Dans un entretien au journal Le Monde, la Maire de Paris Anne Hidalgo a annoncé une expérimentation exceptionnelle à l’occasion des élections européennes.
12 lycées vont expérimenter le vote à 16 ans
« Dans notre projet, les jeunes de 16 à 18 ans scolarisés dans les douze lycées municipaux voteraient dans leurs établissements un peu avant le 26 mai, avec des bulletins et dans des isoloirs comme dans tous les bureaux de vote. »
Publiés à l’issue du vote national, les résultats ne seront pas intégrés au scrutin mais donneront un bon aperçu de l’état d’esprit des 16-18 ans sur les questions européennes.
Voilà une nouvelle qui me met proprement EN JOIE.
Quand je dis que je suis favorable au vote des jeunes à 16 ans, le premier argument qu’on m’oppose souvent attaque leur maturité. Ils ne seraient pas assez matures, expérimentés — allez disons-le : intelligents pour décider de leurs représentants.
Mais ne sommes-nous pas toutes et tous des citoyens européens ? Les décisions prises par les institutions européennes n’ont-elles pas des répercussions sur la vie de millions de personnes de 0 à 100 ans ?
Le droit de vote n’est pas une question d’âge
En France, le droit de vote est acquis pour tous les citoyens à partir de 18 ans. Quel que soit leur quotient intellectuel, quelle que soit leur contribution au projet de société, quelle que soit leur capacité mentale.
Ma grand-mère sénile, qui ne se souvient même pas du prénom de ma cousine de 16 ans qui est impliquée dans les activités de sa ville, a le droit de vote.
Je suis entourée de personnes de 30 ans dont le raisonnement politique est quasi absent, et d’individus de 16 ans qui ont décortiqué tous les programmes des représentants des partis européens pour en rendre compte dans le journal de leur lycée.
L’âge est une barrière symbolique et arbitraire qui n’est plus représentative de l’état de notre société. Anne Hidalgo défend son projet dans Le Monde :
« Les jeunes sont très sensibles à la question européenne. Ils voient que leur avenir se joue aussi à cette échelle, et veulent participer à la définition de leur destin.
On a une génération d’adolescents extrêmement lucides sur leur avenir, il suffit de les voir faire grève le vendredi pour le climat. »
Des 16-18 ans changent déjà le monde
Nous te racontons souvent sur madmoiZelle les parcours d’adolescentes et de jeunes femmes qui n’attendent pas d’avoir le droit de vote pour changer leur monde, à l’instar de Greta Thunberg, la leadeuse du mouvement de grève pour le climat.
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En ce sens, le droit de vote dès 16 ans n’est qu’une brique logique à l’emprise qu’elles peuvent avoir sur leur parcours de vie.
Mais je suis aussi lucide : en matière d’éducation (et de curiosité) politique, nous ne sommes pas à égalité. Il y a des gens de tous âges qui s’en battent les ovaires de la vie politique et d’autres qui en font leur métier.
Certains sont aiguillés très tôt pour comprendre comment la démocratie fonctionne et comment en tirer profit, tandis que d’autres n’en auront jamais l’opportunité.
Bien sûr, certaines personnes seront influencées par le vote de leurs parents ou de leur entourage. Mais ne le sommes-nous pas toutes ?
Qui peut prétendre faire un choix sans influence extérieure alors que nous évoluons dans des bulles sociales qu’il est difficile d’éclater ?
L’ouverture du droit de vote à 16 ans laisse le choix et donne une voix à une génération carrément sous-représentée dans la majorité des médias… quand elle n’est pas MAL représentée.
Pour une réelle éducation à la citoyenneté et à la vie politique
Ce droit doit cependant s’accompagner d’information, de débats et de pédagogie.
L’École apparaît comme le tuyau le plus naturel pour permettre à toute une tranche d’âge d’être sensibilisée… même si dans la réalité, c’est assez mal foutu.
Comme l’éducation sexuelle, l’éducation politique est un sujet tabou dans les établissements scolaires. Les professionnels, de mon expérience, sont frileux dès lors qu’il s’agit de parler de politique en classe.
Et pour cause, une fois l’Histoire des grandes institutions balayée, pas évident de parler des programmes des candidats…
Certains profs redoutent de se faire accuser de prosélytisme politique, d’autres craignent de se retrouver démunis face à des discours complotistes ou intolérants, d’autres considèrent enfin que ce n’est pas leur rôle.
Les équipes pédagogiques ont besoin d’une vraie formation pour mener les modules d’éducation politique.
C’est ce que proposent des programmes comme Électeurs en herbe, une association qui simule des élections dans les établissements scolaires.
À travers ce type de programmes, on n’apprend pas à voter, on apprend à développer son esprit critique. Plutôt utile en toutes circonstances, non ?
Et toi, dis-moi, que penses-tu de cette expérimentation ?
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Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
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