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Culture

Halloween, zombies, bonbons et désindividualisation

Halloween, les zombies, l’« uncanny valley » ou encore les sales gosses voleurs de bonbons… C’est le programme de l’article psycho de la semaine !

Bonjour. Figurez-vous qu’Halloween, pour moi, c’est du sérieux (une journée de congés, une flopée de films à peu près terrifiants, des kilos de nourriture peu respectable…). Figurez-vous aussi que cette année, j’ai eu la grippe — et que pendant que vous arboriez tou-te-s des déguisements plus beaux les uns que les autres, je fusionnais avec mon canapé.

En bref, j’halloween après tout le monde et cet article causera zombies et vols de bonbons. Oui, les deux.

Pourquoi avons-nous peur des zombies ?

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DUH, parce qu’ils sont là pour nous dévorer ? Pas seulement : selon Stephanie Lay, nous serions particulièrement effrayé-e-s par l’aspect « presque humain » de leurs visages.

La chercheuse en psychologie base sa remarque sur la « théorie de la vallée dérangeante » (« uncanny valley ») : dans les années 70, le roboticien japonais Masahiro Mori lance une recherche afin d’observer nos réactions aux robots et de voir plus spécifiquement si donner aux robots un aspect humain les rendraient plus rassurants pour les vrais humains amenés à les utiliser.

D’après ses observations, nous serions effectivement plus réceptifs aux robots qui auraient une certaine ressemblance… mais dès lors que cette ressemblance serait trop proche, sans être parfaite, nous ressentirions alors de la répulsion envers les robots et la ressemblance serait perçue comme sinistre. En revanche, lorsque l’apparence du robot imite l’humain à la perfection, nous l’acceptons – et la répulsion disparaît.

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Le malaise version Real Humans

Somme toute, lorsqu’un robot ressemble à un humain, mais qu’il a des imperfections, ces imperfections nous paraissent monstrueuses… S’il ne présente pas de défauts visibles, alors notre dégoût n’apparaît plus. La « vallée dérangeante

 » serait donc une zone à franchir, entre un robot clairement artificiel et un robot parfaitement « humanoïde ».

Stephanie Lay a souhaité examiner l’effet de la vallée dérangeante d’un point de vue psychologique : d’où vient le malaise ?

Pour analyser les choses, la chercheuse a diffusé à des volontaires des images présentant des robots de plus en plus humanisés. Sans surprise, Lay identifie bien une zone dérangeante, et peut préciser le moment où on y « entre » et le moment où on en « sort ». La psychologue décide alors d’étendre sa recherche et de présenter aux volontaires des images de zombies, pour enregistrer leurs réponses émotionnelles.

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Pour Stephanie Lay, notre malaise et notre peur viendraient tout droit de nos petites têtes et d’une difficulté dans les « mécanismes de traitement de l’information » et d’identification : nous commençons par percevoir quelque chose qui semble humain, puis notre attention est attirée sur un détail qui ne va pas avec nos attentes. Quelque chose ne colle pas et trouble le traitement de l’information : c’est ce qui nous dérangerait et causerait la crainte.

Finalement, nos cerveaux seraient déconcertés par l’image de quelque chose qui ressemble à un humain, mais n’est pas humain – l’ensemble est alors perçu comme étrange et perturbant.

La célébration d’Halloween encourage-t-elle nos plus vils instincts ?

Peut-être bien : pour Ed Diener (et al., 1976), Halloween, avec ses déguisements et son trick-or-treat-ing en groupe, pourrait mettre en place les conditions idéales pour faire apparaître un sentiment de désindividualisation (diminution du sentiment d’individualité, apparition de comportements antisociaux…) et influencer notre volonté à chourer des bonbecs… Autrement dit, plus nous nous sentons anonymes, et plus nous sommes nombreux, plus nous sommes capables de voler des Smarties.

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Pour parvenir à ce constat, Diener a réalisé une expérience « in situ » : avec une équipe de chercheurs, il observe les comportements d’enfants lors du fameux « trick or treat » d’Halloween.

Dans une maison, une table est installée avec un bol de bonbons individuels et un bol rempli de monnaie. Une femme, complice des chercheurs, accueille les enfants qui viennent réclamer leurs sucreries.

Les chercheurs souhaitent évaluer l’impact de certains facteurs sur le comportement des enfants :

  • L’anonymat : dans une condition, la femme accueillante explique aux enfants de prendre un bonbon chacun et quitte la pièce. Dans une seconde condition, la même femme demande aux sujets leurs noms et adresses, leur dit de prendre un bonbon chacun et quitte la pièce.
  • La taille du groupe : les observateurs notent si les « trick-or-treaters » arrivent seuls ou en groupe.
  • Le sentiment de responsabilité : dans certains groupes, la complice des chercheurs désigne le plus petit enfant du groupe et indique qu’elle le tiendra pour responsable si trop de bonbons sont pris. Dans d’autres groupes, rien n’est spécifié.

Verdict : le fait d’être en groupe et celui de se sentir anonyme augmente franchement la probabilité que les enfants prennent plus de bonbons et chopent au passage quelques pièces de monnaie. Lorsque les enfants frappent seuls à la porte et que leur interlocutrice leur a demandé leurs noms, les enfants volent quelques bonbons dans 7,5% du temps… En revanche, lorsque les enfants viennent en groupe et restent anonymes, ils prennent du rab de sucreries et des pièces de monnaie dans 57,7% du temps !

Pis encore : lorsque les enfants sont en groupe, qu’on ne leur a pas demandé leur nom et qu’on a désigné un enfant comme responsable des vols éventuels…. 80% des enfants volent des bonbons ou de la monnaie !

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En d’autres termes, pour transformer vos mouflets en voleurs de Kinder Bueno, vous savez ce qu’il vous reste à faire…

Devenir un voleur de cochonneries serait donc l’un des effets de la désindividualisation, mais ce n’est pas le seul, et Halloween ne tourne pas qu’autour des bonbons (à vue de nez, 87% autour des bonbons, 10% autour de la trouille et 3% pour la case « autre »). Les déguisements, costumes, chapeaux de sorcières et maquillages zombiesques participent également au folklore et à la désindividualisation…

Finalement, Halloween (et la désindividualisation, donc), c’est également l’occasion de mettre de côté nos comportements habituels et, pour le professeur de psychologie sociale Sanjay Srivastava, de célébrer aussi le fait d’être différent… et d’être ensemble en étant différents.

Pour aller plus loin…

  • Sur la recherche de Stephanie Lay ici et
  • Sur les chenapans voleurs de bonbons ici et

Découvrez le BookClub, l’émission de Madmoizelle qui questionne la société à travers les livres, en compagnie de ceux et celles qui les font.

Les Commentaires

1
Avatar de Fizzgig
4 novembre 2013 à 15h11
Fizzgig
Pour l'expérience avec les enfants et les bonbons, je ne suis pas convaincue par la pertinence du paramètre supplémentaire "désigner un des enfants comme responsable des vols éventuels".
Pour moi, en suggérant la possibilité que les enfants puissent transgresser la règle et prendre plus d'un bonbon chacun augmente drastiquement ce risque, responsable désigné ou non: en admettant cette possibilité, on leur en donne l'idée. Ils ne l'auraient surement pas eue tous seuls, sans oublier l'esprit de contradiction!
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