étude que madmoiZelle relayait dans cet article partageait ces deux chiffres : près d’une française sur deux a régulièrement du mal à atteindre l’orgasme et 8% n’en aurait jamais eu. Un cas pas si rare donc, dont on parle pourtant très peu.
Une sexualité sans orgasme, ou anorgasmie, peut avoir des conséquences. Alors, pourquoi certaines personnes sont touchées et d’autres pas ? Et est-ce qu’il y a un moyen de jouir malgré tout ?
Pour en savoir plus, j’ai lancé un appel à témoins et une trentaine de femmes m’ont répondu. La majorité d’entre elles se trouvent dans des relations hétérosexuelles, mais l’anorgasmie peut apparaître quelque soit sa sexualité ou son genre, comme on peut le lire dans ce Josée l’Obsédée.
Ne pas avoir d’orgasme VS… le reste du monde
Dès le départ, de plusieurs répondantes ont tenu à préciser que le fait qu’elles n’aient jamais eu d’orgasme ne les empêche pas de considérer leur sexualité comme épanouie : pour elles, l’orgasme est un bonus et non quelque chose de primordial.
Pourtant, certaines admettent qu’il peut être délicat de parler de cette facette de leur sexualité à leurs proches. Elles n’ont pas envie de devoir se justifier, d’être prises en pitié, ou encore que l’on accuse leurs partenaires d’être un « mauvais coup ».
Camille a par exemple pris le parti de ne pas en parler à ses ami•es :
« Je sais qu’ils/elles auraient tendance à s’inquiéter et à vouloir me donner des conseils alors que j’ai simplement envie que les gens me laissent vivre ma sexualité comme je l’entends.
Je n’ai pas d’orgasme mais je m’en fiche, cela ne m’empêche pas d’avoir des relations, de prendre du plaisir. Si un jour j’ai un orgasme, et bien, ce sera un plaisir en plus… Mais ce n’est plus un but à atteindre ! »
Car ce qu’elles veulent, c’est surtout qu’on les laisse tranquilles… Alors, pour ce faire, plusieurs m’ont avoué simuler régulièrement. L’une d’entre elles admet ne l’avoir jamais avoué à son copain, avec qui elle est en couple depuis plusieurs années.
Il y a la peur que leurs partenaires ne se sentent pas assez performants d’un côté, et celle d’être anormale de l’autre. Et c’est dans cet entre-deux inconfortable que se situe le problème…
À lire aussi : Confessions d’une fille qui jouit très vite
L’orgasme, pas une performance à viser dans le sexe
Le problème n’est donc pas forcément l’absence d’orgasme en lui-même, mais plutôt comment il est perçu par leur entourage et par la société…
Jessica l’explique très simplement :
« Que ce soit dans les films, les séries ou les articles, on a non seulement l’impression que c’est aussi simple que de lécher un timbre, mais en plus, on dirait que c’est la fin obligatoire de tous les rapports sexuels !
Le tout en trois minutes trente et sans préliminaires… »
À lire aussi : 9 épisodes de série qui réchauffent le cœur (et le corps)
Un décalage avec la réalité qui a des conséquences, parfois sous forme de non-dits. Nimoudjia avoue se poser des questions quand son partenaire ne jouit pas… Et simuler de son côté pour qu’il ne se pose pas de question… Le serpent qui se mort la queue.
« Atteindre l’orgasme est presque devenu une injonction »
Alors pour en savoir plus, j’ai contacté Laura Cherfi. Elle est coach en sexualités positives et co-fondatrice des Chahuteuses, une association qui organise des évènements autour du corps et de la sexualité.
Elle m’explique recevoir un très grand nombre de femmes aux profils très variés, qui se plaignent de ne pas atteindre d’orgasmes.
« Le problème, c’est qu’atteindre l’orgasme est presque devenu une injonction. Beaucoup de meufs viennent me voir car elles sont complexées, elles se répètent qu’elles doivent lâcher prise, et ça fait l’effet inverse.
En plus de ça, il y a beaucoup de méconnaissance sur la vulve.
Par exemple, j’entends souvent des femmes dire que c’est anormal de ne pas avoir d’orgasme lors d’une pénétration, alors qu’en fait quand on voit où se trouve le clitoris, on comprend mieux que ce n’est pas forcément le moyen le plus efficace.
N’oublions pas que le vagin n’est pas forcément « câblé » pour donner du plaisir facilement. Il est fait pour faire passer un bébé sans que ça fasse trop mal.
Comme toute zone érogène, on peut l’éduquer au plaisir en le stimulant, en jouant avec, mais ce ne sont pas des sensations innées pour la plupart. »
Si l’orgasme n’est qu’une question d’éducation, est-ce que cela suppose une solution à l’anorgasmie ?
Et bien, on peut s’améliorer, mais ce n’est malheureusement pas si simple que ça.
Peut-on apprendre à avoir un orgasme ?
Selon Laura Cherfi, il peut y avoir de nombreux blocages au niveau mental. Cette situation créée en plus pour beaucoup un sentiment de culpabilité, qui empêche d’en parler librement. Comme une double peine, donc.
Elle m’explique alors travailler avec ses clientes sur le moment juste avant l’orgasme, quand le plaisir monte sans jamais atteindre son climax.
« Certaines passent l’acte à chercher en permanence ces trente secondes d’extases.
L’idée est de leur apprendre à plutôt se concentrer sur l’instant présent, donc à se concentrer sur le plaisir d’une caresse, d’un baiser ou de la pénétration par exemple.
Il y a deux buts à cette démarche. Le premier est d’arrêter de viser absolument l’orgasme afin de chercher plutôt un plaisir simple au présent et de se détendre.
Le deuxième est de travailler ainsi à découvrir le corps, ce que l’on n’aime ou pas. »
Laura Cherfi discute également avec ses clientes des motivations qui les poussent à pratiquer le sexe : encore une fois, beaucoup de gens restent dans l’idée de performance, de cases à cocher… Alors que cela ne devrait être qu’un moment de partage désiré mutuellement !
En fait, c’est comme l’image du chat et de la souris : l’orgasme est compliqué à attraper quand on lui court après.
Quels exercices pour prendre un peu plus de plaisir ?
On a vu, la quête absolue de la jouissance est souvent vaine. Viser l’orgasme, c’est souvent se mettre une pression supplémentaire alors que le corps doit justement se détendre pour l’atteindre. L’idée est donc d’éduquer son corps à prendre du plaisir et de se laisser l’opportunité d’y arriver, peut-être, par hasard.
Pour ce faire, Laura Cherfi propose notamment deux exercices relativement simples.
« Le premier consiste à se concentrer sur la respiration afin de se recentrer sur le moment présent.
Si vous avez déjà fait de la méditation, c’est le même principe : la respiration permet de se laisser aller et sentir au mieux les sensations qui traversent son corps.
Il y a aussi tout un travail à faire sur la contraction du périnée, le muscle des parois du vagin.
On a souvent encore une vision où celui qui pénètre bouge, et la personne pénétrée reste passive. Le périnée permet d’être actif en se contractant, en accompagnant le/la partenaire. Cela permet également de faire circuler le plaisir dans la vulve et de sensibiliser le vagin. »
Des moyens simples de se concentrer sur le plaisir. On dit souvent que le plus important n’est pas la destination mais le chemin, et ce chemin-là est parfois semé de surprises…
À lire aussi : 7 idées reçues sur l’orgasme féminin
Et si on avait des orgasmes sans même s’en rendre compte ?
Philippine, l’une des témoignantes, me raconte être en couple depuis plusieurs années. Elle s’amuse au lit, mais n’a jamais eu d’orgasme :
« Des fois je sens « monter » le plaisir et systématiquement je me dis « YES ENFIN »… Mais en fait ça redescend. »
Et c’est là que Laura Cherfi me confie quelque chose d’assez surprenant : on peut tout à fait avoir un orgasme sans même s’en rendre compte.
À force d’en parler partout comme s’il s’agissait forcément d’une énorme vague de plaisir qui fait perdre tous ses repères, on oublie que la jouissance peut être bien plus subtile !
« Il y a plein de tous petits orgasmes qui ne correspondent pas à l’idée que l’on s’en fait.
Certaines personnes sont tellement attachées à cette image qu’elles se focalisent sur cette recherche de sensation plutôt qu’à ce qu’elles ressentent. »
Alors écoutons-nous !
Ne pas avoir d’orgasmes, mais en parler
Comme souvent dans le sexe, il n’y a pas une recette magique. À chacun•e de trouver la sienne, celle de son, sa ou ses partenaires, et enfin, celle qui fait que l’on kiffe tou•tes ensemble. Alors écoutez-vous, écoutez les réactions des autres et discutez-en !
Laura Cherfi ajoute :
« De nombreux couples ne parlent pas de sexe quand ils sont en dehors du lit. Alors, chacun•e se monte la tête de son côté au lieu de partager à l’autre ses doutes. Il faut éviter ça, ne pas faire de la sexualité un tabou ! »
Anne-Laure m’a envoyé son témoignage. Elle a connu quatre partenaires mais jamais d’orgasme. Elle a un message à l’attention de toutes les personnes qui se retrouvent confrontées à un•e partenaire qui ne jouit pas.
« Ce n’est pas parce que votre moitié n’a pas d’orgasme qu’il/elle n’a pas de plaisir !
Ne soyez pas vexé•es qu’un corps ou qu’un cerveau refuse de jouir. Ça ne veut pas dire que vous êtes de mauvais•es amant•es.
Au contraire, parlez-en, sans jugement, et gardez en tête que votre partenaire se sent peut-être très mal de ne pas pouvoir jouir : pour lui/elle, comme pour vous. »
Encore une fois, la « solution » ne se trouve pas dans une technique spécifique mais bel et bien dans la communication. Alors discutez et n’oubliez pas le plus important : amusez-vous.
Et ça marche dans les deux sens, si vous sentez que votre partenaire n’a pas envie, ne lui forcez surtout pas la main.
À lire aussi : L’injonction à l’orgasme, cette plaie qui gâche la sexualité
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires
J'espère tout simplement que ce problème disparaîtra avec le temps. Que c'est simplement dû au fait que je n'arrive tout simplement pas à "lâcher prise". Au final même si je regrette un peu cette absence d'orgasme que je ne puisse partager avec mon chéri, J'ADORE BAISER ET JE LE VIT TRES BIEN