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Le depato, temple de la consommation – Carte postale du Japon

Le depato, ou department store, c’est l’équivalent japonais du grand magasin de luxe… et il y en a partout !

Qui n’a pas en tête le cliché des Japonais-es en visite à Paris, appareil photo autour du cou, se promenant en groupe, mitraillant tous au même moment dans la même direction, sortant d’un bus de tourisme pour s’engouffrer aux Galeries Lafayette et y dépenser en une heure plusieurs SMIC en sacs à main, foulards et maquillage ? J’ai des souvenirs très nets de reportages sur ces grands magasins embauchant des jeunes femmes parlant japonais pour mieux renseigner et donc mieux optimiser cette clientèle étrangère. Aux Galeries, les annonces de fermeture du magasin sont faites au micro en français, en anglais… et en japonais.

Le depato, un incontournable

Depuis quelques temps, je comprends mieux ce phénomène : la dynamique de groupe d’une part, très présente au Japon, et l’attrait pour les grands magasins comme le Printemps Haussman, les Galeries, le Bon Marché… Spécificité française survendue dans les guides ou popularisée par un bouche à oreille incroyable ? Non. Juste une habitude de consommation très ancrée au Japon, pays réputé pour son goût du luxe et leurs habitants au porte-monnaie en général bien garni. Les grands magasins sont légion dans les grandes villes, et représentent une sortie appréciée le week-end, pour les citadins comme pour les banlieusards.

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Les enseignes sont nombreuses à se partager le marché : Marui, Takashimaya, Mitsukoshi, Matsuya, Seibu, Tobu, Isetan… sont positionnés haut de gamme, tandis que les Japonais-es moins verni-e-s vont chez Tokyu Hands, sorte de BHV local. Ces grands magasins, classes, aux points stratégiques des grandes agglomérations, sont appelés department stores. Une expression anglophone difficile à prononcer pour les locaux, et qui a donc été (comme beaucoup de mots étrangers) raccourcie et simplifiée en « depato », qui s’intègre mieux à la langue japonaise.

Mais alors, que trouve-t-on de si incroyable dans un depato japonais ? Des choses chères, globalement identiques d’une enseigne à l’autre, disposées dans un cadre très connoté « cette robe coûte 60 000 yens (500 euros) » : proprissimes, modernes, avec larges couloirs et étagères pas trop encombrées. Ces magasins sont organisés de manière similaire, comme ça on n’est pas perdu, on peut prévoir son coup sans mauvaise surprise (le Japon en général n’aime pas beacoup l’improvisation). Donc on trouve au sous-sol de l’alimentation : bento, viande, poisson, légumes, boulangerie, parfois fromage, pâtisseries japonaises et étrangère, sur quelques niveaux. Au rez-de- chaussée, c’est le royaume de la cosmétique, représenté par des marques locales (Shiseido, Kanebo, Clé de peau et autres merveilles nacrées) et des marques occidentales de prestige (Chanel, Lancôme et compagnie). La bijouterie est proche. Ensuite, de bas en haut toujours, on rencontre la maroquinerie, l’habillement femme puis homme, éventuellement un espace d’exposition, et parfois une « food court », c’est-à-dire quelques restaurants triés sur le volet. Le bâtiment se termine en général par une terrasse avec vue imprenable (et prix du millilitre de café considérable). Le tout est réparti sur parfois 15 niveaux, comme chez Mitsukoshi à Ginza.

Consommation de masse au royaume du luxe

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Ces grands magasins prospèrent grâce au fort pouvoir d’achat d’une grande partie de la population japonaise, convertie à la consommation excessive depuis la prospérité des années 50-60. Le consommateur japonais est très sensible à l’image et aux valeurs véhiculées par les marques

. Il aime les entreprises avec une longue tradition derrière elles, une histoire bien racontée, un savoir- faire reconnu, un logo identifié partout dans le monde. Si le produit est de haute qualité et le service clients aux petits soins, peu importe le prix, il trouve preneur.

« Entre deux produits de catégorie identique, le client japonais aura le plus souvent tendance à opter pour celui qui porte une griffe et/ou offre le plus de fonctionnalités, dont l’ergonomie lui sied le mieux, fût-il plus onéreux », affirme Karyn Poupée (correspondante AFP au Japon) dans son essai Les Japonais (Taillandier, 2009). Les Japonais-es accordent une attention extraordinaire à la qualité, la noblesse des matières – et sont donc des client-e-s parfaits pour les marques prestigieuses distribuées dans les department stores.

Parmi les clients de ces magasins de première catégorie, on compte quelques-uns des profils d’acheteurs définis dans ce même ouvrage : la « poule aux oeufs d’or », c’est-à-dire la Japonaise salariée, dans la trentaine, célibataire et sans enfants, consacrant un budget considérable à ses plaisirs personnels, au rang desquels fringues et cosmétiques figurent en bonne place… mais aussi le « gendre idéal mais célibataire endurci », avec un salaire confortable, toujours impeccablement sapé. Citons aussi la « jeune famille moderne », que l’on n’aurait pas d’emblée classé dans les clients des endroits plutôt branchés, mais qui fréquente également les depato, spécialement ses sous-sols dédiés à l’alimentation haut- de-gamme. Les « bobos nippons » sont également des clients fidèles au porte-monnaie toujours ouvert ; plus fortunés que bohèmes, la consommation de luxe rythme leur quotidien. Ce sont peut-être eux qui font s’arrêter leur taxi-limousine sur le trottoir, le temps de se faufiler chez Hermès ?

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Mises ensemble, ces catégories un brin schématiques représentent un nombre considérable de consommateurs – ce qui permet d’expliquer le nombre non moins étonnant de depato dans le pays (300 au bas mot). Le moindre trajet en métro dans la capitale suffit à prendre la mesure du très haut degré d’équipement des femmes nippones en sacs Louis Vuitton. Muriel Jolivet, sociologue et enseignante depuis une trentaine d’années dans l’archipel, rapporte que ses étudiantes lui ont expliqué qu’acheter un sac Vuitton était une forte motivation pour prendre des boulots étudiants, et que, finalement, on réunissait assez vite 4 000 euros !

Les Japonais-es ont également un goût très développé pour le meilleur. L’ordinaire ne suffit pas. C’est ce qui les pousse à tous aller au même endroit, à la même date, faire la même chose, lorsque les conditions sont idéales. C’est aussi ce qui les motive à ne pas y aller avec le dos de la cuillère lorsqu’ils ont décidé de s’offrir un bon resto, de célébrer leur mariage… ou d’acheter un nouveau sac.

Et toi, est-ce que tu fréquentes les grands magasins, pour acheter ou pour rêver ?

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Les Commentaires

7
Avatar de Laetitia H
14 mai 2013 à 11h05
Laetitia H
Je trouve ça malade ! Je me suis toujours demandé d'où les japonai-se-s sortaient tout cet argent... Certes, ils n'ont qu'une semaine de vacances parce semaine, mais quand même ! Sont-ils tous si riches ou plutôt endettés à vie ? Cette consommation de masse et de luxe ça me donne la nausée !
Franchement, quand je travaillais dans la maroquinerie de luxe et que je voyais les clientes mettre mon salaire mensuel dans un sac, ça m’écœurais !
Juste un petit mot, car les congés japonais alimentent beaucoup de fantasmes. Les salaries japonais disposent d'environ deux à quatre semaines de vacances par an, selon la boîte et leur ancienneté. Ils ne les prennent pas intégralement - c'est lié à une culture forte du travail, ils ne veulent pas donner l'impression de moins en faire que leur collègues, ou de préférer être en vacances qu'au travail. Par contre, faut pas venir les titiller sur les jours fériés (15 par an, impossible de les "rater" car les dimanches fériés se transforment en lundi fériés). Ce qui fait au total un ratio pas si hallucinant que ça en jours non travaillés. 
Concernant leur pouvoir d'achat, eh bien il est très fort ! Le salaire moyen il y a une dizaine d'années était je crois équivalent à 4000€. La vie quotidienne coûte très chère au Japon, on l'estime (on= les entreprises qui envoient se salaries au Japon) à 80% plus onéreuse qu'en France. Malgré tout le shopping est un pêche mignon des Japonais, et je pense que ça redouble lorsqu'ils sont à l'étranger.
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