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Vie quotidienne

Je cache un clandestin : mon petit ami  — Témoignage mis à jour, deux ans plus tard

Cette madmoiZelle cachait un clandestin : son petit ami. Venu terminer ses études en France, il avait redoublé son année, et le renouvellement de son titre de séjour lui avait été refusé. Deux ans plus tard, elle nous donne de leurs nouvelles.

Mise à jour du 1er novembre 2016 :

Un an s’est écoulé depuis la dernière mise à jour. Pendant cette année, nous avons continué à vivre notre vie comme un couple « normal ». Mon mari a poursuivi ses études puis les a terminées, et cherche maintenant un travail.

Avec son titre de séjour, il est autorisé à travailler. Mais pour le moment il n’a toujours pas trouvé : nous ne savons pas si c’est à cause de son statut d’étranger ou si c’est la dure loi du chômage qui ne l’épargne pas.

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Nous avons également dû renouveler son titre de séjour obtenu si difficilement : le renouvellement se fait d’abord tous les ans pendant cinq ans, pour ensuite s’effectuer tous les dix ans. À notre grand étonnement, nous l’avons eu facilement malgré une OQTF non exécutée l’année précédente.

Par contre nous devons justifier au maximum de notre vie commune chaque année, donc nous devons faire attention à nos démarches administratives pour que tout soit bien à nos deux noms, à la même adresse, etc. Nous sommes reconnus comme un couple mais pas encore comme un couple de deux Français par exemple, ce qui me pèse un peu par moment car nous devons toujours justifier de notre relation.

Pour enfin être tranquille, j’aimerais que mon mari prenne la nationalité française car ça nous faciliterait beaucoup de choses.

Il a le droit d’en faire la demande vu que ça fait plus de cinq ans qu’il est sur le territoire français, mais il n’a pas trop envie : il est attaché à son pays, et a un peu peur de toute la paperasse nécessaire à la naturalisation — il faut ainsi beaucoup d’originaux qui sont difficiles à obtenir dans des pays en voie de développement.

Mais peut-être qu’il finira par changer d’avis, surtout que depuis quelques jours nous sommes les heureux parents d’une petite fille ! Cela me rassurerait pour les années futures : étant père d’un enfant français, il n’est plus normalement expulsable, mais sait-on jamais avec les changements politiques à venir…

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De mon côté, cette expérience m’a permis d’aider plusieurs couples franco-étrangers dans leurs démarches, et je me rends compte qu’elles sont de plus en plus dures et intrusives.

Par ailleurs, j’ai pour projet d’essayer de développer une chaine YouTube d’ici quelques mois pour parler du couple mixte et de ses difficultés.

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Mise à jour du 2 septembre 2015 :

Nous avons réalisé notre projet de mariage, mais pas sans encombres. En effet, deux jours avant la cérémonie nous étions contents d’avoir pu tout préparer dans les temps… jusqu’à ce que trois policiers viennent chercher mon futur mari chez nous. Heureusement il était en cours et ils ne l’ont pas trouvé. Nous avons réussi par nos relations à demander au chef de la police qu’il nous laisse nous marier en paix, ce qu’il a fait.

Cependant, mariage ou pas, l’OQTF qu’avait reçu mon mari était toujours d’actualité : la préfecture demandait qu’il quitte le territoire, ce qui impliquait d’abandonner ses études et notre vie pour un temps indéterminé — ça peut être quinze jours comme plusieurs mois.

L’OQTF n’était valable qu’un an : en décembre 2014 elle n’était plus exécutable. Mais en attendant la date anniversaire de l’OQTF, mon mari a été obligé de se cacher pendant plusieurs semaines, de rester cloîtré dans un lieu sûr, seul à essayer de suivre ses cours à distance. Cette période a été très dure pour nous deux : nous venions de nous marier et ça avait été génial, toute notre famille était là, mais nous avions dû nous séparer deux jours après, sans pouvoir profiter du début de notre nouvelle vie de couple. Je le rejoignais tous les week-ends en ayant la peur au ventre d’être suivie par la police qui le recherchait.

Nous avons pu faire valoir notre mariage comme une nouvelle pièce au dossier de régularisation.

Puis décembre est arrivé, et nous avons pu faire valoir notre mariage comme une nouvelle pièce au dossier de régularisation. Nous sommes donc partis à la préfecture de notre département pour enfin déposer ce fameux dossier, en échange duquel un accusé de dépôt nous a été délivré. Il y était bien stipulé que celui-ci ne valait pas régularisation. Nous devions recevoir une réponse sous six mois.

Nous avons donc continué notre vie, mon mari a continué ses études. Après cinq mois sans réponse, nous sommes de nouveau entrés en contact avec l’association qui nous avait aidés : La Cimade. Elle nous a expliqué que la préfecture avait fait les choses à moitié, car selon la loi nous aurions dû avoir un récépissé provisoire régularisant la situation de mon mari en échange du dépôt de dossier.

L’article R. 311-4 du CESEDA (le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile), tout comme la circulaire n° INT/D/07/00031/C du 19 mars 2007, stipule en effet :

« Il est remis à tout étranger admis à souscrire une demande de première délivrance ou de renouvellement de titre de séjour un récépissé qui autorise la présence de l’intéressé sur le territoire pour la durée qu’il précise. Ce récépissé est revêtu de la signature de l’agent compétent ainsi que du timbre du service chargé, en vertu de l’article R. 311-10, de l’instruction de la demande. »

Nous avons donc pris notre CESEDA sous le bras et nous sommes allés faire valoir nos droits en préfecture. Dix minutes après notre arrivée nous avions le récépissé, un bout de papier qui ne payait pas de mine mais qui avait été tellement difficile à obtenir… Après un an dans l’illégalité, mon conjoint était enfin régularisé… pour trois mois.

Toute cette malheureuse aventure a commencé il y a un an et demi, et il y a quelques jours, nous avons reçu une lettre de la préfecture nous invitant à venir chercher le précieux sésame : le visa de long séjour. love rosie letter Enfin nous pouvons vivre comme un couple normal, penser au futur. Mon mari peut travailler pour participer aux frais et, comme il le dit souvent, retrouver un peu de dignité.

Et nous pouvons partir en vacances pour notre voyage de noces…

J’ai décidé de témoigner pour éclaircir un peu la situation des étrangers en France. Chaque jour nous entendons des remarques souvent plus négatives que positives sur les étrangers, qu’ils soient en situation irrégulière ou régulière. On les accuse de tous les maux, de profiter des acquis sociaux de la France, de la coloniser, d’être responsables du chômage et d’avoir des vies meilleures que les « bons » Français de souche.

Être en situation irrégulière en France est très difficile.

Comme vous avez pu le lire c’est loin d’être le cas, être en situation irrégulière en France est très difficile. En effet, sans titre de séjour on ne peut pas avoir de logement, on ne peut pas travailler, on ne peut pas prétendre aux aides sociales ; on ne peut rien avoir à part une sécurité sociale très minime. Il ne faut pas croire ce que beaucoup d’extrêmes aiment nous dire.

De plus, les lois concernant les étrangers en situation régulière tendent à se durcir depuis quelques temps : dernièrement, une loi autorise les services de l’intérieur à pouvoir se servir des informations que la sécurité sociale, la CAF, Pôle emploi et tout autres organismes possèdent dans leurs fichiers.

Analysant cette loi sur les droits des étrangers, la Cimade a en effet dénoncé au sujet des préfets que « pour vérifier la situation des personnes qui bénéficient d’un titre de séjour, ils pourront ainsi, véritable intrusion dans la vie privée des personnes, demander des informations à des interlocuteurs aussi divers que les fournisseurs d’énergie et de télécommunication, les banques, la sécurité sociale, les hôpitaux ou les écoles, et cela, au risque de dénaturer leurs missions. »

La vie privée des étrangers n’existe plus. Cela peut vite devenir invivable pour eux, et très dur pour les conjoints ou les enfants.

Mise à jour du 2 septembre 2014 :

Plusieurs mois se sont écoulés depuis ce premier témoignage. Quand j’avais écrit la première fois, mon copain était en pleine session d’examens, et il s’efforçait de rester concentré sur ses études et d’oublier ses problèmes de papiers. Nous avons eu les résultats deux semaines plus tard, et malheureusement il était ajourné, à 0,4 points près. Mais il n’a pas baissé les bras : il l’a peut-être eu aux rattrapages, mais il l’a eu malgré tout, ce diplôme tant désiré !

Nous n’avons pas perdu de temps : dès le lendemain nous avons envoyé les photocopies des notes ainsi qu’une attestation de réussite fournie par la fac à la préfecture pour montrer notre bonne foi, puis nous avons pris notre mal en patience.

Nous avons patienté plusieurs semaines, en vain. Il nous était impossible de contacter la préfecture : aucun numéro de téléphone n’était communiqué aux particuliers, tous les contacts devaient se faire par mail. Nous n’osions pas aller sur place, d’une part parce que la préfecture est à 200 kilomètres de chez nous, et d’autre part parce que mon copain aurait pu se faire arrêter.

À la mi-août, la dame de la Ligue des droits de l’Homme qui nous avait aidés la première fois, et qui, elle, avait un contact à la préfecture, les a appelés pour râler un peu et exiger une réponse. C’est là que nous avons appris que malgré l’appui de notre soutien haut placé, la préfecture ne voulait rien savoir et ordonnait à mon copain de quitter le territoire. On nous a dit que la licence lui avait été donnée frauduleusement pour arranger le problème.

La personne de la préfecture insistait sur l’obligation de quitter le territoire, nous faisant comprendre qu’il pouvait toujours revenir illégalement. Normal. Nous avons même envisagé un (court) instant de suivre ce « conseil », mais un avocat de l’association nous a expliqué que cela impliquait le retour illégal de mon copain en France, alors que là au moins il est entré sur le territoire français en tout légalité.

La seule solution possible est d’obtenir un visa long séjour, soit en ayant un enfant, soit en nous mariant. Nous avons donc choisi la deuxième option. Nous nous aimons très fort, et avant cette histoire on parlait déjà de faire notre vie ensemble, alors nous nous sommes dit qu’on pourrait avancer nos projets de quelques mois.

Nos familles l’ont bien pris : la sienne est contente de cette solution et se réjouit de notre mariage, et la mienne a compris. Mon copain fait partie de notre famille, et connaît bien mes parents. Ces derniers ne pensaient cependant pas qu’il était aussi difficile d’être un étranger sur le territoire français…

Maintenant, c’est la course pour nous marier et régulariser sa situation le plus vite possible. On pense pouvoir le faire vers la fin du mois de septembre ou début octobre. Nous nous sommes renseignés, et normalement la préfecture n’a pas à être mise au courant de notre mariage ; si c’était le cas, nous vivons ensemble depuis plus de six mois et pouvons témoigner du sérieux de notre relation. Il n’y a plus qu’à espérer que tout se passe bien.

Les conditions pour obtenir le visa de long séjour selon le site du service public :

Dans le « Cas particulier du visa de l’époux de Français :

Si vous êtes marié avec un Français, le visa de long séjour ne peut vous être refusé que pour un des 4 motifs suivants :

  • votre mariage est frauduleux
  • votre mariage a été annulé
  • vous représentez une menace à l’ordre public
  • vous ne produisez pas l’attestation prouvant que vous avez préparé, dans votre pays de résidence, votre intégration dans la société française. »

Pour une personne présente clandestinement en France, il faut remplir les trois conditions suivantes :

  • « être entré régulièrement en France (sous visa de court séjour sauf si vous êtes d’une nationalité dispensée ou sous titre de séjour délivré par un autre pays européen)
  • avoir célébré votre mariage en France
  • vivre en France depuis plus de 6 mois avec votre époux français (quelle que soit la date de votre mariage). »

Si toutefois il est reconnu que le mariage est un mariage « de complaisance » (blanc quand les deux époux sont d’accord pour se marier uniquement afin d’obtenir les papiers, gris quand il y a manipulation de la part de l’épou-x-se étranger-e), c’est l’ITF, l’interdiction du territoire français. Toujours selon le site du service public :

« Une interdiction du territoire de 10 ans maximum ou une interdiction définitive peut être prononcée en cas :

  • de mariage ou de reconnaissance d’un enfant dans le seul but d’obtenir ou de faire obtenir un titre de séjour, une protection contre l’éloignement ou la nationalité française
  • d’organisation ou de tentative d’organisation d’un tel mariage ou d’une telle reconnaissance d’enfant
  • de dissimulation de son intention à son conjoint français. »

Du côté de la fac, tout est prêt : les responsables sont au courant de la situation de mon copain, et prêts à l’inscrire en master dès le début de l’année scolaire. Il leur donnera les papiers prouvant la régularité de sa situation dès qu’ils les aura.

Ça ne sera pas le mariage de mes rêves, avec une belle robe et une grande fête de famille, mais ce n’est pas grave : nous allons nous marier pour l’amour que nous éprouvons l’un pour l’autre… Et puis rien ne nous empêche de nous « remarier » d’ici quelques années, pour faire une fête digne de ce nom !

J’aimerais conclure par un gros coup de gueule contre la préfecture. Les autorités fustigent les mariages « de complaisance », alors qu’on pousse les gens à les faire. Nous n’avons pas d’autre solution pour que mon copain puisse faire son master ici. La situation dans son pays d’origine est instable, et le niveau des universités ne lui permet pas de faire ce qu’il veut.

À l’origine, l’OQTF faisait suite à son échec universitaire. Malgré sa réussite et les nombreuses preuves de son sérieux, le blocage administratif a néanmoins pris des proportions incroyables…

Article du 18 juin 2014 :

Depuis début mars, je suis dans l’illégalité… j’aide un clandestin. Un clandestin qui m’est proche, puisqu’il s’agit de mon petit ami avec lequel je suis depuis presque un an.

Étudiant dans une filière d’excellence

J’ai rencontré mon copain à la fac. Diplômé d’une licence dans son pays, il était arrivé en France en 2011 pour y faire un master, les enseignements français étant plus réputés. Son diplôme n’étant pas reconnu ici, il a dû refaire une année de licence. Puis il a changé de fac pour faire une autre licence.

Sauf qu’il a n’a pas eu son année en 2012-2013. Il s’est donc réorienté dans une autre spécialité de cette même filière d’excellence en 2013-2014 afin de mettre toutes les chances de son côté.

C’est là que tout a commencé. Quand il a voulu renouveler son titre de séjour étudiant auprès de la préfecture de notre département, il a dû fournir un tas de papiers, dont les relevés de notes de l’année dernière, qu’il a ratée.

Le titre de séjour étudiant est généralement valable un an ; il faut le demander avant septembre ou octobre. Un titre provisoire valable jusqu’à janvier ou février est alors délivré. Le titre de séjour officiel arrive à la fin de cette période.

Selon le site officiel de l’administration française, pour que le titre de séjour étudiant soit renouvelé :

  • soyez assidu dans vos études
  • présentiez vos examens
  • progressiez dans vos études dans un même cursus (licence par exemple)
  • soyez cohérent dans votre parcours si vous changez d’orientation.

Le caractère réel et sérieux de vos études est notamment vérifié au moyen :

  • de votre assiduité aux travaux dirigés (si de tels cours sont prévus dans votre cursus)
  • de vos résultats aux examens
  • des diplômes que vous obtenez
  • des explications que vous fournissez si vous changez de cursus.

En septembre, mon copain avait obtenu son titre provisoire comme d’habitude, mais au moment de délivrer le titre définitif, le préfet a jugé ses résultats insuffisants pour continuer une année d’étude ; en gros, nous les étudiants français nous avons le droit à l’erreur, à une deuxième chance, mais les étudiants étrangers doivent tous réussir du premier coup sous peine d’être « dégagés » du territoire français.

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Ils ont conclu de son redoublement qu’il n’était pas en France pour les études. C’est d’autant plus difficile à comprendre que mon copain n’a le droit a aucune bourse avec ce titre : au contraire, il doit justifier de revenus minimums. Ce sont ses parents qui lui fournissent les moyens financiers d’étudier. Et il a été assidu !

Au lieu de son titre de séjour définitif, mon copain a donc reçu ce qu’on appelle l’OQTF (l’obligation de quitter le territoire français) par courrier recommandé. Malheureusement, il a été envoyé pendant les vacances de Noël : nous étions alors en vacances en famille. Ce courrier est donc reparti à la préfecture.

La difficulté du recours

On est rentrés une dizaine de jours après l’envoi, et il nous a fallu trois semaines pour obtenir de la préfecture qu’on nous le renvoie, à force de coups de téléphone et de courriers de relance. Mais quand nous l’avons enfin reçu, le délai pour faire recours était dépassé de quinze jours…

Comme le site du service public l’explique :

Vous devez contester l’obligation de quitter la France avec délai de départ volontaire dans les 30 jours suivant la notification de la mesure.

Passé ce délai…

L’obligation de quitter la France peut être exécutée par la force par l’administration. Un recours contentieux contre cette mesure suspend toutefois son exécution jusqu’à la décision du tribunal administratif.

Dans l’attente de son éloignement, l’étranger peut être placé en centre de rétention ou assigné à résidence.

Nous avons tout de même tout fait pour avoir un recours : nous sommes allés voir une avocate et la ligue des droits de l’homme. L’avocate nous a expliqué que l’OQTF pouvait être levée si un changement de situation pouvait être prouvé : comme les notes de mon copain étaient bonnes et qu’il avait réussi son premier semestre, le titre de séjour devait lui être délivré.

clandestin 3

Sauf que la préfecture nous a fait comprendre que les bulletins n’avaient aucune valeur, parce que la fac pouvait les avoir falsifiés. L’avocate nous a en effet parlé de cas de jurisprudence de ce genre, dont un qui s’était soldé par le départ de l’étudiant parce que la fac aurait fourni de faux bulletins. Cette histoire donne sérieusement l’impression que les préfectures n’accordent aucune valeur aux facultés…

Nous avons également fait jouer nos relations : je connaissais quelqu’un de très haut placé qui bien voulu déposer un recours gracieux auprès du préfet, qui a failli fonctionner. Le préfet nous avait dit oralement qu’il lèverait cette OQTF, mais suite au remaniement ministériel, ce soutien politique a perdu sa place et donc son pouvoir auprès de la préfecture qui nous a bien fait comprendre qu’elle ne ferait rien pour nous, puisqu’il n’y avait plus aucune pression derrière.

Nous avions mis beaucoup d’espoir dans cet appui : nous nous autorisions à reparler de nos projets de vacances, d’emménagement dans un nouvel appartement en septembre, de notre couple… mais nous sommes retournés à la case départ.

La vie de clandestin

L’OQTF laissait à mon copain jusqu’à fin mars pour quitter le territoire français. Il est donc rentré dans la clandestinité : pas question d’abandonner ses études ! Le moindre contrôle d’identité peut l’envoyer en centre de rétention puis dans son pays d’origine. Il ne peut même plus aller chez lui sous peine de voir arriver les forces de l’ordre un petit matin pour l’arrêter, et il n’a pas pu suivre ses derniers cours à la fac.

Ces derniers temps, il est donc resté caché chez moi pour réviser, et n’est sorti quasiment que pour se rendre à ses examens, la peur au ventre : on pourrait très bien venir l’y chercher. Inutile de dire qu’il n’a pas été facile pour lui de se concentrer sur ses révisions. Nous évitons au maximum les sorties, surtout la nuit, pour éviter les contrôles d’identité. Je le soutiens, je fais tout ce que je peux pour l’aider, parce que c’est la seule chose que je puisse faire et parce que je l’aime tout simplement.

Les sanctions encourues

Pour la personne qui ne quitte pas le territoire français ( comme expliqué ici encore ) :

L’étranger, qui tente de se soustraire ou se soustrait à une obligation de quitter la France, peut être condamné par le juge pénal :

  • à une peine de 3 ans maximum de prison,
  • et éventuellement à une interdiction judiciaire du territoire français.

De plus, le préfet peut décider à son encontre une interdiction de retour en France.

Pour la personne qui cache un clandestin (comme expliqué sur le site du Dalloz) – le « délit d’aide au séjour irrégulier » :

La loi n° 2012-1560 du 31 décembre 2012 relative à la retenue pour vérification du droit au séjour et modifiant le délit d’aide au séjour irrégulier pour en exclure les actions humanitaires et désintéressées est publiée au Journal officiel du 1er janvier 2013.

Ainsi, d’après l’article L. 622-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :

« Toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers, d’un étranger en France sera punie d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 30 000€. »

Cependant l’article L. 622-4 stipule qu’il y a des exceptions : l’aide au séjour irrégulier d’un étranger ne peut donner lieu à des poursuites pénales lorsqu’elle est le fait :

« 1° Des ascendants ou descendants de l’étranger, de leur conjoint, des frères et sœurs de l’étranger ou de leur conjoint ;

2° Du conjoint de l’étranger, de la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui, ou des ascendants, descendants, frères et sœurs du conjoint de l’étranger ou de la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui ;

3° De toute personne physique ou morale, lorsque l’acte reproché n’a donné lieu à aucune contrepartie directe ou indirecte et consistait à fournir des conseils juridiques ou des prestations de restauration, d’hébergement ou de soins médicaux destinées à assurer des conditions de vie dignes et décentes à l’étranger, ou bien toute autre aide visant à préserver la dignité ou l’intégrité physique de celui-ci. »

Personnellement je garde espoir dans les quelques personnes prêtes à nous aider, comme l’association de la Ligue des Droits de l’Homme et des amis qui nous soutiennent, mais lui plus vraiment. Il est fatigué de courir partout pour faire des dossiers, avoir des rendez-vous avec telle et telle personne, tout en se consacrant à ses révisions.

Nous nous raccrochons depuis quelques jours à notre soutien haut placé qui a retrouvé une bonne place : il a écrit une lettre à la préfecture, qui a deux mois pour nous répondre. Nous attendons donc. Du fait de ce recours, mon amoureux n’est plus expulsable, mais il peut toujours être arrêté et placé en camp de rétention.

clandestin 1

Il entame sa deuxième semaine d’examens en espérant les réussir pour pouvoir prouver que non, il n’était pas un profiteur du système d’immigration français. Nos projets sont toujours en « stand by », car aujourd’hui nous vivons un peu au jour le jour… Chaque jour passe dans l’espoir de recevoir ce recommandé qui nous annoncera la bonne nouvelle.

S’il n’a pas de visa à la rentrée prochaine, il ne pourra pas s’inscrire à la fac. Et on ne sait pas si ces mois de clandestinité pourraient en empêcher la délivrance…

Quant à moi, je sais que je risque des poursuites judiciaires, mais je ne veux pas savoir en quoi elles consistent. Il n’est pas question de ne pas accueillir mon amoureux, et de ne pas lui permettre de continuer ses études.

D’ailleurs, je me sens très mal de le qualifier de clandestin. Pour moi, un clandestin est quelqu’un qui vit illégalement dans un pays sans en avoir les moyens, sans avoir de lien avec celui-ci, sans y avoir sa place, sans y avoir été accueilli. Mon copain qui vit en France depuis trois ans pour y faire des études que son pays ne peut lui proposer, en se finançant tout seul, en ayant passé toute son enfance en France même, un clandestin ? Vraiment ?

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Les Commentaires

55
Avatar de cococat
6 novembre 2016 à 13h11
cococat
@Melissa J'ai été un peu déçue, le lien "chaine Youtube" renvoie à un article sur les chaines youtube scientifiques alors que je m'attendais à tomber sur la chaine de l'auteur, ce serait ptete pertinent de pas mettre de lien mot-clé là
Alors j'ai regardé tous les messages mentionnant la Police dans ce topic et les seuls qui associaient racisme, sexisme et attitude policières que j'ai trouvé sont les passages suivants :
Donc ça te "donne autant la gerbe que les propos raciste" quand on se réfère à des situations précises ou des policiers se montrent racistes?
Je ne vois pas où il y a des généralités puisqu'on parle toutes de cas précis.
@Whoslolo cite une phrase qu'un policier aurait dit à l'une des femmes interviewées dans le documentaire, je me réfère au même documentaire et je cite plusieurs extraits et @adita préicse que "ça dépend des policiers et du contexte". Alors à moins que tu aies vu des messages qui m'aient échapper, je ne vois pas où on a dit que "tous les flics sont racistes, machos et bons à rien".
Après, faut pas non plus jouer le consensualisme à l'extrême. Les policiers font un travail difficile dans des conditions déplorables, ils sont mal payés, instrumentalisés par une classe politique qui les traite mal en coulisse (genre Sarkozy qui diminue les effectifs, rendant leur boulot encore plus éprouvant, et essaye de les calmer en fermant les yeux sur les débordements et en faisant des grands discours flatteurs).
Mais la Police est le produit de notre société et on vit dans une société raciste et sexiste. Elle suit aussi des ordres politiques, et nos politiciens ont définitivement une attitude raciste (y compris un gouvernement de gauche). C'est alors parfaitement logique que les seules personnes autorisées à utiliser la violence dans un cadre légal adoptent régulièrement des comportements à l'image de la société ou du gouvernement.
De nombreuses femmes qui portent plainte pour agression, qu'il s'agisse d'agression sexuelle ou non, se font recadrer de manière super sexiste par la Police. Les témoignages sont légions sur ce point. Et de nombreuses personnes noires, arabes, étrangères subissent un traitement qu'un blanc lambda ne subit pas aux mains de la Police, les témoignages sont aussi légions et il n'y a pas que les premiers concernés pour en témoigner. Des ONG comme Human Rights Watch ou Amnesty International ont dénoncé le contrôle au faciès en France, les associations comme les Amoureux au Ban Public démontrent les lois racistes qui peuvent cibler certains couples. Elles ont fait des études, ont des centaines de témoignages et de cas sur lesquels s'appuyer.
Alors oui, individuellement, en tant que personne, le policier n'est pas forcément un macho raciste. Mais il travaille dans un système où le sexisme et le racisme sont très mal sanctionnés et où la sensibilisation sur ces sujets sont très mal faites. Je ne vois pas ce qu'il de "gerbant" dans le fait de dénoncer un système qui encourage des attitudes oppressives.
Et je ne vois pas comment on peut faire comme si le racisme et le sexisme sont des exceptions rares puisque tant de femmes et de personnes non-blanches témoignent de leur rapport compliquée avec les attitudes policières.
Ce n'est pas une critique de ta maman policière ou de toi-même si tu es policière, vous êtes peut-être des flics exemplaires comme le sont certainement plusieurs de vos collègues, c'est la critique d'un système qui est CLAIREMENT problématique. Et je suis désolée si c'est ta profession, mais beaucoup de citoyens en souffrent.

Merci pour ta réponse.non ce n est pas ma profession ni celle de ma mère. Mais je connais des policiers qui sont des gens exceptionnels que ca blessent d entendre beaucoup d idées reçues. A mes yeux, dire que les flics sont racistes et sexistes c est comme dire que les arabes sont voleurs et menteurs, c est juste affreux et terriblement blessant pour les personnes concernées. Meme si des personnes témoignent dans le sens "je suis noirs et je subis le racisme des flics" c est comme ceux qui disent "je suis blanche et je me fait toujours agresser par des noirs" je trouve ça minable et ça influence les gens à faire des generalités.
Je vois souvent des commentaires de madmoizelle essayant de discrediter la police ou les profs ou les professions de santé en se basant uniquement sur des histoires "on m a dit que..." Ou "parce-que moi j ai vécu ça, c est toujours comme ça" C est pour ça que je notait ce point. Essayons juste de ne faire d amalgame pour personne tout bêtement.
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